Plus d'un Belge francophone sur troisa déjà renoncé à des soins de santé parmanque d'argent. Ce constat alarmant,dressé par les mutualités Solidaris en 2022, confirme lesinégalités d'accessibilité à la santéqui règnent encore en Belgique, tant sur le plan géographique (déserts médicaux...) que financier.

Les patients sont notamment de plus en plus nombreux à faire l'impasse sur uneconsultation chez un généraliste : alors qu'en 2015,8% des francophones avaient annulé leur rendez-vous en "première ligne" pour raisons économiques, ils étaient14%en 2022. Cette tendance se traduit différemment d'une commune à l'autre. Elle peut notamment s'expliquer par lesconditions socio-économiques propres à chaque population, mais aussi par lestarifs appliqués par les généralistesqui y exercent.

Une obligation de transparence

"Chez les généralistes, l'écart de tarifs entre conventionné ou non-conventionné est bien plus restreint que chez les spécialistes (ophtalmologues, dermatologues...), précise toutefois Guy Delrée, président de la Fédération des Associations de Médecins Généralistes de la région Wallonie (FGAW). Il se chiffre entre 2 et 5 euros, voire parfois un peu plus." Pour la bonne information de son patient, le généraliste est tenu de mentionner sur son site internet et/ou dans sa salle d'attente sa non-adhésion aux honoraires fixés par la convention.

En 2023, plus de 92 % des généralistes étaient conventionnés en Belgique, contre 90 % en 2022 et 85 % en 2012. Un taux de conventionnement nettement supérieur à celui des médecins spécialistes, qui s'élevait à 82 % en 2023. Ce taux diffère toutefois fortement d'une région à l'autre du pays.

À l'échelle provinciale, c'est dans leBrabant wallon(76 %) et à Bruxelles (81 %) que ce pourcentage est le plus faible, selon les dernières données fournies par l'Inami datant de 2022.À l'autre extrémité du classement, c'est àNamur(96 %) et dans le Limbourg (98 %) que l'on retrouve le plus grand nombre de généralistes ayant adhéré à la convention.

En termes de densité (nombre de généralistes conventionnés par 10.000 habitants), c'est à nouveauBruxellesqui trinque. Avec seulement5,66 généralistesconventionnés pour 10.000 résidents, la capitale se classe loin derrièreNamur(8,56), Liège (7,86) ou leLuxembourg (7,94). Plombé par une pénurie générale de médecins de première ligne, leHainaut affiche un maigre taux de 6,67, malgré son pourcentage relativement correct (87 %) de conventionnement.

Effet de mimétisme

Des disparités flagrantes sont également observables à l'échelle communale. Selon les données de l'Inami (datant cette fois de 2021), ce taux oscille entre 10 % à Ellezelles et 100 % à Hamois, Blegny ou Châtelet, pour ne citer que ces communes.

Plusieurs raisons peuvent pousser les généralistes à se déconventionner. "Ce choix n'est pas forcément motivé par des raisons financières", insiste Guy Delrée. Cela peut par exemple traduire une forme de désaccord avec les termes de la convention. "Une sorte de signal de mécontentement envoyé à l'Inami et aux politiques", résume le président de la FGAW.

Un effet de mimétisme se produit également dans certaines communes : si la majorité des médecins y sont déconventionnés, les nouveaux venus sont contraints d'aligner leur prix par souci de confraternité. "Dans certains cercles, une pression est exercée sur les jeunes médecins qui s'installent pour qu'ils pratiquent eux aussi le déconventionnement", confirme Pierre Drielsma, administrateur du GBO. À Neufchâteau, par exemple, le taux de conventionnés a toujours été relativement faible. "C'est une tendance historique qui se confirme d'années en années", observe Guy Delrée.

Médecins généralistes ou Robin des bois ?

