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Une première étude sélectionnée par le Pr Piet Ost portait sur la stadification par TEP/TDM au PSMA dans les soins primaires, à l'aide du 18F-DCFPyL (PyL), un nouveau radiotraceur de TEP ciblant le PSMA. La performance diagnostique de la TEP/TDM au PyL a été évaluée dans l'étude Osprey, une étude de phase II/III menée auprès de 252 patients présentant un risque élevé de cancer de la prostate chez lesquels une prostatectomie radicale avec lymphadénectomie était planifiée (cohorte A). L'objectif principal de l'étude consistait à évaluer la sensibilité et la spécificité de la TEP/TDM au PyL pour la détection du cancer de la prostate métastatique dans les ganglions lymphatiques du bassin, en comparaison avec l'histopathologie des patients pour la prostatectomie. Trois médecins nucléaires centraux indépendants ont évalué les scanners au PyL. Le Pr Ost a fait savoir que les résultats tant en matière de sensibilité que de spécificité concordaient bien entre les différents lecteurs : la variation inter-opérateurs était donc relativement faible. Un avantage majeur du scanner au PyL est sa spécificité élevée. De fait, lorsqu'il identifie un ganglion positif dans le bassin, ce dernier est dans la plupart des cas réellement positif. En revanche, la sensibilité s'est avérée décevante (environ 40 %) pour les ganglions positifs de moins de 5 mm, dont une partie importante n'est pas détectée. Lorsque la valeur limite de la dimension des ganglions est définie à 5 mm, la sensibilité est légèrement meilleure. Selon le Pr Ost, cette TEP/TDM au PSMA présente indéniablement une utilité en tant qu'outil de stadification. Au début de l'étude, plus de 96 % de l'ensemble des patients ne présentaient aucune maladie nodale ou métastatique sur base de l'examen d'imagerie standard. Avec la TEP/TDM au PyL, une maladie de stade N1/M1 a été identifiée chez 27 % des patients, plus spécifiquement une maladie de stade N1M0 chez 14,6 % des patients et une maladie de stade NxM1 chez 12,3 % des patients. Ces résultats ont du reste également été confirmés lors de la lymphadénectomie. Au vu de ces résultats, devrions-nous toujours avoir recours à la TEP/TDM pour la stadification ? Il n'est probablement pas possible de répondre totalement à cette question sur base d'une seule étude de ce type. Toutefois, le Pr Ost a fait savoir que lors de la même session de l'ASCO GU, le Dr Calais a présenté des données, non encore publiées, d'une étude personnelle basée sur une méthodologie similaire, qui a livré des résultats comparables à ceux de l'étude Osprey. En d'autres termes, nous disposons donc aujourd'hui de deux études affichant des résultats comparables, qui ont évalué de manière prospective la spécificité et la sensibilité de la TEP/TDM au PSMA pour les ganglions du bassin et dont les données peuvent donc être considérées comme robustes. Toutefois, on ne sait pas aujourd'hui avec certitude si une TEP/TDM au PSMA doit être pratiquée chez chaque patient, ni ce que nous devons faire de ces résultats. En effet, même si le scanner est négatif, il reste malgré tout une chance élevée que les ganglions soient positifs. D'autre part, on remarque qu'une lymphadénectomie est actuellement pratiquée chez une large proportion de patients chez qui elle ne s'avère pas nécessaire, et ce au prix d'une morbidité élevée. Certains experts préconisent de réaliser malgré tout une TEP/TDM au PSMA et de ne traiter que la prostate lorsque le résultat du scanner est négatif. En cas de récidive, il est toujours possible de pratiquer une TEP/TDM au PSMA et, dans un deuxième temps, une lymphadénectomie ou une radiothérapie au niveau des ganglions. Le Pr Ost conclut qu'en tant qu'outil de stadification, la TEP/TDM au PSMA avec PyL peut opérer une première sélection pour réduire le nombre de lymphadénectomies, en tenant compte du fait qu'il existe une population qui fait l'objet d'une sous-stadification, mais il faut évaluer à cet égard les bénéfices et risques cliniques. L'étude STOMP de phase II incluait des patients asymptomatiques atteints d'un cancer de la prostate présentant une