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Isabelle m'interpelle lors d'une consultation pour sa fille de 6 semaines : "Docteur, savez-vous que les vaccins sont dangereux ?". Je ne pense pas que les vaccins soient dangereux" je réponds, "mais il est vrai que la vaccination est un acte médical qui peut avoir des effets indésirables. Pourquoi pensez-vous cela?". Elle réfléchit : "J'ai lu tellement de choses sur internet, je ne sais plus quoi penser." Suite à cette question, je lui propose de mieux décrire ses craintes et nous en discutons longuement. Quelques jours plus tard, elle m'appelle car, avec son mari, ils ont décidé de ne pas mettre Camille tout de suite en crèche et souhaitent reporter le premier vaccin, pour qu'elle fasse son immunité "naturellement".Tout médecin a déjà été confronté à ce type de question dans sa pratique ; il n'est pas facile d'y répondre car certains patients pensent être bien informés sur le sujet et sont peu enclins à la discussion. Cela peut entraîner de la frustration et de l'énervement chez le soignant. L'objectif de ce TFE est d'apporter des pistes de réponses aux médecins pour faciliter le dialogue et de leur donner des outils pour aider les patients réticents à s'orienter vers la vaccination. L'hésitation vaccinale est multifactorielle et a été définie en 2015 par l'OMS comme : "(...) le retard dans l'acceptation ou le refus des vaccins malgré la disponibilité de services de vaccination. C'est un phénomène complexe, spécifique au contexte et variant selon le moment, le lieu et les vaccins. Il inclut certains facteurs comme la sous estimation du danger, la commodité et la confiance"[1]. On peut classer les patients en trois groupes quand on parle de vaccination : ceux qui y sont opposés, ceux qui hésitent et ceux qui suivent les recommandations. Les opposants sont rares (< 5% de la population[2]) et utilisent des tactiques bien connues, développées dans mon TFE, pour contredire la science établie. Il est difficile d'avoir une discussion constructive à ce sujet avec eux, notre levier d'action est donc presque nul. Mais il est intéressant de connaître leurs arguments car ce sont ceux-là qui influencent les personnes qui hésitent.Les hésitants à la vaccination sont influencés par des facteurs intrinsèques à leur personne mais aussi via les médias et le Web, où ils sont plus souvent confrontés à des arguments anti-vaccins qu'à une information scientifiquement validée et structurée en faveur de la vaccination. Les arguments les plus fréquents contre la vaccination sont la théorie du complot, la violation du droit individuel de choisir ou non d'être vacciné, l'idée que les vaccins sont inutiles voire dangereux, ... L'objectif de ce travail n'est pas de réfuter ces arguments mais d'arriver à mieux comprendre le fonctionnement de ce public et de pouvoir l'aider à augmenter son acceptation de la vaccination (sans essayer de le convaincre).Les facteurs intrinsèques qui influencent le choix de vaccination sont, entre-autres :- L'âge, le sexe, le niveau d'études et la religion du patient ou des parents- L'attitude du vaccinateur- La perception du système immunitaire par le patient- La mauvaise compréhension de la transmission des maladies infectieuses par le patient- L'utilisation des médecines alternativesPour améliorer l'acceptation de la vaccination, différentes perspectives ont été proposées par l'OMS (à petite ou à grande échelle) : mieux former les agents de santé, atténuer la douleur lors de l'acte vaccinal, créer un système de rappel, mesurer le problème de réticence vaccinale au niveau national, sensibiliser le public, proposer une mobilisation sociale ...Dans cette optique, le soignant doit d'abord questionner les intentions et les croyances du patient, pour ouvrir le dialogue (par des affiches dans la salle d'attente, des questions ouvertes...). Il doit aussi rester (in)formé, pour pouvoir transmettre des connaissances correctes et mises à jour. Pour finir, le vaccinateur doit aider et accompagner le patient dans la construction de son projet de vaccination juste pour lui et pour la société (n'oublions pas que la vaccination est aussi une question de santé publique, notamment parce qu'en se vaccinant soi-même, on protège aussi les autres).