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Le Dr Shankar Siva, radiothérapeute au Peter MacCallum Cancer Centre (Melbourne, Australie), a débuté sa présentation en passant en revue les recommandations de l'EAU et du NCCN pour le traitement du cancer rénal avec oligométastases. Les recommandations actuelles reposent sur des données rétrospectives datant de l'ère des inhibiteurs de tyrosine kinase (ITK) ou d'avant. Bien que les données montrent de bons résultats après un traitement ciblant les métastases (MDT), un biais de sélection est toutefois présent, les patients sélectionnés étant uniquement ceux qui pourraient bien répondre au traitement, comme l'a expliqué le Dr Siva. La MDT a-t-elle encore un rôle à jouer à l'ère de l'immunothérapie? Une analyse rétrospective du registre TOASST a déjà révélé que l'association composée de la radiothérapie stéréotaxique (SBRT) et de l'immunothérapie est sûre et efficace chez les patients présentant un cancer du rein et des oligométastases (1).L'étude RAPPORT de phase I/II a examiné l'association de SBRT avec une brève cure de pembrolizumab dans les carcinomes rénaux au stade oligométastatique (2). Le suivi médian était de 2,3 ans. La survie médiane sans progression (PFS) était de 15,6 mois, tandis que la survie médiane totale et la durée de réponse médiane n'ont pas été atteintes. Le taux de réponse objective (ORR) était de 63%. Après 2 ans, 92% des patients ne présentaient toujours aucune progression locale. De plus, le traitement a été bien toléré. Les PFS et ORR observés sont favorables par rapport aux résultats de l'étude historique KEYNOTE-427 évaluant le pembrolizumab en monothérapie (PFS de 7,1 mois et ORR de 34%). Selon le Dr Siva, ces résultats encourageants justifient la poursuite des études dans ce domaine. Enfin, le Dr Siva s'est penché sur la stratégie thérapeutique qui consiste à tenter d'obtenir un effet abscopal en n'irradiant pas toutes les lésions métastatiques ; toutefois, aucune donnée probante n'est encore disponible pour cette stratégie dans l'indication des oligométastases. Selon lui, il est important d'irradier toutes les lésions afin d'assurer un contrôle local ; par ailleurs, la stratégie de l'effet abscopal peut être appliquée en cas de polymétastases. - Radio-chimiothérapie et radio-immunothérapieLe Dr Nora Sundahl (radiothérapie, UZ Gent) a plaidé en faveur de la radio-chimiothérapie dans le cancer de la vessie infiltrant le muscle. Les recommandations de l'EAU et du NCCN préconisent ce traitement en tant qu'option à envisager, en plus de la cystectomie radicale (CR), chez les patients éligibles aux deux traitements. Une méta-analyse des études BC2001 et BCON a été publiée récemment par le Pr Choudhury (3). Un schéma d'hypofractionnement de 55 Gy en 20 fractions s'est avéré non inférieur en termes de toxicité à un schéma de 64 Gy en 32 fractions, et s'est même révélé supérieur sur le plan du contrôle de l'envahissement locorégional. Comme il est possible d'administrer 55 Gy en 20 fractions dans un délai de 4 semaines, le Dr Sundahl explique que ce schéma doit être considéré comme standard chez les patients avec un cancer de la vessie localement avancé qui souhaitent conserver l'organe. Chez les patients atteints d'un cancer de la vessie infiltrant le muscle, la survie spécifique du cancer cinq ans après la CR ou la radio-chimiothérapie est limitée ; par conséquent, la combinaison associant radio-chimiothérapie et immunothérapie a été examinée. L'administration concomitante d'une radio-chimio-immunothérapie s'avérant trop toxique, d'autres stratégies feront l'objet d'études dans un avenir proche (4).