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La mucosite orale (ou mucite) est une des toxicités aiguës les plus fréquentes en cas de RT de la tête et du cou. " On estime que près de deux tiers des patients HNC irradiés au niveau de la cavité buccopharyngée développent un degré sévère de mucosite. Si la chimiothérapie (CT) s'ajoute, près de 100% des patients développent une mucosite orale durant le traitement", explique le Pr Nuyts. Outre un traitement concomitant par CT-RT, la RT à dose élevée constitue également un facteur de risque, en particulier dans les zones plus sensibles: plancher buccal, lèvres, partie latérale de la langue, piliers des amygdales et palais mou. D'autres facteurs de risque liés au patient peuvent aussi influencer la sévérité de la mucosite: - mauvaise hygiène buccale, - mauvais état nutritionnel, IMC bas, - xérostomie existante, - âge avancé, - sexe féminin, - consommation de tabac/d'alcool, - médicaments, - diabète. La mucosite orale est transitoire ; elle augmente au fur et à mesure du traitement et disparaît 2 à 3 semaines après la fin de celui-ci. Souvent s'y ajoutent une douleur intense pouvant entraîner des problèmes de déglutition, ainsi qu'une modification ou une perte du goût. Par ailleurs, une modification du pH de la muqueuse buccale peut entraîner des surinfections, responsables d'une mauvaise haleine. Une bouche sèche ou xérostomie est également un effet indésirable fréquent de la RT chez ces patients. L'irradiation des glandes salivaires diminue leur fonction et de là, la production de salive liquide. Toutefois, la salive visqueuse continue à être produite, entraînant la présence de sécrétions épaisses dans la gorge. " Malheureusement, cet effet indésirable est souvent permanent, et très invalidant. Dès qu'il parle, sa bouche devient sèche comme du carton et il peut être incapable d'avaler certains aliments. Les risques de caries, de parodontite et même d'ostéonécrose sont augmentés. Heureusement, grâce aux meilleures techniques de radiothérapie (IMRT), le pourcentage de patients sévèrement affectés par cet effet indésirable à long terme a été considérablement réduit. " La dysphagie, ou trouble de la déglutition, effet indésirable majeur, est souvent due à la conjonction d'une diminution de la production de salive, d'une inflammation des muqueuses et d'une dysfonction des muscles de la déglutition. " Ces symptômes peuvent être présents de manière aiguë pendant le traitement et persister quelques semaines encore. Mais ils peuvent parfois survenir des semaines, des mois, voire des années après la RT, en raison de l'induration des muscles de la déglutition. Les patients peuvent développer des problèmes de déglutition très importants, les empêchant d'avaler toute nourriture solide. De ce fait, leur statut nutritionnel peut également se dégrader. Des études indiquent que la xérostomie et la dysphagie ont l'impact le plus important sur la qualité de vie d'anciens patients HNC.Nous y sommes donc très attentifs. Grâce à l'IMRT épargnant la déglutition, nous essayons d'irradier le moins possible les structures impliquées dans la déglutition. D'autre part, nous incitons les patients à continuer de boire et manger durant le traitement, afin qu'ils entretiennent leurs muscles. " " Concernant la mucosite orale, une analgésie adéquate est très importante en phase aiguë, de même que des bains de bouche désinfectants. Nous prescrivons souvent le célèbre 'magic mouthwash', à réaliser 6x par jour et qui a une action anesthésique locale, désinfectante et antalgique. Comme la mucosite perturbe aussi fortement l'alimentation, les patients bénéficient également d'un suivi diététique intensif. " Pour la xérostomie, le meilleur traitement est de boire suffisamment d'eau et et d'avoir une bonne hygiène buccale. Les substituts de salive en spray ou en gel peuvent temporairement soulager la bouche sèche. " Par ailleurs, on fabrique des gouttières dentaires pour tous les patients, sur base d'une empreinte de leur dentition, sur laquelle ils doivent appliquer quotidiennement un gel fluoré et à vie, afin de renforcer l'émail des dents. " " Chaque année, nous irradions 200 à 250 patients HNC à l'UZ Leuven. Notre équipe est donc étoffée pour bien gérer toutes les toxicités aiguës, mais aussi pour agir préventivement. Ainsi, nos diététiciens sont impliqués dès le début du trajet de soins, et les patients à risque accru de dysphagie voient un(e) logopède pour apprendre les exercices préventifs.En outre, avant de débuter le traitement, tous nos patients HNC bénéficient d'un examen dentaire complet par notre parodontologue, afin de pouvoir traiter des problèmes éventuels avant la radiothérapie. Il faut éviter les extractions dentaires post-thérapeutiques, en raison du risque d'ostéonécrose. Cela représente parfois une course contre la montre, afin de ne pas retarder le traitement oncologique ; il faut donc une équipe dévouée et une organisation logistique bien rodée. C'est pourquoi nous plaidons depuis longtemps pour une centralisation des soins, tant oncologiques que de soutien, pour cette population de patients. "