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Pour le Dr Anne Verougstraete (Service de gynécologie d'Erasme et Sjerp-Dilemma-VUB), l'abandon progressif de la pilule oestro-progestative n'est pas forcément une mauvaise nouvelle si les femmes optent pour une méthode plus efficace et plus pratique.En 2014 (derniers chiffres connus), 570.000 femmes belges prenaient la pilule, soit 30.000 de moins que l'année précédente. En 2012, elles étaient encore 612.000. En DDD, on constate une baisse de 15 millions d'unités, de 200 et 185 millions sur 5 ans. C'est ce qui ressort d'une réponse parlementaire de Maggie De Block à Yoleen Van Camp. Les moyens alternatifs (patch, pilule du lendemain, stérilet...) progressent (lire tableau). L'usage de la pilule du lendemain a " décuplé " selon les chiffres de remboursement de 1.200 à 12.000 DDD. 1.488 femmes l'ont utilisée en 2014. Malgré cette évolution à la baisse, la pilule contraceptive traditionnelle reste toutefois le moyen majeur d'éviter une grossesse.Entre 2010 et 2014, les dépenses Inami pour les moyens contraceptifs sont en baisse de 13,3 à 10,3 millions d'euros. Quelque 150 fillettes ont pris un moyen contraceptif avant l'âge de 10 ans, dont 5 ont pris la pilule du lendemain. Un phénomène qu'il est difficile d'expliquer. Dans les catégories supérieures de la population, ce phénomène est marginal. La pilule du lendemain se prend dans tous les milieux, favorisés ou pas. Toutefois, les femmes de milieu défavorisé utilisent moins la pilule traditionnelle et davantage des moyens qu'il ne faut pas prendre chaque jour. Dans le groupe des femmes bénéficiant d'une intervention majorée, elles ne sont en effet que 87%, contre 96 % des assurées ordinaires à prendre la pilule, ressort-il des chiffres de l'administration. Globalement, " la population féminine privilégie de plus en plus les nouvelles contraceptions où il ne faut pas réfléchir, analyse le Dr Anne Verougstraete. En second lieu, tout ce qui touche aux hormones a mauvaise presse auprès du public 'bio bobo' car celles-ci influenceraient la libido et l'humeur. Après avoir pris la pilule pendant plusieurs années, elles veulent libérer leur corps de ce "carcan hormonal" et sentir leurs ovulations! De plus, elles craignent que cette pilule les rende infertiles (même si aucune étude scientifique ne confirme cette crainte)! " Parmi les femmes qui arrêtent la pilule, certaines vont donc se tourner vers la contraception dite naturelle, où les risques de grossesse non prévue sont grands. " Pour être efficace, cette méthode rigoureuse et compliquée exige une discipline assidue du couple et une formation de longue durée. En général, les femmes font des calculs faux pour évaluer leurs jours fertiles ou téléchargent des applications non validées sur leur portable. Seule une application a été validée scientifiquement! " On ne possède pas de détails concernant les conséquences en nombre d'IVG, car la Commission d'Evaluation ne fonctionne pas pour le moment.Faire confiance à Mère nature est un sujet de discussion chez les jeunes femmes qui entendent privilégier les moyens de contraception non-hormonaux.Pourtant, " le stérilet au cuivre et le stérilet hormonal (qui est une pilule progestative locale) répondent parfaitement à ces préoccupations. " Concernant la contraception d'urgence, certaines villes en Grande-Bretagne ont organisé un centre spécifique où le placement d'un stérilet au cuivre est possible dans les 5 jours après un rapport sexuel non-protégé. L'efficacité du stérilet au cuivre comme contraception d'urgence dépasse les 99%, alors que la contraception d'urgence hormonale varie de 50 à 75% selon le produit utilisé, analyse la spécialiste. Conclusion: " Si la diminution de la prise de la pilule oestroprogestative se fait au profit d'une contraception plus efficace (surtout stérilet hormonal et stérilet au cuivre), on peut considérer que c'est une évolution positive. Le passage vers une contraception dite "naturelle" va par contre donner lieu à pas mal de grossesses non-prévues et à des IVG. "Nicolas de PapeRisque de thromboseQu'en est-il des risques de thrombose? Une étude européenne de 2012 (dont les références n'ont pas été fournies) démontre que l'incidence de thrombose est de 1,7 femme pour 10.000 femmes par année d'utilisation pour les utilisatrices d'implants sous-cutanés à base de progestatif. Pour les femmes qui ne sont pas enceintes et qui n'utilisent pas des contraceptifs hormonaux combinés, l'incidence des thromboses est estimée à environ 2 femmes pour 10.000 femmes par année. En prescrivant une pilule de 1ère ou 2ème génération (plutôt que de 3ième ou 4ième), la France a pu, semble-t-il, éviter 341 embolies pulmonaires. "Les moyens contraceptifs sans oestrogène ne comportent aucun risque de thrombose, précise le Dr Anne Verougstraete. A cet égard, le stérilet au cuivre, le stérilet hormonal (pilule progestative locale) et la pilule progestative seule ne comportent pas non plus de risque de thrombose." Quant au tabac, il ne constitue certainement pas le seul facteur de risque dans le développement de thrombose chez une femme. " Le tabac n'est une contre-indication que chez les femmes de plus de 35 ans qui prennent des pilules oestroprogestatives. Mais comme la vérification du tabagisme pose problème, les autorités politiques laissent au médecin individuel le soin d'analyser les circonstances et d'aiguiller vers un moyen sans oestrogène. " Une patiente peut toutefois faire du shopping médical jusqu'à trouver le médecin qui lui prescrira la pilule. Le médecin n'a plus qu'à " renifler " dès l'entrée de la patiente dans le cabinet, afin de déceler une éventuelle odeur de tabac. Il doit alors enclencher une discussion difficile avec elle à propos d'une contraception plus appropriée.Remboursement en fonction de l'efficacité ?Pour le Dr Anne Verougstraete, l'Inami devrait moduler les remboursements en fonction de l'efficacité des moyens contraceptifs. Ainsi, le stérilet au cuivre, le stérilet hormonal et l'implant n'ont aucun risque de thrombose, sont aussi efficaces que la ligature tubaire et devraient être mieux remboursés par l'Inami. " Il n'est en effet pas logique que les méthodes les plus efficaces ne soient actuellement pas remboursées par la sécurité sociale. Heureusement, quelques mutuelles pallient cette lacune, mais certaines femmes (et certains médecins) ignorent qu'elles peuvent demander une intervention de leur mutuelle en optant pour une méthode plus efficace et plus pratique. "