...

Le journal du Médecin : Que notez-vous de particulièrement nouveau dans GOLD 2023? Pr Didier Cataldo: Avant tout une clarification et, dans les recommandations, des nouveautés sur le plan de la mortalité. En ce qui concerne la clarification, la classification en quatre groupes nommés A, B, C et D est simplifiée en trois groupes A, B et E (lire encadré). C'est logique, dans la mesure où l'ancien groupe C ne compte pratiquement pas de patients. Ils sont décrits comme très peu symptomatiques mais souffrant d'exacerbations répétées. Y a-t-il des changements sur le plan des recommandations thérapeutiques? Des clarifications y ont également été apportées. Ainsi, chez les patients des groupes B et E, il est recommandé de débuter systématiquement par la double bronchodilatation, en associant un LAMA et un LABA. On peut discuter d'y ajouter un corticostéroïde inhalable via une trithérapie de type LAMA/LABA/ICS chez les patients du groupe E lorsque le taux d'éosinophiles sanguins est égal ou supérieur à 300/µL. Mais il faut noter que cette recommandation est off-label en traitement initial. Personnellement, je pense qu'il faut d'abord prescrire un LAMA/LABA chez ces patients et observer leur réponse au traitement. Bien sûr, en cas d'asthme associé à la BPCO, la situation est différente, et on se basera sur une trithérapie adaptée - mais on est là un peu à côté du domaine des recommandations GOLD. Et au cours du suivi? Une clarification judicieuse a également été apportée pour le follow-up. Il n'y a plus de place pour les ICS/LABA. Si la dyspnée n'est pas suffisamment contrôlée malgré l'instauration d'un traitement par LAMA/LABA, il convient d'abord de vérifier si le patient ne présente pas d'autres causes de dyspnée, comme une décompensation cardiaque ou une anémie, par exemple. Il s'agit alors, dans la plupart des cas, de proposer une revalidation. Par ailleurs, en tenant compte des souhaits et des caractéristiques du patient, on peut envisager de switcher d'inhalateur, par exemple passer d'un DPI (poudre sèche) à un pMDI (liquide pressurisé), voire à un SMI (soft mist inhaler). Que faire si le patient continue à souffrir d'exacerbations? Dans ce cas, s'il est traité par LAMA/LABA et qu'il présente un taux d'éosinophiles sanguins ? 100/µL, on lui prescrira une trithérapie LAMA/LABA/ICS. Cette dernière n'apporte pas de bénéfice préventif des exacerbations lorsque le taux est inférieur à 100/µL. Il faut alors se rabattre sur un traitement complémentaire alternatif, qui est l'azithromycine en Belgique. Sans oublier le volet traitement non pharmacologique... Il faut effectivement insister sur ce volet, qui est très important. Il est par exemple très clair que l'arrêt d'un tabagisme contribue fortement à la limitation des exacerbations. Pour le reste, les nouvelles recommandations GOLD se caractérisent aussi par un essai de classification des causes de la BPCO, qui est une maladie hétérogène. On mentionne les cas de mauvais développement de la fonction pulmonaire, comme chez certains prématurés. En présence d'un nouveau cas de BPCO, il est toujours intéressant de demander au patient s'il est né à terme et avec un poids de naissance normal. Le nouveau document évoque aussi l'exposition massive à la pollution atmosphérique, dès le début de la vie, comme dans certaines régions d'Afrique et d'Asie. Il s'agit souvent d'exposition aux fumées à l'intérieur des maisons (chauffage ou cuisson au bois), et ces personnes développent donc une BPCO sans avoir jamais fumé du tabac. Dans certains pays, cela peut concerner 70% des cas de BPCO. Sur le plan génétique, la classification cite aussi le déficit en a-1 antitrypsine et les mutations (ou l'hétérozygotie) qui conduisent à une mucoviscidose larvée. En Belgique, voit-on actuellement des cas de BPCO liée à des polluants, tels que dans certaines professions? Avec le niveau actuel de la médecine du travail dans notre pays ainsi que la qualité générale de l'air dans l'intérieur de nos habitations, nous avons très peu de cas de BPCO qui serait liée à ce genre de pollution. Il nous arrive de voir en consultation BPCO des patients qui ont été, par exemple, exposés à de la poussière de pierre alors qu'ils travaillaient dans une carrière, mais il s'agissait généralement de personnes ayant aussi fumé. Y voit-on plus clair aussi sur la prévention de la mortalité liée à la BPCO? En effet. Pour la toute première fois, le document GOLD comprend un tableau qui énumère les interventions qui permettent de limiter cette mortalité. On y indique notamment que la trithérapie LAMA/LABA/ICS réduit la mortalité lorsqu'elle est prescrite dans la bonne indication (voir tableau 1).Sur le plan des interventions non pharmacologiques, on retrouve bien entendu la cessation tabagique, la revalidation pulmonaire et l'oxygénothérapie au long cours, mais aussi la ventilation positive non invasive en mode chronique pour les patients stables mais hypercapniques. La réduction chirurgicale du volume pulmonaire est également discutée. Elle nécessite un CT-scan, car elle ne se pratique pas en présence d'une collatéralité de la BPCO. À propos du CT-scan, GOLD recommande la réalisation de cet examen (en mode low dose) chaque année. Est-ce une bonne chose? Effectivement, ce conseil est donné - et ce n'est pas nouveau - dans le cadre de la prévention du cancer bronchique, avec un bénéfice tout particulièrement démontré chez les patients âgés entre 50 et 75 ans, avec une consommation totale d'au moins 30 paquet-années. Mais cette pratique visant à détecter des nodules suspects n'est pas encore correctement organisée en Belgique, en ce sens qu'elle n'est pas remboursée pour le patient.