Bien sûr, les aspects financiers entrent également en compte. Pour des médecins exerçant à Bruxelles ou dans le Brabant wallon, augmenter les honoraires des consultations permet d'amortir les coûts plus élevés de l'immobilier et/ou de location du cabinet. Se déconventionner permet également plus d'indépendance dans les tarifs des visites à domicile. "Dans le Luxembourg, par exemple, les déplacements sont souvent très longs et donc peu rentables, pointe Pierre Drielsma. À Bruxelles, les embouteillages ou les difficultés de parking augmentent également ces temps de visite". Et Guy Delrée de compléter : "Les visites à domicile peuvent réellement représenter un gouffre financier pour le généraliste, donc certains se déconventionnent uniquement pour pratiquer des tarifs plus élevés pour ce genre de consultations." Une manière, également, de dissuader la patientèle d'exiger des visites à domicile pour "tout et n'importe quoi".

"Les médecins déconventionnés ne sont pas tous de 'grands méchants vénaux'"

Evidemment, lacapacité contributive de la patientèlejoue également un rôle dans l'élaboration des tarifs. Sans surprise, un taux plus important de déconventionnement est observé dans lescommunes les plus aisées, telles que dans le sud de Bruxelles (Uccle, Woluwe-Saint-Pierre...) ou dans le Brabant wallon (Lasne, Waterloo, La Hulpe...). "Pour certaines populations - par exemple dans le quartier européen -payer 10€ de plus sa consultation n'entraîne aucune conséquence ", assure Guy Delrée. "Mais pour un patient plus pauvre qui vit dans cette même commune, cela aura unimpact direct sur son portefeuille", regrette Pierre Drielsma. Certains généralistes adaptent ainsi leurs tarifs aux dispositions économiques de chaque patient. "Les médecins déconventionnés ne sont pas tous de 'grands méchants vénaux'", nuance Guy Delrée. De son côté, Pierre Drielsma plaide pour unconventionnement à 100%. "Ce n'est pas au généraliste de s'auto-proclamer 'Robin des bois', en taxant ses patients les plus riches et en pratiquant de la médecine bénévole pour les plus pauvres, tonne-t-il. C'est sur leplan de la fiscalité que cette redistribution doit s'opérer."

