S'il reste fréquent de voir des patients souffrant d'une PR légère traités notamment par antalgiques, AINS, corticoïdes ou méthotrexate, les choses sont plus compliquées pour les cas plus sévères, qui se voient plutôt proposer un DMARD, comme un inhibiteur du TNF. La réponse au traitement n'est pas assurée au long cours, et il peut être alors utile de passer à un tsDMARD, comme un immunosuppresseur tel les inhibiteurs de Janus kinase (JAK).
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En Belgique, les conditions de remboursement des JAKi sont actuellement assez complexes, comme l'indique l'exemple de l'upadacitinib [1].Au-delà des questions d'ordre financier, que nous disent les connaissances actuelles ? C'était l'objet d'un exposé de la Pre Christina Charles-Schoeman (Centre médical de l'UCLA, à Los Angeles) et qui tournait autour d'une question centrale : quand (et pourquoi) faut-il envisager de modifier un traitement par TNFi? L'oratrice rappelle qu'une PR non stabilisée entraine non seulement une progression observable sur le plan radiologique et une altération du fonctionnement somatique, mais également une augmentation du risque CV, d'infection sévère, d'ostéoporose et de cancer. Il faut donc veiller à ce que le patient soit le plus rapidement possible en rémission ou, au minimum, que sa maladie soit faiblement active (LDA). Cela impose notamment de monitorer cette dernière le plus fréquemment possible, avec une réévaluation thérapeutique dans les trois mois d'une absence d'amélioration. Ce monitoring suppose une bonne évaluation au départ, ce qui ne serait pas effectué dans près de la moitié des cas d'après une étude d'Edgerton et al. publiée il y a quelques mois [2]. Cette même étude montre que les patients souffrant d'une PR modérée à sévère seraient encore près de la moitié à rester sous première ligne de TNFi un an après son initiation, malgré l'absence de stabilisation dans leur cas. Une étude toute récente et présentée lors du congrès [3] incluait 1.215 patients PR sous première ligne de TNFi. La majorité des non répondants à trois mois n'ont toujours pas obtenu une réponse à 12 mois. De plus, environ un patient sur quatre ayant atteint un stade LDA ou une rémission à trois mois n'était plus en LDA ou en rémission au 12? mois. Dans l'étude d'Edgerton, parmi 572 patients atteints de PR modérée à sévère ayant subi un échec thérapeutique avec leur première ligne de TNFi, 15% l'ont relancée et 46% ont switché pour un autre TNFi - le plus souvent pour cause de manque d'efficacité de la première ligne. Comment expliquer les échecs éventuels du TNFi chez ces patients ? Il se peut que leur maladie ne soit pas tellement associée à des processus dépendant du TNF-α ou, en cas de bonne réponse initiale, qu'ils aient développé des anticorps dirigés contre le médicament. C'est surtout dans ce dernier cas qu'il convient d'envisager un changement clair de traitement. L'EULAR va d'ailleurs dans ce sens, recommandant de passer à un autre médicament en cas d'échec de la première ligne de TNFi (ou d'IL-6Ri). Enfin, une méta-analyse incluant 68 études [4] montre que la cible thérapeutique (LAD ou rémission) serait plus généralement atteinte par le switch vers un médicament au mécanisme d'action différent. À ce titre, switcher vers un JAKi semble constituer une bonne stratégie, d'après la récente étude de Caporall et al [5]. Mais a priori, comme écrit plus haut, ce débat n'a vraiment de sens qu'avec un bon suivi du patient.Sources : [1] https://www.cbip.be/fr/ampps/176370?cat=b [2] Edgerton C et al. ACR Open Rheumatol. 2024;6(4):179-188 [3] Real-World Analysis of Initial Clinical Response and Future Outcomes Among Patients with Rheumatoid Arthritis Initiating and Remaining on a 1st-Line Tumor Necrosis Factor Inhibitor in the United States. Charles-Schoeman C et al. 19 novembre 2024 [4] Perkins K et al. AMCP Nexus 2023 [5] Caporall R et al. Adv Ther. 2024;41(9):3700-3721