Quel bilan en vue des élections 2024 ? La santé est devenue un sujet central de la législature sortante, dont les premières années ont fortement été marquées par la pandémie de covid-19.
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Début 2020, la transmission rapide d'un coronavirus depuis la ville chinoise de Wuhan inquiète le corps médical. Mais en Belgique, les premières réactions politiques sont prudentes. Dans un tweet devenu célèbre, la ministre de la Santé d'alors, Maggie De Block, va même traiter les médecins de "Dramaqueen", avant d'effacer. Face à l'augmentation du nombre de cas, des hospitalisations et aux premiers décès, le ton change rapidement. Quinze jours plus tard, le 17 mars, tard le soir, la Première ministre Sophie Wilmès apparait à la télévision, le ton grave. Dès le lendemain, les Belges devront rester à la maison. Et la vie se résume pour une majorité de la population à rester à la maison, faire ses courses dites "essentielles", télétravailler, applaudir tous les soirs à 20h un personnel soignant débordé et regarder les conférences de presse du Conseil national du sécurité, puis, après l'installation de la Vivaldi, des Comités de concertation.En coulisses, la gestion du covid-19 s'avère complexe. Les kern élargis à tous les partis siégeant dans un exécutif sont tendus et plusieurs polémiques apparaissent, notamment sur la gestion des stocks et l'achat de masques. Des questionnements juridiques apparaissent aussi, notamment, plus tard, lors de l'adoption de ladite "loi pandémie". Le texte passera finalement le cap de la Cour constitutionnelle. À la Chambre, une commission spéciale sera installée dès juillet 2020, à la fin de la première vague. Après un an de travaux, elle formulera 134 recommandations, dont plusieurs seront laissées sans suite, a notamment regretté l'un de ses experts, Yves Coppieters, désormais candidat pour Les Engagés.La mise à l'arrêt du pays, la recherche de masques de protection ou encore la campagne de vaccination n'a pas été le premier dossier santé de la législature: à l'automne 2019, alors que la formation du gouvernement fédéral s'enlisait, un vote allait mettre le feu au Parlement. Contre l'avis du gouvernement libéral-CD&V en affaires courantes, un amendement du PTB portant création d'un "Fonds Blouses blanches" et doté de 67 millions d'euros allait être adopté avec le soutien des socialistes, des écologistes et du Vlaams Belang. Ce Fonds destiné à engager du personnel infirmier supplémentaire se retrouvait dès lors inscrit dans la Loi sur les douzièmes provisoires, qui servaient alors de budget pour l'année 2020.La pandémie aidant, une majorité plus large s'est ensuite dégagée pour rendre le dispositif pérenne. Sous l'égide du député PS Marc Goblet, une proposition de loi a été adoptée dès juin 2020 : un montant de 402 millions d'euros est désormais prévu annuellement. Le montant du Fonds s'ajoute à la norme de croissance des soins de santé. En octobre 2020, la Vivaldi prend ses quartiers rue de la Loi. L'accord de gouvernement annonce une norme de croissance fixée à 2,5% à partir de l'année 2022. Promesse tenue... jusqu'au budget 2024. Cette norme est retombée à 2% en 2024, au grand dam de l'opposition. Le ministre de la Santé Frank Vandenbroucke se défend, rappelant le refinancement de plusieurs secteurs."He's back, bitches". C'est en ces mots peu fleuris que l'ancien président de Vooruit Conner Rousseau annonce le retour aux affaires d'un vieux briscard de la politique belge, à près de 65 ans, Frank Vandenbroucke. En pleine deuxième vague de la pandémie, le nouveau ministre de la Santé d'une Vivaldi fraichement installée tranche avec sa prédécesseure devenue très discrète. Il occupe le devant de la scène, justifie et défend les mesures sanitaires, quitte à déplaire. Un commissaire corona, Pedro Facon, est nommé à ses côtés. Et la campagne de vaccination est menée tambour battant. Une campagne couronnée de succès. Un an après son lancement en janvier 2021, 78,3% de la population totale avait reçu au moins une dose de vaccin contre le coronavirus et 76,7% avait reçu deux doses.L'organisation de la campagne de vaccination, par contre, sera au coeur d'une polémique en fin de législature, celle de l'affaire dite "Medista", du nom de l'entreprise belge qui estime avoir été lésée dans une passation de marché public pour le stockage et la distribution de vaccins. L'affaire sent le souffre, avec des soupçons de favoritisme de la part du SPF ou encore l'appel par Medista à une agence de renseignement privée. Un audit fédéral interne affirme que la fonctionnaire soupçonnée d'avoir favorisé le concurrent, Movianto, a bien fait plusieurs entorses aux règles déontologiques. Frank Vandenbroucke, lui, a déposé plainte avec constitution de partie civile. L'affaire n'est toutefois pas close aux yeux de l'opposition et singulièrement de la députée N-VA Kathleen Depoorter, qui ne lâche pas le morceau et continue de réclamer la démission du ministre.En février 2022, quasi toutes les restrictions sanitaires ont été levées. Et d'autres dossiers sont dès lors apparus, Frank Vandenbroucke menant ses nombreuses réformes au pas de charge : renforcement de la santé mentale, réforme du droit du patient, interdiction de certains suppléments d'honoraires, nouvelles mesures de lutte contre l'alcool et le tabac, création de la profession d'"assistant de pratique", fin du certificat médical obligatoire pour un seul jour de maladie, meilleur remboursement des lunettes et appareils auditifs, nouvelle loi "qualité" ou encore le premier volet de la réforme hospitalière. Avec les secrétaires d'État Sarah Schlitz puis Marie-Colline Leroy, la Vivaldi augmente aussi le nombre de Centre de Prise en charge des victimes de violences sexuelles (CPVS).Le travail n'est pas terminé, assure Frank Vandenbroucke. Le socialiste ne s'en cache pas, il souhaite conserver le portefeuille de la Santé dans le prochain gouvernement.Certains de ses dossiers n'ont pas été exempts de polémiques, comme celui concernant les études de médecine et l'octroi des numéros Inami. Dans un texte "fourre-tout", Frank Vandenbroucke intègre fin 2022 un article instaurant un verrou individuel dans l'octroi des numéros Inami après la réussite des études et le diplôme pour les médecins et les dentistes. L'opposition le remarque et fulmine. Mais cet article, finalement retiré, permet d'ouvrir, en parallèle, des négociations avec la Fédération Wallonie-Bruxelles. S'en est suivi un accord sur un dossier pendant depuis une vingtaine d'années : en échange d'une augmentation du quota pour le sud du pays dès 2028, la FWB s'est engagée à instaurer à partir de la rentrée de 2023 un concours à l'entrée en médecine afin de mieux faire correspondre le nombre de diplômés aux nombre de numéros Inami.Un dernier dossier a animé la Chambre et le gouvernement fédéral au début de l'année 2024 : celui du remboursement de la logopédie. Jusqu'à présent, les enfants présentant un quotient intellectuel inférieur à 86 étaient exclus d'office du remboursement de séances de logopédie en mono-disciplinaire. La réglementation prévoyait une prise en charge multidisciplinaire. Le sujet est revenu sur la table via un amendement de Catherine Fonck (Les Engagés), provoquant une interruption de séance à la Chambre. L'amendement était rejeté, mais la Vivaldi se montrait divisée. La semaine suivante, un accord conclu entre les partenaires de la majorité fera en sorte que, jusqu'au 30 juin 2025, tous les enfants - quel que soit leur QI - auront accès à la prise en charge par l'Inami de séances de logopédie en mono-disciplinaire sur simple prescription d'un médecin généraliste.Belga