André Deschamps, lui-même diagnostiqué d'un cancer de la prostate à 51 ans, est le président de l'association belge des patients Wij ook Belgium ainsi que de Europa Uomo, une organisation européenne de défense des intérêts des patients atteints du cancer de la prostate. Dans sa présentation, il a décrit le rôle qu'un patient atteint du cancer de la prostate peut jouer dans la gestion de sa maladie.

M. Deschamps a commencé par une déclaration provocante: le patient devrait toujours être au centre du traitement de son cancer de la prostate, laissant entendre que ce n'est pas toujours le cas. Pourquoi donc? Dans le cadre d'une étude britannique, cette question a été posée à des médecins traitant des patients atteints du cancer de la prostate. Ou plus précisément, il leur a été demandé quels sont les obstacles qui empêchent le patient d'avoir plus de pouvoir de décision.

Dr Google

Les médecins indiquent que les patients sont trop accablés par le diagnostic. Ou qu'environ la moitié d'entre eux demandent à leur médecin de prendre les décisions. Certains médecins avancent également qu'ils n'ont pas la formation ni l'expérience suffisantes en "décisions partagées". Les patients évoquent également des obstacles à ce processus de décisions partagées. En effet, recevoir un diagnostic de cancer de la prostate est un choc psychologique, les patients pensent directement à leur propre décès. Au moment du diagnostic, ils sont prêts à recevoir certaines informations, mais probablement pas toutes celles que le médecin voudrait leur donner. Lorsque les patients rentrent chez eux, leur premier rendez-vous est souvent avec Dr Google, et nous savons tous que les informations qu'on y trouve ne sont pas toujours correctes. André Deschamps a donc demandé aux médecins de faire preuve de compréhension envers les patients qui arrivent à leur deuxième visite avec beaucoup d'informations incorrectes et de questions.

D'un côté, on observe les patients qui préfèrent vivre leur maladie dans un cadre paternaliste, de l'autre côté, il y a les patients qui préfèrent les décisions partagées.

En toute logique, il existe de nombreuses différences entre le médecin traitant et le patient. En ce qui concerne la connaissance de la maladie, ce fossé est indéniable. Le médecin traitant est au courant des directives nationales et internationales, il suit de près les nouveaux développements et est souvent impliqué dans des études internationales. À l'inverse, le patient n'a pratiquement aucune connaissance en matière de cancer de la prostate. Ce décalage peut très souvent compliquer la communication. Par ailleurs, le médecin ne sait généralement rien du patient, ni de sa famille, de sa vie sexuelle, de sa situation financière, de sa vision de la vie, etc. Il est clair qu'ici, c'est le médecin traitant qui est dans l'ignorance.

M. Deschamps présente un autre fossé, que l'on retrouve cette fois au sein même du groupe des patients. D'un côté, on observe ceux qui préfèrent vivre leur maladie dans un cadre paternaliste: ils souhaitent que leur médecin prenne les décisions concernant leur traitement car ils ne veulent pas/ne peuvent pas les prendre eux-mêmes. De l'autre côté, on observe les patients qui préfèrent les décisions partagées. Ces dernières années, nous avons remarqué que de plus en plus de patients penchent pour les décisions partagées. Interrogé sur la manière de traiter cette question, l'orateur reconnaît cet état de fait, et admet qu'il ne peut être contourné. Toutefois, il estime qu'il est possible de réduire les écarts existants grâce à une bonne politique et une meilleure communication, faisant référence à l'approche SHARE, décrite par le Pr Cornford (Liverpool University Hospitals) (figure 1).

André Deschamps a abordé plus en détail les étapes 2 et 3 de cette approche. Comment le patient peut-il être mieux informé? À cet égard il a fait référence au livre Leven met prostaatkanker ("Vivre avec un cancer de la prostate"), corédigé par les deux associations de patients ( Wij ook et Think Blue Flanders) et Janssen Oncology. Ce livre a été écrit du point de vue du patient et a été revu par des spécialistes du cancer de la prostate. Il peut aider les patients à rechercher moins d'informations douteuses sur Internet. M. Deschamps a émis l'espoir que chaque nouveau patient reçoive dorénavant ce livre de son médecin traitant.

Qualité de vie

L'étape suivante de l'approche SHARE consiste à évaluer les préférences des patients. Leur représentant a fait référence à l'étude EUPROMS, une étude sur les résultats rapportés par les patients (PRO) menée par Europa Uomo. Cette étude visait à décrypter le décalage apparent entre les PRO des études cliniques existantes et les questions et commentaires formulés quotidiennement par les patients atteints du cancer de la prostate. (Venderbos L. et al, Eur.Urology Focus, 2020).

