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Le mal-être des infirmiers, un sujet qui revient presque chaque année et qui n'en finit plus. Nous savons tous que c'est un métier qui demande énormément d'énergie, de travail et d'engagement, que ce soit dans les hôpitaux ou en première ligne aux côtés des médecins. Dans cette ère où les soins sont omniprésents face au vieillissement de la population et aux patients chroniques nécessitant un suivi régulier, les infirmiers sont plus indispensables que jamais. Cette problématique se posera encore plus lorsque nous soutiendrons en masse les soins à domicile après hospitalisation. Malgré un nombre estimé de plus de 100 000 infirmiers inscrits en Belgique, il est triste de constater qu'ils sont souvent délaissés par manque de valorisation, ce qui crée des crispations au sein de la profession.En tant que professionnel de la santé, je suis conscient que le contact humain et relationnel avec les patients est une facette magnifique de ce métier. C'est indéniablement une profession passionnante où l'on donne énormément de soi, et cela mérite une reconnaissance et une valorisation bien méritées. Mais en quoi consiste réellement la reconnaissance ? S'agit-il de considérer les acteurs de soins au même niveau, de favoriser l'élargissement des compétences pour accorder plus d'autonomie à la profession, voire même d'envisager des augmentations de salaire ? J'ai pu échanger avec de nombreux infirmiers dans ma pratique en libéral et auprès des hôpitaux, et je comprends que certains, à tort ou à raison, hésitent à s'investir davantage dans ce métier jugé exigeant. Certains finissent même par changer de métier ou de carrière professionnelle, et cela en dit long sur les défis auxquels ils font face. Mais où est le problème au fond ?La question cruciale à mon sens que nous devons nous poser est donc la suivante : comment pouvons-nous intégrer les infirmiers dans un environnement plus sécurisant et rassurant, où chaque profession de la santé est considérée comme essentielle, et en particulier celles en première ligne ? Nous sommes en pleine transition dans le domaine de la santé, et je me plais à l'appeler "la révolution de la santé en marche". Je suis convaincu que les rôles de chacun vont évoluer. Actuellement, nous assistons à une revendication de certaines compétences médicales par chaque profession, et il est vrai que la répartition des tâches peut être source de tensions. Je crois qu'il est temps de remettre en question cette corporatisation et de clarifier les rôles de chaque professionnel de la santé pour mettre cela à plat. Je peux donner un exemple dont je soutiens personnellement : c'est la première consultation d'admission aux services d'urgences, les infirmiers spécialisés sont à même de pouvoir identifier le besoin vital et lancer les premiers examens complémentaires de base. Je pense notamment à l'infirmière en anesthésie qui élabore l'aspect technique mais également de réflexion médicale dans un premier temps. À nous, corps professionnel, de mettre un cadre professionnel à l'ensemble des métiers et donner des perspectives à chacun.La formation est également un vaste débat, et je reconnais que le malaise provient, entre autres, du manque d'harmonisation dans la formation des infirmiers. Il est essentiel que nous tendions vers une harmonisation de la profession en respectant la réglementation européenne et un répertoire clair des différentes tâches de chacun. J'ai également été informé des tensions existant entre infirmiers bacheliers et brevetés, ainsi que des lacunes de compétences chez certains infirmiers. Cela m'a amené à me demander comment défendre une profession où les infirmiers eux-mêmes ne parviennent pas à s'entendre ou entrent en compétition. J'ai dans ma profession toujours considéré une infirmière comme telle, complète, mais force à croire que le défaut d'une harmonisation de formation rend parfois le métier difficile. Pour y parvenir, les associations doivent défendre la création d'un conseil de l'ordre pour identifier les besoins, les manques et représenter de manière solide la profession. Là où effectivement nous devons mettre les forces, c'est de soutenir les spécialisations des infirmiers en urgences, en oncologie, en anesthésie, en néphrologie, en pédiatrie, etc. Les compétences acquises au fil des années apportent une valeur ajoutée aux soins de santé et offrent particulièrement des perspectives à chaque infirmier(e). Mais où trouver la limite ? Et là entre en jeu les hôpitaux pour déterminer la plus-value d'avoir des infirmiers avec assez d'expérience pour se sentir à la place. Nous pouvons parler du bien-être au travail mais je pense que cela incombe aux gestionnaires d'hôpitaux, l'État ne peut garantir un bien-être mais donne un cadre à la profession. Le bien-être est de se sentir à sa place dans un centre de soins grâce à une écoute, un soutien et une volonté de la part des responsables d'hôpitaux de créer une atmosphère conviviale.Enfin, il est primordial de trouver un équilibre et une collaboration harmonieuse entre toutes les professions de la santé. Chaque métier joue un rôle crucial et complémentaire dans le système de santé. En accordant une reconnaissance appropriée à l'importance des infirmiers et en valorisant leurs compétences à leur juste mesure, cela les motivera davantage, en mettant particulièrement l'accent sur la spécialisation. Ensemble, nous pourrons bâtir un système de santé plus solide et efficace, qui répondra au mieux aux besoins des patients et de l'ensemble de la société. Cela exige une remise en question collective, une ouverture d'esprit et une volonté sincère de travailler main dans la main pour construire un avenir meilleur pour tous les acteurs de la santé.