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Que ce soit à l'approche de l'hiver ou au moment de plonger dans la mer, la tolérance au froid semble varier d'une personne à l'autre. Cette différence s'expliquerait par un variant du gène ACTN3, dont la modification entraîne la perte d'une protéine appelée alpha-actinin-3. Cette protéine présente dans les fibres musculaires serait en effet absente chez près de 1,5 milliards de personnes dans le monde, ce qui les rendrait naturellement plus résistantes au froid. Une équipe suédoise en apporte la preuve expérimentale.Les chercheurs du Karolinska Institutet ont recruté 42 hommes adultes en bonne santé, âgés de 18 à 40 ans, porteurs ou non du variant. Durant l'expérience, il a été demandé aux participants de s'asseoir dans de l'eau froide à 14 °C. Après 20 minutes, ils devaient sortir du bain pour se "reposer" 10 minutes à température ambiante, puis réitérer l'expérience jusqu'à faire descendre leur température corporelle à 35,5 °C ou jusqu'à atteindre les deux heures dans l'eau (170 minutes avec les pauses). Pendant l'immersion dans l'eau froide, les scientifiques ont mesuré leur activité électrique musculaire par électromyographie (EMG) et ont effectué des biopsies musculaires pour étudier la teneur en protéines et la composition des types de fibres. Les chiffres sont éloquents : les personnes porteuses du variant et qui manquent d'α-actinine-3 sont 69% à avoir réussi à maintenir leur température corporelle à 35,5 °C jusqu'à la fin des deux heures, contre seulement 30% de celles possédant de l'α-actinine-3.Par ailleurs, les chercheurs ont constaté que les muscles squelettiques des personnes sans α-actinine-3 contiennent une plus grande proportion de fibres musculaires à contraction lente (muscles rouges). Une fois refroidies, elles sont mieux capables de maintenir leur température corporelle à un certain niveau : au lieu d'activer les fibres rapides, qui provoquent des frissons, elles ont tendance à produire de la chaleur en augmentant l'activité de base (tonus) dans les fibres lentes. En revanche, les participants chez qui l'α-actinine-3 est détectée ont plus de fibres musculaires à contraction rapide (muscles blancs) et sont dès lors moins résistants au froid.Enfin, les auteurs ont également pu déterminer que l'absence de l'α-actinine-3 affecte les performances sportives des individus. Les personnes qui manquent d'α-actinine-3 réussissent rarement dans les sports exigeant de la force et de l'explosivité alors qu'elles sont plus performantes dans les sports d'endurance. L'inverse se produisant chez les personnes qui possèdent la protéine.Signalons encore que, selon l'étude, la mutation génétique qui consiste à ne plus posséder de protéine α-actinine-3 se serait produite il y a plus de 50 000 ans lorsque l'Homo sapiens a commencé à quitter les terres africaines pour découvrir des régions plus froides en Europe. (référence : American Journal of Human Genetics, 17 février 2021, doi : 10.1016/j.ajhg.2021.01.013)