La méthodologie de cette étude d'observation consistait en un questionnaire en ligne destiné aux patients européens atteints du cancer de la prostate et ayant reçu un traitement. L'objectif de l'étude était d'évaluer leur qualité de vie en utilisant des questionnaires validés dans la langue maternelle des patients, tels que l'EPIC-26, l'EORTC-QLQ-C30 et l'EQ-5D-5L. Au total, 2.943 réponses ont été recueillies dans 24 pays. L'âge moyen des patients atteints du cancer de la prostate ayant répondu à ce questionnaire était de 70 ans, et l'âge moyen au moment de leur diagnostic était de 64 ans. Au total, 82% des hommes avaient un(e) partenaire. Logiquement pour ce type d'enquête en ligne, on a observé un pourcentage élevé de patients ayant un haut niveau d'éducation et une fonction dirigeante. Près de 2000 répondants n'ont reçu qu'un seul traitement, et pour plus de la moitié d'entre eux, il s'agissait d'une chirurgie. Chez les patients ayant reçu deux traitements, la combinaison de la chirurgie et de la radiothérapie était la méthode la plus fréquente (figure 2).

Le traitement du cancer de la prostate a le plus d'effet sur le fonctionnement sexuel.

La principale critique de cette étude est que les patients d'Europe de l'Est étaient sous-représentés. En outre, 60% des participants à cette étude avaient subi une prostatectomie radicale, de sorte que les résultats globaux de cette étude sont naturellement influencés par les conséquences de cette chirurgie sur leur qualité de vie.

Les résultats montrent clairement que le traitement du cancer de la prostate a le plus d'effet sur le fonctionnement sexuel, bien plus que sur l'incontinence urinaire ou les problèmes hormonaux. Si on demande aux patients quel traitement leur cause le plus de douleur ou d'inconfort, 34% des patients citaient la chimiothérapie. Les patients associent ainsi la fatigue et l'insomnie au traitement par chimiothérapie (respectivement 36,6% et 28,9%). L'étude montre que plus le patient en est à un stade avancé de la maladie, plus l'inconfort est important. La figure 3 expose plus de détails par approche thérapeutique.

Les effets du traitement sur la santé mentale des patients atteints du cancer de la prostate ont également été étudiés dans cette enquête. Il n'est pas surprenant qu'une récidive du cancer ait un grand effet. Plus de 40% des hommes traités pour un cancer de la prostate déclarent avoir été anxieux ou déprimés à un certain degré à un moment donné de leur traitement. À nouveau, le traitement par chimiothérapie est le principal déclencheur des symptômes d'anxiété et de dépression.

Ensuite, l'étude a observé la façon dont les patients atteints du cancer de la prostate vivent leur incontinence urinaire. Si l'on considère uniquement le contrôle urinaire, 61% des hommes interrogés ont rencontré des difficultés. Qu'est-ce que cela signifie pour les patients en pratique? L'enquête a demandé aux hommes combien de protections pour incontinence ils utilisaient chaque jour. Sur l'ensemble des répondants, plus d'un tiers utilisent une ou plusieurs protections par jour. 17% estiment que les gouttes et les fuites constituent un problème majeur ou relativement majeur. Sur cette question du contrôle urinaire, l'enquête montre une différence entre la chirurgie et la radiothérapie.

Enfin, les patients atteints du cancer de la prostate ont également été interrogés sur leur vie sexuelle. Environ la moitié des hommes indiquent que leur fonctionnement sexuel est un problème majeur ou relativement majeur pour eux. Il est possible que la proportion soit encore plus élevée si la question est posée à leur partenaire. Il est révélateur qu'environ trois quarts des hommes qui ont répondu à l'enquête aient jugé leur capacité actuelle à fonctionner sexuellement comme étant mauvaise ou très mauvaise. Cela s'explique en partie par l'âge du patient et en partie par les effets du traitement.

Tant après une prostatectomie qu'après une radiothérapie, les patients indiquent que leur fonctionnement sexuel est un problème majeur ou relativement majeur pour eux. 44,5% des patients traités par radiothérapie ont rencontré des problèmes importants, contre 54,5% des patients ayant subi une prostatectomie. Il est également intéressant de noter que seuls 34% des hommes ont essayé des médicaments ou autres moyens pour améliorer leur érection. Il est donc évident que les hommes ont besoin de davantage de conseils pour surmonter ces problèmes. M. Deschamps a fait référence à une étude suédoise similaire qui a révélé que plus de 80% des patients utilisaient des médicaments ou autres moyens pour améliorer leur érection et continuaient à le faire. Il est donc nécessaire de mieux informer les patients.

André Deschamps a conclu cette intéressante présentation par un certain nombre de messages clés. Une détection précoce du cancer de la prostate est très importante, car la qualité de vie diminue avec la progression de la maladie. Selon lui, un traitement de suivi actif devrait être le premier choix pour garantir la qualité de vie, en supposant bien sûr qu'il s'agit également du traitement le plus sûr.