- Immunothérapie néoadjuvanteLa prise en charge actuelle des patients souffrant d'un cancer de la vessie non métastatique infiltrant le muscle est la chimiothérapie néo-adjuvante par cisplatine, suivie d'une cystectomie et d'une lymphadénectomie, a expliqué le Dr Nieves Martinez Chanza (oncologie, Institut Jules Bordet - Hôpital Erasme, Bruxelles). Malheureusement, en dépit de la thérapie néoadjuvante, 40 à 60% de ces patients présentent une maladie résiduelle, associée à un risque plus élevé de récidive ainsi qu'à une survie médiocre. En outre, la moitié des patients ne tolèrent pas la chimiothérapie néoadjuvante par cisplatine. Malheureusement, aucune alternative n'est disponible à ce jour ni de biomarqueurs validés permettant de prédire quels patients peuvent tirer un bénéfice du traitement néoadjuvant. Les études menées avec des inhibiteurs des points de contrôle dans l'indication néoadjuvante montrent des résultats prometteurs, mais il est difficile de comparer les données entre elles et beaucoup de questions restent sans réponse. L'immunothérapie néoadjuvante peut offrir une alternative chez les patients qui ne tolèrent pas la chimiothérapie à base de cisplatine, mais elle n'est pas encore utilisée comme approche standard à ce jour. En conclusion, le Dr Martinez Chanza a souligné la nécessité d'une collaboration interdisciplinaire afin d'améliorer les résultats cliniques des patients. La participation à des études cliniques prospectives s'impose. L'étude AURA (NCT 03674424), qui évalue l'avélumab en tant que traitement néoadjuvant, est actuellement en cours en Belgique. - Rôle de la cystectomie radicale en 2021Le Pr Jim Catto (chirurgie urologique, Sheffield, Royaume-Uni) a défendu le rôle de la CR sur base d'une série d'hypothèses mises à l'épreuve de la réalité. La réponse à un traitement néoadjuvant doit pouvoir être définie avec une précision suffisante pour stratifier le traitement consécutif, ce qui n'est malheureusement pas le cas dans la pratique. Dans la CR, on observe en effet une différence entre la stadification clinique et la pathologie finale observée. Ainsi, l'étude FoxChaseCC récemment publiée montre que chez 1 patient sur 4 de stade cT0 au moment de la CR, du tissu tumoral résiduel infiltrant le muscle est encore présent. La valeur prédictive négative de l'endoscopie pour le cancer de la vessie de stade pT0 n'était que de 48,4% (IC: 30,2-66,9%), soit un pourcentage plus faible que l'hypothèse spécifiée au préalable, ce qui a conduit à l'arrêt de l'étude (5). Ces données prospectives confirment les limites de cette évaluation dans ces cas. Les travaux futurs doivent se concentrer sur de nouveaux biomarqueurs et des marqueurs d'imagerie, en vue d'optimiser les évaluations pré-CR pour améliorer la prise de décisions liées à la préservation vésicale. L'hypothèse suivante, réfutée par le Pr Catto en raison du manque d'études comparatives directes, est que radiothérapie et chirurgie présentent une efficacité identique. L'étude de faisabilité randomisée SPARE, qui comparait la préservation vésicale à la CR, n'a pas réussi à randomiser un nombre suffisant de patients (6). Aucune différence significative n'a été observée en termes de complications entre CR de sauvetage et CR immédiate ; quant à savoir si elles sont aussi efficaces, la question n'a pas encore été tranchée. Enfin, le Pr Catto a indiqué que jusqu'ici, il a été supposé que la qualité de vie des patients (QoL) pouvant conserver leur vessie était meilleure que celle des patients ayant subi une CR. Or, des études récentes ont permis de réfuter cette hypothèse (Eur Urol 2021). En effet, l'âge et les comorbidités semblent influencer de façon plus déterminante la QoL que le traitement même. Le Dr Marco Gizzi (oncologie médicale, Grand Hôpital de Charleroi et UCL, Bruxelles) a passé en revue