récidive biochimique plus de six mois après un traitement primaire curatif. Ces patients présentaient plus spécifiquement au maximum trois lésions N1/M1 à la TEP/TDM à la choline ainsi qu'un taux sérique de testostérone supérieur à 50 ng/dl. Ces patients (N = 62) ont été randomisés soit pour faire l'objet d'une observation, soit pour recevoir un traitement ciblant les métastases (MDT) de toutes les lésions détectées. Après cinq ans, la survie sans ADT était de 8 % dans le groupe sous observation, contre 34 % dans le groupe sous MDT (HR 0,57 ; log-rank p = 0,06). Par ailleurs, les investigateurs ont tenté d'explorer également tous les critères d'évaluation " durs ", tels que la survie sans cancer de la prostate résistant à la castration. À cet égard, l'analyse selon le protocole pourrait avoir relevé un bénéfice de l'intervention, mais ce bénéfice n'a pas encore été observé dans la population en intention de traiter. Un suivi de plus longue durée est nécessaire pour confirmer une différence éventuelle au niveau des critères d'évaluation durs. Les résultats montrent également que la mortalité par cancer de la prostate est relativement faible chez les patients atteints d'un cancer oligométastatique, ce qui indique que nous ne devons pas toujours traiter immédiatement ces patients par une thérapie systémique. Le Pr Ost souhaite insister sur le fait que la méthodologie de l'étude STOMP est celle d'une étude de phase II, et qu'il n'est donc pas question de modifier la pratique clinique sur base de ces résultats. Une analyse approfondie de cette étude STOMP, réalisée par le Pr Ost, est présentée séparément dans la présente édition du BOhN. Le Pr Ost a sélectionné deux études examinant l'impact du traitement sur la qualité de vie. Compte tenu du nombre croissant de traitements disponibles, cette qualité de vie devient un paramètre important pour le patient et pour le médecin lors du choix entre les traitements. L'étude STAMPEDE a déjà démontré que tant le docétaxel que l'abiratérone améliorent la survie globale chez les hommes présentant un cancer de la prostate hormonosensible localement avancé ou métastatique. Cette étude a aussi analysé les scores liés à la qualité de vie (QoL) chez des patients randomisés pour recevoir le docétaxel ou l'abiratérone en plus d'un traitement par privation androgénique (ADT). Il a été demandé aux patients de remplir des questionnaires d'auto-évaluation portant sur leur qualité de vie (EORTC QLQ C30 et PR25) à la fois durant le traitement et durant la période de suivi. Les analyses abordées lors de l'ASCO GU concernaient les données de QoL des deux premières années suivant la randomisation. Une différence de score de 4 points ou plus a été prédéfinie comme cliniquement significative. Les réponses de 173 hommes du groupe docétaxel et de 342 hommes du groupe abiratérone présentant des scores de QoL globaux comparables lors de la randomisation ont été analysées. Le score global moyen de QoL après deux ans était plus élevé chez les patients traités par abiratérone. Malgré une différence statistiquement significative, elle n'a pas satisfait au paramètre prédéfini de signification clinique (+3,9, IC à 95 % 0,6 à 7,1, p = 0,021). La plus grande différence entre les deux groupes a été observée au cours de la première année du traitement. Chez les patients du groupe docétaxel, une baisse de QoL a déjà été rapportée à partir de douze semaines. Les symptômes tels que fatigue et douleur étaient aussi plus sévères dans le groupe docétaxel que dans le groupe abiratérone. La récupération a semblé relativement longue, et même après deux ans, la QoL est restée moins bonne dans le groupe docétaxel que dans le groupe abiratérone. Le Pr Ost souligne que ces données doivent être discutées avec le patient lors du passage en revue des options de traitement disponibles. Il faut donc indiquer au patient que la QoL diminue plus rapidement avec le docétaxel. Le patient doit être conscient que la plupart des patients deviennent réfractaires à l'abiratérone, et qu'il finira donc par recevoir le docétaxel également. Cela signifie qu'il choisira soit un traitement qui