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Selon le rapport de 2014 de l'Institut Scientifique de Santé Publique, 1039 nouvelles infections par le VIH ont été diagnostiquées, soit 3 personnes diagnostiquées séropositives par jour. Afin d'augmenter la couverture et l'accessibilité du dépistage de la population, la politique belge est en pleine réflexion. Dans certains pays européens, des tests appelés "tests de dépistage à résultat rapide" (TDR) sont réalisés en consultation de médecine générale. Le mérite de ces tests est d'avoir un résultat d'orientation rapide en 5 à 30 minutes selon le type de test utilisé.L'objectif de ce travail est d'évaluer l'acceptabilité du TDR et sa perception en médecine générale dans les populations à risque, à savoir les hommes qui ont des rapports sexuels avec des hommes (MSM) et les ressortissants des pays d'Afrique sub-saharienne (SAM).Il s'agit d'une étude mixte avec une partie quantitative et une partie qualitative. La partie quantitative est basée sur un questionnaire anonyme qui a été distribué au Centre ELISA, centre de dépistage anonyme et gratuit à Bruxelles, permettant d'évaluer l'acceptabilité et l'intérêt du TDR en médecine générale. La partie qualitative repose sur des entretiens semi-dirigés avec 5 patient.e.s issue.e.s de chacune des deux populations à risque, MSM et SAM, recrutés par des médecins généralistes. Parmi les 166 patients ayant répondu au questionnaire anonyme, l'acceptabilité du TDR a été évaluée à 83,3%. Cette acceptabilité est statistiquement liée au fait d'avoir déjà réalisé un TDR dans le passé (p= 0,037) et à l'intérêt préalable de réaliser le TDR en médecine générale (p= 0,001). Ainsi, 63,3% des patients consulteraient leur médecin traitant pour réaliser un TDR en consultation de médecine générale. Les femmes (p= 0,043), les hétérosexuels (p= 0,046) et ceux ayant un médecin traitant (p= 0,031) sont de manière statistiquement significative plus intéressés par le TDR en médecine générale que les autres. Cependant, les deux populations cibles, MSM (p= 0,046) et SAM (p= 0,039), sont de façon statistiquement significative défavorables à cette possibilité. En revanche, au cours des entretiens semi-dirigés, la majorité des patients MSM et SAM interrogés se disaient intéressés à réaliser des TDR en médecine générale. Outre la peur de la stigmatisation de la séropositivité, la principale barrière pour les MSM était la révélation de leur orientation sexuelle. Chez les SAM, la barrière consistait en la demande d'un test de dépistage. Une autre différence importante, est la vision du rôle qu'ils portent au médecin généraliste. Alors que les MSM préconisent une relation de collaboration avec leur médecin traitant, les SAM ont une vision paternaliste du leur médecin traitant.Le TDR est un outil de dépistage bien accepté, notamment pour la rapidité du résultat. Cette bonne acceptabilité pourrait augmenter la couverture du dépistage et diminuer les barrières à celui-ci comme le fait de ne pas revenir chercher les résultats ou l'inconvénient de devoir planifier la prise de sang dans un centre de prélèvement. Les patients MSM interrogés s'estiment suffisamment autonomes concernant le dépistage du VIH et préfèrent que la demande d'un test de dépistage provienne du patient lui-même ("Voluntary Counseling and Testing"). Ils attendent que leur médecin traitant leur pose des questions sur leur orientation sexuelle et soit présent en cas de besoin de support psychologique et/ou de référence à des structures spécialisés (post-counseling). Les patients SAM, eux, attendent que le médecin traitant leur donne des conseils et des informations (pré- et post-counseling) et leur propose un test de dépistage ("Provider-Initiated HIV Testing and Counceling"). L'accès à la bonne information et la déstigmatisation de cette maladie sont essentiels dans un plan de lutte contre le VIH.