André Deschamps, lui-même diagnostiqué d'un cancer de la prostate à 51 ans, est le président de l'association belge des patients Wij ook Belgium ainsi que de Europa Uomo, une organisation européenne de défense des intérêts des patients atteints du cancer de la prostate. Dans sa présentation, il a décrit le rôle qu'un patient atteint du cancer de la prostate peut jouer dans la gestion de sa maladie. M. Deschamps a commencé par une déclaration provocante: le patient devrait toujours être au centre du traitement de son cancer de la prostate, laissant entendre que ce n'est pas toujours le cas. Pourquoi donc? Dans le cadre d'une étude britannique, cette question a été posée à des médecins traitant des patients atteints du cancer de la prostate. Ou plus précisément, il leur a été demandé quels sont les obstacles qui empêchent le patient d'avoir plus de pouvoir de décision. Les médecins indiquent que les patients sont trop accablés par le diagnostic. Ou qu'environ la moitié d'entre eux demandent à leur médecin de prendre les décisions. Certains médecins avancent également qu'ils n'ont pas la formation ni l'expérience suffisantes en "décisions partagées". Les patients évoquent également des obstacles à ce processus de décisions partagées. En effet, recevoir un diagnostic de cancer de la prostate est un choc psychologique, les patients pensent directement à leur propre décès. Au moment du diagnostic, ils sont prêts à recevoir certaines informations, mais probablement pas toutes celles que le médecin voudrait leur donner. Lorsque les patients rentrent chez eux, leur premier rendez-vous est souvent avec Dr Google, et nous savons tous que les informations qu'on y trouve ne sont pas toujours correctes. André Deschamps a donc demandé aux médecins de faire preuve de compréhension envers les patients qui arrivent à leur deuxième visite avec beaucoup d'informations incorrectes et de questions. En toute logique, il existe de nombreuses différences entre le médecin traitant et le patient. En ce qui concerne la connaissance de la maladie, ce fossé est indéniable. Le médecin traitant est au courant des directives nationales et internationales, il suit de près les nouveaux développements et est souvent impliqué dans des études internationales. À l'inverse, le patient n'a pratiquement aucune connaissance en matière de cancer de la prostate. Ce décalage peut très souvent compliquer la communication. Par ailleurs, le médecin ne sait généralement rien du patient, ni de sa famille, de sa vie sexuelle, de sa situation financière, de sa vision de la vie, etc. Il est clair qu'ici, c'est le médecin traitant qui est dans l'ignorance. M. Deschamps présente un autre fossé, que l'on retrouve cette fois au sein même du groupe des patients. D'un côté, on observe ceux qui préfèrent vivre leur maladie dans un cadre paternaliste: ils souhaitent que leur médecin prenne les décisions concernant leur traitement car ils ne veulent pas/ne peuvent pas les prendre eux-mêmes. De l'autre côté, on observe les patients qui préfèrent les décisions partagées. Ces dernières années, nous avons remarqué que de plus en plus de patients penchent pour les décisions partagées. Interrogé sur la manière de traiter cette question, l'orateur reconnaît cet état de fait, et admet qu'il ne peut être contourné. Toutefois, il estime qu'il est possible de réduire les écarts existants grâce à une bonne politique et une meilleure communication, faisant référence à l'approche SHARE, décrite par le Pr Cornford (Liverpool University Hospitals) (figure 1). André Deschamps a abordé plus en détail les étapes 2 et 3 de cette approche. Comment le patient peut-il être mieux informé? À cet égard il a fait référence au livre Leven met prostaatkanker ("Vivre avec un cancer de la prostate"), corédigé par les deux associations de patients ( Wij ook et Think Blue Flanders) et Janssen Oncology. Ce livre a été écrit du point de vue du patient et a été revu par des spécialistes du cancer de la prostate. Il peut aider les patients à rechercher moins d'informations douteuses sur Internet. M. Deschamps a émis l'espoir que chaque nouveau patient reçoive dorénavant ce livre de son médecin traitant. L'étape suivante de l'approche SHARE consiste à évaluer les préférences des patients. Leur représentant a fait référence à l'étude EUPROMS, une étude sur les résultats rapportés par les patients (PRO) menée par Europa Uomo. Cette étude visait à décrypter le décalage apparent entre les PRO des études cliniques existantes et les questions et commentaires formulés quotidiennement par les patients atteints du cancer de la prostate. (Venderbos L. et al, Eur.Urology Focus, 2020). La méthodologie de cette étude d'observation consistait en un questionnaire en ligne destiné aux patients européens atteints du cancer de la prostate et ayant reçu un traitement. L'objectif