DoxyVAC: intérêt ou pas d'adjoindre le vaccin contre le méningocoque ?

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Pour rappel, la population de l'étude DoxyVAC était majoritairement composée d'hommes gais et bisexuels, principalement de nationalité française, dont l'âge moyen était de 40 ans. Pour prendre part à cet essai, les participants devaient déjà être sous PrEP. Ils comptaient, en moyenne, près de trois ans sous PrEP. Au cours de l'année précédant l'inscription à l'étude, les taux d'IST étaient élevés au sein de cette population: 68 % des participants avaient eu une gonorrhée, 49 % une chlamydia et 21 % une syphilis. La phase randomisée de l'étude DoxyVAC a cependant été arrêtée début septembre 2022 après l'annonce des résultats de l'étude DoxyPEP. Cette étude américaine avait rapporté une efficacité globale de 66 % de la PEP à la doxycycline contre les trois IST, chlamydia, syphilis et gonorrhée. Ce chiffre principal est souvent cité comme étant l'efficacité globale de la doxyPEP mais c'est trompeur ! En fait, son efficacité contre chlamydia et syphilis chez les hommes séronégatifs était respectivement de 88 % et 87 % (chez les hommes séropositifs, elle était un peu plus faible) mais, contre la gonorrhée, elle n'était que de 55 %. Il a cependant été jugé utile de pouvoir déjà prévenir la moitié des infections par une bactérie qui, dans une petite minorité de cas, peut provoquer des effets graves allant de l'arthrite aux malformations cardiaques en passant par la stérilité. Cependant, une étude française antérieure avait trouvé une efficacité nulle du doxyPEP contre la gonorrhée apparemment parce que la proportion de bactéries gonorrhéiques résistantes à la doxycycline était plus élevée en France. C'est pour ces raisons que, pour l'étude DoxyVAC, le professeur Molina et ses collaborateurs ont ajouté, en plus de la doxycycline à prendre jusqu'à 72 heures après chaque exposition possible, un vaccin contre la méningite B, 4CMenB, administré en deux injections dans les deux premiers mois suivant inclusion. En effet, on sait que la bactérie responsable de la gonorrhée est étroitement apparentée à celle qui cause la méningite à méningocoque et des études antérieures avaient indiqué une efficacité possible de 33 à 40% du vaccin contre la gonorrhée.L'efficacité de la doxyPEP contre la chlamydia et la syphilis a peu changé lors de l'analyse finale. L'incidence annuelle de la chlamydia était de 42 % chez les participants ne prenant pas de doxyPEP et de seulement 6 % chez les personnes prenant la doxyPEP, soit une efficacité de 86 %, alors que l'analyse intermédiaire avait conclu à une efficacité de 89 %. En ce qui concerne la syphilis, l'efficacité était la même dans les analyses intermédiaires et finales, à savoir 79 %. En d'autres termes, la doxyPEP a permis d'éviter quatre infections syphilitiques sur cinq et près de neuf infections à chlamydia sur dix.L'analyse intermédiaire avait révélé une incidence annuelle de gonorrhée de 41 % chez les participants ne prenant pas de doxyPEP contre 20,5 % dans le groupe doxyPEP, soit une efficacité de 51 %. Néanmoins, les gonorrhées survenues ultérieures ont fait la différence. Dans l'analyse finale, l'incidence de gonorrhée était de 68% chez les participants n'ayant pas pris de doxyPEP et de 45,5% dans le groupe doxyPEP ce qui équivaut à une efficacité de 33% au final. L'efficacité du vaccin candidat contre la gonorrhée s'est également révélée considérablement plus faible lors de l'analyse finale que dans l'analyse intermédiaire passant de 33 % à 22 %. La pertinence du vaccin semble donc très limitée. Un autre vaccin plus efficace s'avère donc nécessaire et les études à la recherche de cette perle rare ont déjà débuté.Réf: Molina J-M et al. Abstract 124, CROI 2024, Denver.