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Les "habitués" des rapports du KCE se souviennent sans doute qu'en 2019 était publié le plus récent des rapports d'évaluation de la performance du système de santé belge (Health System Performance Assessment - HSPA(1)). Partant d'une approche globale (holistique), ces HSPA contiennent rien moins que 121 indicateurs abordant cinq dimensions sanitaires (qualité, accessibilité, efficience, durabilité et équité) comparés aux objectifs, aux résultats des pays de l'UE-15 ou aux normes de soins ou, à défaut, à l'avis d'experts. En font partie une analyse des différences régionales. Dans le cas qui nous occupe, la HSPA consacrée aux malades chroniques se base précisément sur l'avis d'experts et de cadres conceptuels canadiens et néerlandais sur la même thématique considérés comme complémentaires, pertinents pour la Belgique et adapté au cadre sanitaire de notre pays. Le KCE s'est fixé trois objectifs: "informer les acteurs de la santé sur la performance du système de santé pour les patients chroniques et sur la différence de performance du système de santé pour les patients chroniques et non chroniques" ; "fournir une vision transparente et responsable de la performance du système de santé pour les patients chroniques", et ; "suivre la performance du système de santé pour les patients chroniques dans le temps".Pour surmonter l'absence de définition claire en Belgique de la "maladie chronique", le rapport fait référence à une liste de 21 "affections" chroniques propres à Medicaid et Medicare où l'on retrouve l'asthme, l'arthrite, le diabète, le sida, etc. et se penche sur les patients renseignés comme chroniques par l'Inami ou auto-déclarés comme tels dans l'enquête nationale santé. On constate tout d'abord que "la part des Belges ayant droit au statut affection chronique est passée de 8,7% (2013) à 12,1% (2020), et celle des Belges autodéclarant être atteints d'une maladie chronique a également augmenté de 25,1% en 2001 à 29,3% en 2018". On observe également une hausse de la proportion de Belges déclarant souffrir de multimorbidité (de 11,4% à 15,2% entre 2001 et 2018). Dans le détail, "au niveau des indicateurs d'efficacité relatifs aux hospitalisations évitables liées aux complications du diabète ou à la BPCO, la Belgique se situe au-dessus de la moyenne UE-15, tandis qu'elle est en dessous de cette moyenne en ce qui concerne l'asthme". Les données datent toutefois de 2016. " Les indicateurs portant sur les hospitalisations évitables liées à l'asthme et au diabète affichent une tendance baissière potentiellement attribuable à une amélioration de la qualité des soins de première ligne, tandis que les hospitalisations liées à la BPCO sont en hausse, sauf à Bruxelles."Par ailleurs, "les indicateurs de continuité livrent des résultats positifs dans le secteur des soins primaires pour les diabétiques sous insuline, mais décevants pour les diabétiques traités par des antidiabétiques autres que l'insuline", note le KCE. Le taux de succès du traitement de la TB pulmonaire fluctue entre 78% et 84%, et reste proche de l'objectif fixé par l'OMS-Europe, à savoir 85%. L'utilisation du DMG en médecine générale a augmenté au fil des années, avec une couverture passant de 60,1% en 2014 à 77,9% en 2019 (mais seulement 60% à Bruxelles) en 2019. Or "la couverture du DMG est meilleure parmi les patients bénéficiant du statut affection chronique que parmi les patients n'en bénéficiant pas, à l'exception des personnes âgées et des 24-44 ans". De même, un contact de suivi des patients âgés par un MG dans la semaine suivant leur sortie d'hôpital est intervenu pour plus de la moitié des hospitalisations chez les patients chroniques (58,1% en 2019). "Cependant, le taux de suivi diminue au fil du temps et n'évolue donc pas dans la bonne direction." Sur dix hospitalisations de patients chroniques âgés, plus de quatre n'ont pas été suivies d'un contact avec le MG dans la semaine suivant la sortie d'hôpital (voir graphique). La continuité de l'information en médecine générale pour les patients chroniques est rendue difficile par le fait que tous ne disposent pas d'un dossier médical global. Entre 2013 et 2018, "l'expérience des patients par rapport à l'opportunité de poser des questions ou de formuler leurs inquiétudes aux médecins à propos du traitement reste positive et ne varie guère selon la région et le statut affection chronique." De manière analogue, l'indicateur portant sur le temps consacré par le médecin aux patients simplement ou doublement chroniques (Inami + enquête santé) est positif. Enfin, en 2019, trois patients chroniques sur dix ont un pharmacien de référence. Certains signaux positifs sont mentionnés à propos de la qualité des soins des patients chroniques: "Le taux d'hospitalisations évitables pour asthme est inférieur à la moyenne UE-15 et a baissé ces dernières années, ce qui pointe une efficacité relativement bonne des soins de première ligne de ces patients chroniques." La proportion de personnes traitées avec succès contre la tuberculose pulmonaire est également supérieure à la moyenne européenne. Du point de vue du patient (évaluation des soins centrés sur le patient), l'évaluation est également positive étant donné que la majorité des patients, malades chroniques ou non, ont rapporté une expérience positive avec les services de santé en général. Néanmoins, "plusieurs signaux d'alerte ont été identifiés, comme les hospitalisations évitables des patients atteints de BPCO. La proportion d'adultes diabétiques bénéficiant d'un suivi approprié est insuffisante, à cause, entre autres, d'un nombre de consultations chez l'ophtalmologue qui est inférieur à ce qui est recommandé."Pêle-mêle, l'étude révèle un nombre insuffisant de patients inscrits dans les trajets de soins (pour les diabétiques non insulinodépendants), ce qui affecte la qualité des soins qui leur sont dispensés. "On constate une efficience accrue au niveau des dialyses, mais qui peut encore être améliorée. La proportion de dépistages du cancer du sein est toujours trop faible par rapport à la moyenne européenne, et ce, pour les personnes tantavec que sans statut affection chronique."Prudent, le KCE recommande, notamment, "de continuer à s'attaquer aux problèmes mis en évidence par les signaux d'alerte dans ce rapport" et aux mutuelles, "d'informer de manière proactive les personnes vivant avec une maladie chronique de leur statut et de leurs droits".