de l'étude était d'évaluer leur qualité de vie en utilisant des questionnaires validés dans la langue maternelle des patients, tels que l'EPIC-26, l'EORTC-QLQ-C30 et l'EQ-5D-5L. Au total, 2.943 réponses ont été recueillies dans 24 pays. L'âge moyen des patients atteints du cancer de la prostate ayant répondu à ce questionnaire était de 70 ans, et l'âge moyen au moment de leur diagnostic était de 64 ans. Au total, 82% des hommes avaient un(e) partenaire. Logiquement pour ce type d'enquête en ligne, on a observé un pourcentage élevé de patients ayant un haut niveau d'éducation et une fonction dirigeante. Près de 2000 répondants n'ont reçu qu'un seul traitement, et pour plus de la moitié d'entre eux, il s'agissait d'une chirurgie. Chez les patients ayant reçu deux traitements, la combinaison de la chirurgie et de la radiothérapie était la méthode la plus fréquente (figure 2). La principale critique de cette étude est que les patients d'Europe de l'Est étaient sous-représentés. En outre, 60% des participants à cette étude avaient subi une prostatectomie radicale, de sorte que les résultats globaux de cette étude sont naturellement influencés par les conséquences de cette chirurgie sur leur qualité de vie. Les résultats montrent clairement que le traitement du cancer de la prostate a le plus d'effet sur le fonctionnement sexuel, bien plus que sur l'incontinence urinaire ou les problèmes hormonaux. Si on demande aux patients quel traitement leur cause le plus de douleur ou d'inconfort, 34% des patients citaient la chimiothérapie. Les patients associent ainsi la fatigue et l'insomnie au traitement par chimiothérapie (respectivement 36,6% et 28,9%). L'étude montre que plus le patient en est à un stade avancé de la maladie, plus l'inconfort est important. La figure 3 expose plus de détails par approche thérapeutique. Les effets du traitement sur la santé mentale des patients atteints du cancer de la prostate ont également été étudiés dans cette enquête. Il n'est pas surprenant qu'une récidive du cancer ait un grand effet. Plus de 40% des hommes traités pour un cancer de la prostate déclarent avoir été anxieux ou déprimés à un certain degré à un moment donné de leur traitement. À nouveau, le traitement par chimiothérapie est le principal déclencheur des symptômes d'anxiété et de dépression. Ensuite, l'étude a observé la façon dont les patients atteints du cancer de la prostate vivent leur incontinence urinaire. Si l'on considère uniquement le contrôle urinaire, 61% des hommes interrogés ont rencontré des difficultés. Qu'est-ce que cela signifie pour les patients en pratique? L'enquête a demandé aux hommes combien de protections pour incontinence ils utilisaient chaque jour. Sur l'ensemble des répondants, plus d'un tiers utilisent une ou plusieurs protections par jour. 17% estiment que les gouttes et les fuites constituent un problème majeur ou relativement majeur. Sur cette question du contrôle urinaire, l'enquête montre une différence entre la chirurgie et la radiothérapie. Enfin, les patients atteints du cancer de la prostate ont également été interrogés sur leur vie sexuelle. Environ la moitié des hommes indiquent que leur fonctionnement sexuel est un problème majeur ou relativement majeur pour eux. Il est possible que la proportion soit encore plus élevée si la question est posée à leur partenaire. Il est révélateur qu'environ trois quarts des hommes qui ont répondu à l'enquête aient jugé leur capacité actuelle à fonctionner sexuellement comme étant mauvaise ou très mauvaise. Cela s'explique en partie par l'âge du patient et en partie par les effets du traitement. Tant après une prostatectomie qu'après une radiothérapie, les patients indiquent que leur fonctionnement sexuel est un problème majeur ou relativement majeur pour eux. 44,5% des patients traités par radiothérapie ont rencontré des problèmes importants, contre 54,5% des patients ayant subi une prostatectomie. Il est également intéressant de noter que seuls 34% des hommes ont essayé des médicaments ou autres moyens pour améliorer leur érection. Il est donc évident que les hommes ont besoin de davantage de conseils pour surmonter ces problèmes. M. Deschamps a fait référence à une étude suédoise similaire qui a révélé que plus de 80% des patients utilisaient des médicaments ou autres moyens pour améliorer leur érection et continuaient à le faire. Il est donc nécessaire de mieux informer les patients. André Deschamps a conclu cette intéressante présentation par un certain nombre de messages clés. Une détection précoce du cancer de la prostate est très importante, car la qualité de vie diminue avec la progression de la maladie. Selon lui, un traitement de suivi actif devrait être le premier choix pour garantir la qualité de vie, en supposant bien sûr qu'il s'agit également du traitement le plus sûr.