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L'épidémie de SARS-CoV-2 a eu et a encore des répercussions énormes sur les soins de santé du pays. Sur le plan clinique, la manifestation d'une infection par le coronavirus peut varier de symptômes grippaux à une pneumopathie sévère accompagnée d'une défaillance organique entraînant le décès. Les premières publications affirmaient que les patients atteints d'un cancer étaient plus sensibles au virus, avec un risque plus élevé de complications graves. Le Pr van Dam se montre critique envers ces données provenant souvent d'études de petite ampleur avec des limitations méthodologiques et statistiques. Il a mené sa propre étude, entre mars et mai, au cours de laquelle des patients atteints d'un cancer et des prestataires de soins anversois ont été soumis à un test de dépistage des anticorps anti-Covid-19, indiquant une infection antérieure. Résultat: les premiers n'étaient pas significativement plus touchés que les autres. Selon le Pr van Dam, ces résultats peuvent en partie s'expliquer par le meilleur respect par ces patients des règles de distanciation sociale et d'hygiène, par crainte des infections. Selon le spécialiste, il ne faut pas mettre tous les patients atteints d'un cancer dans le même panier. Ceux atteints de tumeurs localement avancées, de tumeurs solides métastasées et de tumeurs hématologiques sont de pronostic plus défavorable après une infection par le coronavirus, leur système immunitaire étant déjà fortement perturbé. Cependant, il convient de ne pas généraliser à tous les patients atteints d'un cancer, comme l'a confirmé l'étude openSAFELY. Lors de cette étude, les décès liés à la Covid-19 dans les hôpitaux britanniques ont été analysés sur base des dossiers électroniques des patients du NHS. Il est ressorti de cette analyse que le sexe masculin, l'âge, l'ethnie, le diabète non maîtrisé et l'obésité pesaient plus lourd dans le risque de décès après une infection par le SARS-CoV-2 que le fait d'être atteint d'un cancer. Dans la pratique clinique, cela implique, pour chaque patient infecté par le coronavirus nécessitant des soins intensifs, de soupeser les différents facteurs de risque afin de réaliser une analyse risque/bénéfice, en particulier lorsque les moyens sont limités. Les patients atteints d'un cancer méritent aussi une place en soins intensifs quand nécessaire, car leur pronostic à long terme est excellent, selon le Pr van Dam. Il précise que dans son hôpital, les soins oncologiques ont été adaptés depuis le début de la vague de Covid-19. Tant qu'aucun vaccin ou traitement adéquat contre le virus n'est disponible, la prise en charge repose sur la réduction maximale du risque de contamination chez les patients atteints d'un cancer, notamment grâce à la distanciation sociale et les mesures de protection. Chez les patients sous traitement, celui-ci est poursuivi, dans la mesure du possible, en limitant strictement le nombre de visites à l'hôpital et en maximisant les soins à domicile. Pour ce faire, l'application Corona REmeCare Oncology est utilisée. Cette application était déjà utilisée avant la crise du coronavirus dans le cadre du suivi à domicile des effets indésirables et des prises de sang. Elle est désormais également employée comme outil de pré-dépistage d'une éventuelle infection par le coronavirus. Des symptômes tels que la fièvre, la toux et la douleur sont enregistrés à tout moment et envoyés à une plateforme en ligne liée au dossier électronique du patient. Si la température du patient dépasse 38,0 °C ou si au moins un symptôme laissant suspecter la Covid-19 est rapporté, le patient est invité à se présenter à l'hôpital pour passer un test de dépistage du coronavirus. L'application ne différencie pas les symptômes possibles de la Covid-19 et les effets indésirables tels que la fièvre neutropénique et les infections bactériennes. Dans une publication récente, le Pr van Dam a rapporté les données de 164 patients sous traitement systémique contre le cancer. L'application a généré une alarme de Covid-19 chez 5 patients: 3 ont été formellement diagnostiqués comme atteints du Covid-19, 1 était atteint d'une laryngite, selon son médecin généraliste, et 1 a été testé négatif. Des résultats prometteurs, qui font dire au Pr van Dam que la surveillance à domicile peut être utilisée de manière judicieuse en ces temps de coronavirus afin d'avertir les patients atteints d'un cancer de consulter à temps un médecin en cas de symptômes alarmants. Le Pr van Dam déplore que le dépistage du cancer soit tombé au point mort pendant la 1re vague de Covid-19 et craint des " dommages collatéraux " à long terme. Divers spécialistes avaient déjà tiré la sonnette d'alarme à ce moment-là, mais la seule priorité de nos autorités était de contenir la pandémie de coronavirus, souligne le Pr van Dam. Heureusement, la tendance s'est inversée: la population est désormais sensibilisée et les médias s'intéressent davantage à l'importance du dépistage et de la poursuite des traitements contre le cancer. Le Pr van Dam espère que cette importance continuera d'être reconnue pendant la 2e vague. Référencesvan Dam PA et al. SARS-CoV-2 and cancer: Are they really partners in crime? Cancer Treatment Reviews 2020 ; 89: e102068. van Dam PA et al. High mortality of cancer patients in times of SARS-CoV-2: Do not generalize! Eur J Cancer 2020 ; 138: 225-27. Peeters M et al. Prescreening for COVID-19 in patients receiving cancer treatment using a patient-reported outcome platform. https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC7307523/2020 ; 5(3): e000817.