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Plusieurs organisations étudiantes (AGL et AGW (UCLouvain), CIUM, FEF et ORE (UMons)) ont organisé le mercredi 16 février un sitting d'environ 250 étudiants devant le cabinet du ministre de la Santé publique. Absent, il a délégué son chef de cabinet qui a reçu posément une délégation de 5 étudiants. Ceux-ci protestent contre l'article 69 de son projet de Loi limitant l'octroi des numéros Inami de manière automatique. Les organisations ont recueilli près de 7.000 signatures contre l'article en question. Explications avec Lucas van Molle, président de la Fédération des étudiants francophones.jdM : ça s'est bien passé votre réunion ?Lucas van Molle : oui. Dans la bonne humeur et le respect de toutes les contraintes.Le ministre était là ?Non. Mais nous avons été reçus par son chef de cabinet.Que reprochez-vous au projet de loi de VDB ?D'abord (sur le texte en lui-même) s'il est actionné via un Arrêté-royal, cela va de facto limiter fortement l'accès à la profession médicale. En second lieu, le chef de cabinet l'a parfaitement reconnu : c'est un outil de chantage sur la Communauté française à instaurer un concours à l'entrée aux études. Nous y sommes totalement opposés car un filtre de ce type serait totalement inégalitaire étant donné que l'enseignement obligatoire en CF est un des plus déséquilibrés de l'OCDE. Les étudiants de milieux défavorisés seront sanctionnés par une épreuve de ce type pour se classer en ordre utile. Ce nouvel obstacle à l'accès à la profession n'est pas logique étant donné le contexte de pénurie existant. La planification de l'offre n'est pas en adéquation avec la réalité du terrain, pensons seulement au vieillissement de la population et un accroissement des maladies chroniques.Le chef de cabinet (Jan Bertels, ndlr) vous a entendu ? Il a été ouvert ?Il y a quelque chose de très frustrant : il ne conteste pas les pénuries. Il reconnaît que le contingentement actuel n'est pas adapté aux besoins. Mais il veut absolument maintenir la pression sur la CF pour un " filtre plus efficace ". Traduction : un concours.Ce concours serait en adéquation avec le nombre de numéros Inami à la fin des études ?Oui. Tout est conditionné à ce concours. C'est pour nous tout à fait incohérent... D'autant qu'on a mis ensemble, sur la table, la possibilité d'augmenter le nombre de numéros Inami, de sortir certaines spécialités de pénurie du contingentement. Tout cela peut être mis en place sans renforcer la sélection aux études via un concours voire même cette sélection pourrait être supprimée. Derrière tout cela il y a sans aucun doute des arrière-pensées électoralistes dont les étudiants pâtissent.Avez-vous quantifié les pénuries dont vous parlez ? Le chef de cabinet lui-même vous a-t-il présenté des chiffres objectivés ?Bien sûr. Nous utilisons le " plan K " de 2016. Il offre une série de projections qui montre une croissance des pénuries. Le chef de cabinet voyait très bien de quoi nous parlions.Le chef de cabinet était transparent finalement quant à ses intentions ?Oui. Il a même dit que l'article 69 était un symbole et un moyen de pression sur la CF (pour la mise en place d'un concours). C'est un chantage politique qui place les étudiants dans l'incertitude.Quelles sont les autres thématiques que vous avez pu échanger ?Nous avons demandé de pouvoir faire sauter cet article 69 pour arriver à une négociation plus saine. Nous voulons, avant toute négociation, " réobjectiver " les besoins. Revoir le contingentement serait la suite logique. En outre, nous sortirions, comme je l'ai dit, des spécialités en pénurie du contingentement. Il nous a écoutés attentivement mais il conditionne nos revendications à ce fameux concours.Il y a une dizaine de jours (lire jdM n°2701), l'opposition en FWB a déposé une motion de censure en conflit d'intérêt pour gagner du temps (60 jours). Qu'est-ce que cela donne concrètement ?La majorité politique en FWB a demandé le report de la motion qui est encore active. Mais chacun se renvoie la patate chaude. C'est à celui qui cèdera le premier, apparemment.Le cabinet ne vous a pas promis d'augmenter les quotas ?Non. Nous étions renvoyés systématiquement à la négociation en cours (au jeu de ping-pong je dirais).Apparemment, le cabinet peut agir selon son bon vouloir puisque le projet de loi est déjà passé cet été en conseil des ministres...Effectivement, Frank Vandenbroucke renverra son projet de loi en plénière à la Chambre si la négociation échouait...Vous êtes plutôt pessimiste ?Oui. Car s'il y a un accord, ce sera au détriment des étudiants et du système de soins de santé. Avec ce type de mesures, on ira vraisemblablement vers plus encore de pénuries, un système à double vitesse entre ceux qui peuvent se permettre une assurance hospitalisation et accès à des soins plus rapides et les autres qui devront attendre six mois pour se faire soigner...Pensez-vous que la CF est toute prête à leur " accorder " le concours en échange de numéros Inami suffisants notamment pour l'an qui vient ?Je le crains. Sauf concours, aucune planification ne sera jugée suffisante à leurs yeux.Comment vous êtes-vous quittés ? Combien étiez-vous ?Très bien. Nous étions cinq et lui tout seul.Quelle est l'étape suivante ?Attentifs aux négociations, nous continuons à garder les étudiants mobilisés pour peser sur la suite.