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La croissance d'une tumeur cancéreuse au-delà de quelques millimètres cubes serait impossible si des vaisseaux sanguins nouvellement formés ne lui apportaient l'oxygène et les éléments nutritifs nécessaires à son développement. La formation de ces néovaisseaux est au coeur du phénomène d'angiogenèse tumorale. Normalisation vasculaire Les vaisseaux nouvellement formés au sein des tumeurs sont tortueux, moins fonctionnels, en un mot, anormaux. C'est ici que la situation se révèle paradoxale. Alors que le but final de la thérapie anti-angiogénique est de priver la tumeur d'oxygène, on observe que celle-ci est réoxygénée de façon temporaire dans les phases précoces du traitement. On parle de " normalisation de la vascularisation tumorale " ou, plus succinctement, de " normalisation vasculaire ". Cartographier l'oxygénation Par essence, les tumeurs cancéreuses sont hétérogènes, même s'il existe de rares cas, dans les modèles animaux, où elles sont globalement bien oxygénées ou, au contraire, extrêmement hypoxiques et, partant, très radiorésistantes. Dans la grande majorité des tumeurs en développement (surtout chez l'être humain), des zones d'hypoxie cohabitent avec des zones où l'oxygénation est relativement normale. Dès lors, si l'on ambitionne d'augmenter la réponse à la radiothérapie en incluant le concept d'oxygénation tumorale dans les protocoles thérapeutiques, encore faut-il être capable de dresser une cartographie de celle-ci. La composante lipidique La technique élaborée à l'UCL repose sur l'imagerie par résonance magnétique (IRM). Pour établir le contraste au sein des images, et donc permettre la discrimination entre certains tissus, cette technologie fait appel à un paramètre clé : les temps de relaxation, qui traduisent le temps nécessaire aux spins - mesure quantique de la vitesse avec laquelle une particule tourne sur elle-même - des atomes d'hydrogène préalablement excités par l'onde de radiofréquence pour recouvrer leur état d'équilibre initial. Implémentation clinique ? Au départ, la pertinence de la méthode MOBILE a été démontrée in vitro dans des homogénats tissulaires plus ou moins oxygénés. Ensuite, in vivo chez l'animal, à travers des tumeurs expérimentales dont les chercheurs faisaient varier le taux d'oxygénation. Le but était de déterminer s'il y avait une corrélation significative entre la quantification de l'oxygénation tumorale par des méthodes invasives et les résultats obtenus en IRM. Ce fut le cas. " Avec une équipe de la KULeuven, nous avons confirmé, chez l'animal, le bien-fondé de la méthode dans le cadre d'accidents vasculaires cérébraux et, avec le groupe Nutrition et Métabolisme de l'UCL, dans le cadre d'ischémies périphériques inhérentes à certains modèles de diabètes ", rapporte Bernard Gallez. Fenêtres temporelles Identifier les régions hypoxiques de la tumeur dont souffre un patient ouvrirait probablement la voie à une prise en charge individualisée et, de ce fait, plus performante. Ainsi, lors d'une radiothérapie, une option serait de procéder à une escalade des doses de rayonnement dans les zones hypoxiques de la tumeur. Les techniques modernes de radiothérapie, telle l'Intensity Modulated Radiation Therapy (IMRT), permettent cette modulation d'intensité de l'irradiation en misant sur la technique des " feux croisés " et en épargnant de la sorte, autant que faire se peut, les tissus sains avoisinants. Références: 1. Jordan BF, Magat J, Colliez F, Ozel E, Fruytier AC, Marchand V, Mignion L, Bouzin C, Cani PD, Vandeputte C, Feron O, Delzenne N, Himmelreich U, Denolin V, Duprez T, Gallez B. Mapping of oxygen by imaging lipids relaxation enhancement : A potential sensitive endogenous MRI contrast to map variations in tissue oxygenation. Magn Reson Med. 2012 in press (online) Sep 28. doi : 10.1002/mrm. 24511