les nouveaux traitements disponibles pour les patients atteints d'un cancer de la vessie métastatique. Grâce aux bons résultats de survie de l'étude JAVELIN Bladder 100 de phase III, un traitement d'entretien par avélumab associé aux meilleurs soins constitue désormais le traitement de référence, remboursé en Belgique depuis février 2021. Grâce aux conjugués anticorps-médicament (ADC), la chimiothérapie peut être délivrée spécifiquement à la cellule cancéreuse, réduisant les effets indésirables. Différents types d'ADC sont actuellement en cours d'étude.L'étude EV301 de phase III a comparé l'enfortumab vedotin (EV) à la chimiothérapie chez des patients avec un cancer de la vessie métastatique ou localement avancé préalablement traité (7). Un bénéfice en termes de survie globale (OS) a été constaté pour l'EV vs chimiothérapie. Les effets indésirables liés au traitement et spécifiques à l'EV (neuropathie, réactions cutanées et hyperglycémie) ont été gérables et d'intensité légère à modérée. Par ailleurs, la cohorte 2 de l'étude EV-201 a montré un bénéfice en termes d'OS avec l'EV chez les patients ayant reçu un anti-PD-1/PD-L1 (8). D'autres ADC (sacituzumab govitécan et disitamab vedotin) font actuellement l'objet d'études de phase II-III. Plusieurs études évaluent actuellement des thérapies ciblées, en association ou non avec l'immunothérapie. L'erdafitinib est le premier inhibiteur des récepteurs du facteur de croissance des fibroblastes (FGFR) approuvé pour l'utilisation chez des patients présentant un cancer vésical avancé et des anomalies génétiques au niveau du gène FGFR2/3 (9). L'étude THOR de phase III comparera l'efficacité de l'erdafitinib à celle de la chimiothérapie ou de l'immunothérapie chez des patients présentant un cancer vésical de stade avancé avec certaines anomalies génétiques liées au récepteur du facteur de croissance des fibroblastes (FGFR), ayant progressé durant ou après un traitement antérieur. Plusieurs études en cours se penchent sur l'angiogenèse et l'inhibition de la PARP ; combinées avec la médecine de précision. Espérons que ces études permettront d'élargir les options thérapeutiques pour les patients atteints d'un cancer métastatique de la vessie, a conclu le Pr Gizzi. Le Dr Robert Huddart (oncologie médicale, Royal Marsden, Royaume-Uni) a abordé l'importance du suivi chez les hommes atteints d'un cancer des testicules, non seulement afin d'identifier en temps opportun une récidive éventuelle, mais aussi afin de rassurer le patient. Dans l'étude TRISST ( Trial of Imaging and Surveillance in Seminoma Testis), le Dr Huddart a examiné si le nombre de TDM (CT scans) peut être réduit ou si elles peuvent être remplacées en toute sécurité par des IRM sans augmentation inacceptable du nombre de récidives chez les hommes ayant subi une orchidectomie pour une tumeur séminomateuse de stade I, chez lesquels aucun traitement adjuvant n'était planifié (10). 669 patients ont été randomisés pour faire l'objet d'un suivi par TDM ou IRM, puis pour passer 7 ou 3 examens d'imagerie (respectivement jusqu'à 5 ou 3 ans après la randomisation). L'incidence des récidives s'est révélée très faible (12%), indépendamment de la modalité d'imagerie et de la fréquence des examens ; elles ont pu être traitées avec succès. Les résultats à long terme sont excellents et confirment que l'IRM n'est pas inférieure à la TDM. Dès lors, puisqu'elle expose moins les patients aux rayonnements, l'IRM doit être recommandée, a conclu le Dr Huddart. Par ailleurs, un schéma de suivi de 3 examens s'est avéré non inférieur au schéma de 7 examens. En outre, les récidives après 3 ans ont été rares. Ces résultats prometteurs doivent à présent être intégrés dans les nouvelles recommandations.