aura un impact majeur sur sa QoL dans un premier temps, soit un traitement qui aura un tel impact au cours d'un phase plus tardive de sa maladie. L'étude CARD a examiné, chez les patients présentant un cancer de la prostate métastatique hormonorésistant ayant déjà reçu de l'abiratérone (ou de l'enzalutamide) et du docétaxel, quel était le traitement le plus optimal à administrer en 3e ligne : le cabazitaxel ou un autre anti-androgène (abiratérone ou enzalutamide). L'étude CARD a montré à la fois une survie sans progression radiologique (rPFS) et une survie globale (OS) supérieures pour le cabazitaxel en comparaison avec le traitement par privation androgénique (abiratérone ou enzalutamide) ( N Engl J Med, 2019). Une présentation lors de l'ASCO GU a abordé les modifications en termes de douleur et de QoL. Une réponse à la douleur a été définie comme une diminution d'au moins 30 %, par rapport à la référence, du score BPI-SF d'intensité de la douleur sans augmentation de l'utilisation d'analgésiques. La QoL a été évaluée au moyen du questionnaire FACT-P ( Functional Assessment of Cancer Therapy-Prostate). Une amélioration ou aggravation cliniquement significative du score FACT-P total a été définie comme une différence de ± 10 points par rapport à la valeur à la référence. Les modifications cliniquement significatives en termes de QoL et de réponse à la douleur ont été confirmées par le biais de deux évaluations consécutives, avec une période intermédiaire d'au moins trois semaines durant la période de traitement. Sur les 255 patients randomisés, 172 (67,5 %) présentaient une douleur modérée à sévère lors de la randomisation. Le cabazitaxel a été associé à une réponse plus marquée à la douleur, par rapport au traitement par privation androgénique (abiratérone ou enzalutamide) (45,9 % vs 19,3 % ; p < 0,0001). Par ailleurs, une progression plus lente de la douleur a été observée après 12 mois avec le cabazitaxel (66,2 % vs 45,3 % ; HR 0,55 ; IC à 95% 0,32- 0,97 ; p = 0,0348). De même, il y avait moins de complications osseuses symptomatiques avec le cabazitaxel. Le cabazitaxel et les anti-androgènes avaient un effet comparable sur la QoL, mais le délai avant sa diminution était plus long avec le cabazitaxel qu'avec le traitement par privation androgénique (14,8 vs 8,9 mois ; HR 0,72 ; IC à 95 % 0,44 -1,20 ; p = 0,2072). Au vu de ces résultats, notamment, le Pr Ost a conclu qu'il n'est désormais plus conseillé dans la pratique d'administrer l'abiratérone ou l'enzalutamide à la suite l'un de l'autre, car ces données montrent clairement que dans le traitement de 3e ligne du cancer de la prostate métastatique hormonorésistant, le cabazitaxel contribue lui aussi à améliorer la qualité de vie, en plus d'améliorer la rPFS et l'OS. L'hypofractionnement, c'est-à-dire l'utilisation d'une plus forte dose de rayonnement par séance de radiothérapie afin de réduire le nombre de doses, est devenu le traitement standard dans la pratique actuelle. Les résultats à cinq ans de l'étude CHHiP, l'une des premières et des plus grandes études ayant évalué l'hypofractionnement en comparaison avec la radiothérapie conventionnelle, ont déjà montré que l'hypofractionnement de 60 Gy/20 fractions n'était pas inférieur à 74 Gy/37 fractions ( Lancet Oncology, 2016). Les résultats à huit ans de cette étude, présentés lors du congrès de l'ASCO GU, vont dans le même sens. Ainsi, raccourcir la radiothérapie à 60 Gy/20 fractions apparaît aussi efficace qu'une radiothérapie à 74 Gy/37 fractions. La survie sans métastases était de 95 % dans les deux groupes. La toxicité de grade III et plus au niveau de la vessie et de l'intestin, évaluée par les médecins, était de l'ordre de 2 %. Les évaluations réalisées par le patient (problème vésical ou intestinal modéré ou important) ont donné des résultats légèrement plus élevés (5-10 %), mais sont plus réalistes selon le Pr Ost. Ce dernier a souligné que cela signifie que 90 % des patients se portent encore bien au bout de huit ans, sans présenter de symptômes vésicaux et intestinaux majeurs. La toxicité à plus long terme des fractions plus courtes n'est pas connue.