Plus d'un Belge francophone sur troisa déjà renoncé à des soins de santé parmanque d'argent. Ce constat alarmant,dressé par les mutualités Solidaris en 2022, confirme lesinégalités d'accessibilité à la santéqui règnent encore en Belgique, tant sur le plan géographique (déserts médicaux...) que financier. Les patients sont notamment de plus en plus nombreux à faire l'impasse sur uneconsultation chez un généraliste : alors qu'en 2015,8% des francophones avaient annulé leur rendez-vous en "première ligne" pour raisons économiques, ils étaient14%en 2022. Cette tendance se traduit différemment d'une commune à l'autre. Elle peut notamment s'expliquer par lesconditions socio-économiques propres à chaque population, mais aussi par lestarifs appliqués par les généralistesqui y exercent."Chez les généralistes, l'écart de tarifs entre conventionné ou non-conventionné est bien plus restreint que chez les spécialistes (ophtalmologues, dermatologues...), précise toutefois Guy Delrée, président de la Fédération des Associations de Médecins Généralistes de la région Wallonie (FGAW). Il se chiffre entre 2 et 5 euros, voire parfois un peu plus." Pour la bonne information de son patient, le généraliste est tenu de mentionner sur son site internet et/ou dans sa salle d'attente sa non-adhésion aux honoraires fixés par la convention.En 2023, plus de 92 % des généralistes étaient conventionnés en Belgique, contre 90 % en 2022 et 85 % en 2012. Un taux de conventionnement nettement supérieur à celui des médecins spécialistes, qui s'élevait à 82 % en 2023. Ce taux diffère toutefois fortement d'une région à l'autre du pays.À l'échelle provinciale, c'est dans leBrabant wallon(76 %) et à Bruxelles (81 %) que ce pourcentage est le plus faible, selon les dernières données fournies par l'Inami datant de 2022.À l'autre extrémité du classement, c'est àNamur(96 %) et dans le Limbourg (98 %) que l'on retrouve le plus grand nombre de généralistes ayant adhéré à la convention.En termes de densité (nombre de généralistes conventionnés par 10.000 habitants), c'est à nouveauBruxellesqui trinque. Avec seulement5,66 généralistesconventionnés pour 10.000 résidents, la capitale se classe loin derrièreNamur(8,56), Liège (7,86) ou leLuxembourg (7,94). Plombé par une pénurie générale de médecins de première ligne, leHainaut affiche un maigre taux de 6,67, malgré son pourcentage relativement correct (87 %) de conventionnement.Des disparités flagrantes sont également observables à l'échelle communale. Selon les données de l'Inami (datant cette fois de 2021), ce taux oscille entre 10 % à Ellezelles et 100 % à Hamois, Blegny ou Châtelet, pour ne citer que ces communes.Plusieurs raisons peuvent pousser les généralistes à se déconventionner. "Ce choix n'est pas forcément motivé par des raisons financières", insiste Guy Delrée. Cela peut par exemple traduire une forme de désaccord avec les termes de la convention. "Une sorte de signal de mécontentement envoyé à l'Inami et aux politiques", résume le président de la FGAW.Un effet de mimétisme se produit également dans certaines communes : si la majorité des médecins y sont déconventionnés, les nouveaux venus sont contraints d'aligner leur prix par souci de confraternité. "Dans certains cercles, une pression est exercée sur les jeunes médecins qui s'installent pour qu'ils pratiquent eux aussi le déconventionnement", confirme Pierre Drielsma, administrateur du GBO. À Neufchâteau, par exemple, le taux de conventionnés a toujours été relativement faible. "C'est une tendance historique qui se confirme d'années en années", observe Guy Delrée.Bien sûr, les aspects financiers entrent également en compte. Pour des médecins exerçant à Bruxelles ou dans le Brabant wallon, augmenter les honoraires des consultations permet d'amortir les coûts plus élevés de l'immobilier et/ou de location du cabinet. Se déconventionner permet également plus d'indépendance dans les tarifs des visites à domicile. "Dans le Luxembourg, par exemple, les déplacements sont souvent très longs et donc peu rentables, pointe Pierre Drielsma. À Bruxelles, les embouteillages ou les difficultés de parking augmentent également ces temps de visite". Et Guy Delrée de compléter : "Les visites à domicile peuvent réellement représenter un gouffre financier pour le généraliste, donc certains se déconventionnent uniquement pour pratiquer des tarifs plus élevés pour ce genre de consultations." Une manière, également, de dissuader la patientèle d'exiger des visites à domicile pour "tout et n'importe quoi".Evidemment, lacapacité contributive de la patientèlejoue également un rôle dans l'élaboration des tarifs. Sans surprise, un taux plus important de déconventionnement est observé dans lescommunes les plus aisées, telles que dans le sud de Bruxelles (Uccle, Woluwe-Saint-Pierre...) ou dans le Brabant wallon (Lasne, Waterloo, La Hulpe...). "Pour certaines populations - par exemple dans le quartier européen -payer 10€ de plus sa consultation n'entraîne aucune conséquence ", assure Guy Delrée. "Mais pour un patient plus pauvre qui vit dans cette même commune, cela aura unimpact direct sur son portefeuille", regrette Pierre Drielsma. Certains généralistes adaptent ainsi leurs tarifs aux dispositions économiques de chaque patient. "Les médecins déconventionnés ne sont pas tous de 'grands méchants vénaux'", nuance Guy Delrée. De son côté, Pierre Drielsma plaide pour unconventionnement à 100%. "Ce n'est pas au généraliste de s'auto-proclamer 'Robin des bois', en taxant ses patients les plus riches et en pratiquant de la médecine bénévole pour les plus pauvres, tonne-t-il. C'est sur leplan de la fiscalité que cette redistribution doit s'opérer."