Le Comité consultatif de bioéthique de Belgique publie son avis n° 86 relatif à la gestation pour autrui (GPA). Dans cet avis, le Comité souligne qu'il est souhaitable de développer un cadre légal afin de promouvoir la sécurité juridique pour les parties prenantes et un accès équitable à la pratique.
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Démuni face à un précédent avis en la matière vieux de presque 20 ans, Frank Vandenbroucke avait demandé un nouvel avis du Comité consultatif de bioéthique de Belgique à propos de la gestation pour autrui. Prenant le pas du ministre fédéral de la Santé publique, le Comité s'est penché sur la nécessité d'un nouveau cadre légal pour encadrer la GPA. Dans ce nouvel avis, rendu le 17 avril, le Comité souhaite réaffirmer que la gestation pour autrui est éthiquement acceptable, moyennant le respect de certains principes et considérations éthiques.Le recours à la procédure d'adoption, tel que pratiqué aujourd'hui suite à l'accouchement de la mère porteuse, n'est pas suffisamment adapté. Les lacunes dans la législation créent de l'insécurité juridique autour des droits des parents d'intention. Cette situation justifie donc, pour le Comité, la nécessité de faire adopter par le législateur un cadre légal qui prend en compte les six exigences minimales suivantes :1. La subsidiarité : la GPA devrait être une option à laquelle les parents d'intention recourent en cas d'infertilité ou de difficultés à mener une grossesse et lorsque les autres techniques ou modes de reproduction ne sont pas objectivement satisfaisants.2. L'intention : la GPA est basée sur l'intention comme décision fondamentale de la parentalité, et non sur la capacité biologique à concevoir un enfant. La parentalité fondée sur l'intention prévaut, c'est-à-dire que le parent biologique qui prête son concours (en cas de GPA, la mère gestatrice) perd son droit à la parentalité dès lors qu'elle s'engage à porter l'enfant et que la conception a lieu.3. L'accès équitable : la GPA doit être accessible à tous. La validité d'un projet parental ne devrait pas dépendre de critères tels que l'orientation sexuelle, la situation familiale, l'origine ethnique, la classe sociale ou les moyens financiers des parents d'intention. Ce n'est pas le cas actuellement, car les centres de fécondation décident eux-mêmes des personnes éligibles à la GPA, non pas uniquement selon des critères psycho-médicaux, mais également sociaux.4. La liberté de choix : la GPA doit se faire avec la participation de la femme gestatrice exempte de toute pression ou coercition. Elle ne doit pas recevoir de contrepartie financière importante en échange du service de porter l'enfant, ni se sentir obligée de porter un enfant pour des amis ou sa famille, ce qui peut être le cas actuellement du fait que certains centres de fécondations exigent que les parents d'intention trouvent eux-mêmes une femme gestatrice dans leur entourage proche.5. L'encadrement en centre : la GPA devrait se faire dans les centres de fécondations reconnus. Le Comité estime qu'ils sont les mieux placés pour fournir des conseils médicaux, juridiques et psychologiques lors d'une demande de GPA et pour vérifier que les parties disposent d'une information suffisante.6. L'encadrement hors centre : la GPA sans fécondation in vitro ou sans autre intervention médico-technique (auto-insémination) doit pouvoir bénéficier de ces mêmes conseils et de ce même accompagnement de la part des centres de fécondation, bien que la fécondation ne s'y déroule pas.Entre les lignes de son communiqué de presse, on pourrait déceler un appel du Comité de bioéthique pour le remboursement de la GPA par l'Inami. " Nous ne le demandons pas tel quel dans l'avis, mais nous essayons de faire assimiler la GPA à d'autres formes de procréation médicalement assistée, déjà remboursées par l'Inami ", reconnait An Ravelingien, co-présidente de la commission restreinte qui a élaboré l'avis.Le Comité de bioéthique précise encore qu'il existe un dissensus en son sein sur la question du moment à partir duquel les parents d'intention et la femme gestatrice sont tenus de respecter leurs accords et ne peuvent plus changer d'avis. Certains membres du Comité estiment que si une femme gestatrice refuse de renoncer à l'enfant après l'accouchement en dépit de l'accord initial, celui-ci doit être exécuté pour atteindre le premier objectif de celui-ci, à savoir la sécurité juridique pour toutes les parties. Étant donné que la femme gestatrice n'a jamais été la mère légale (elle a renoncé à toute revendication de droits parentaux au moment de la conception), par définition, l'enfant en question n'est pas le sien, mais celui des parents d'intention. En outre, si la femme gestatrice est autorisée à revenir sur sa décision, les parents d'intention devraient également pouvoir le faire, et cette possibilité n'est pas non plus souhaitable.D'autres membres estiment qu'il n'est pas acceptable et admissible d'imposer à la femme gestatrice de renoncer à l'enfant comme s'il s'agissait d'un accord commercial. En cas de litige, le tribunal de la famille semble le mieux à même de trancher les conflits. L'ensemble du Comité estime toutefois que la sécurité juridique des parents d'intention ne peut être absolue. Tout au long de la grossesse, la femme gestatrice doit conserver le droit de décider - dans le respect des lois sur l'avortement - si elle souhaite ou non poursuivre la grossesse. " C'est un dissensus minimal ", temporise Cathy Herbrand, l'autre co-présidente de la commission restreinte GPA. " L'accompagnement préalable au processus contribue à réduire drastiquement le risque que ce problème se pose. À notre connaissance, il ne s'est d'ailleurs jamais posé lors d'une GPA en hôpital en Belgique. "Maintenant qu'il a rendu cet avis, le Comité consultatif de bioéthique espère profiter d'un ouverture actuelle du politique sur le sujet et attend une nouvelle législation-cadre en matière de GPA avant les prochaines élections. " Ce nouveau cadre devrait permettre aux parents d'intention en Belgique de bénéficier de GPA en Belgique dans un cadre sécurisant " conclut Cathy Herbrant. La gestation pour autrui représente actuellement entre 30 et 40 cas par an dans les hôpitaux belges.