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Les hémopathies malignes, essentiellement constituées de leucémies et de lymphomes, représentent plus d'un diagnostic de cancer sur dix. "Ce taux de 11% des cancers englobe toutes les formes d'hémopathies malignes ; or, la plupart sont des cancers rares. On peut les regrouper en trois grands groupes : les néoplasies lymphoïdes matures (pour 63%), les néoplasies myéloïdes chroniques (27%) et les néoplasies des précurseurs (10%)", précise le Dr Hélène Antoine-Poirel, médecin-expert et Manager en Hématologie au Registre du Cancer.Une évolution qui se confirmeLe Dr Antoine-Poirel s'est intéressée à l'évolution des hémopathies malignes (HM) en Belgique à la suite de la première étude sur ce sujet, qui datait de 2015 et qui montrait déjà une augmentation impressionnante de la survie des patients : "Alors qu'entre 2000 et 2003, 48% des patients survivaient à un sous-type de néoplasie myéloïde chronique appelé leucémie myéloïde chronique, ils étaient 80% entre 2008 et 2012. Cette amélioration impressionnante en Flandre était à attribuer aux traitements ciblés ; les leucémies myéloïdes chroniques ont en effet pu bénéficier des inhibiteurs de kinase (dont le chef de file est l'imatinib) au début des années 2000. Nous avons donc voulu affiner ces résultats et savoir si cette évolution persistait sur l'ensemble de la Belgique."Il faut préciser que la classification des différentes pathologies est évolutive (la dernière a été publiée par l'OMS en 2017) : au lieu de se baser uniquement sur la morphologie et l'immunophénotype des tumeurs, les classifications tiennent de plus en plus compte des caractéristiques génétiques. "En comparant les taux de survie à 5 ans des hémopathies malignes reprises désormais comme HM, on constate tout de même une augmentation de 5%, passant de 64% entre 2004 et 2008 à 69% entre 2014 et 2018. Ce résultat reste supérieur à la moyenne d'amélioration de la survie tous cancers confondus, qui est de 3% en Belgique."Avec de grandes différences selon les types de HM : "Les leucémies aiguës/lymphomes lymphoblastiques enregistrent une amélioration de 14% du taux de survie à 5 ans, passant de 40 à 54%. On peut associer cette belle progression aux progrès thérapeutiques et en particulier aux inhibiteurs de la tyrosine kinase administrés plus récemment dans certaines leucémies aiguës lymphoblastiques ayant un remaniement moléculaire conduisant à une activation kinase constitutive."Le Registre Belge du Cancer a aussi, pour la première fois, publié les données de survie à 10 ans pour les différentes catégories de sous-types d'HM et d'âge. Il en ressort notamment que les patients de moins de 50 ans bénéficient du meilleur taux de survie, à 86%, contre moins de 50% chez les plus âgés, souligne le Dr Antoine-Poirel.Une incidence en augmentation ?L'étude met en lumière une augmentation de 16% de l'incidence des nouveaux diagnostics entre 2004 et 2018, soit une augmentation de 1,2% par an. Mais peut-on se fier à ces données, vu les changements de classification ? "C'est difficile à dire. D'autant que d'autres facteurs ont joué dans l'augmentation des diagnostics, en plus du le vieillissement de la population ou son accroissement (qui sont pris en compte dans les taux standardisés sur l'âge). L'augmentation touche surtout certaines hémopathies myéloïdes chroniques, les néoplasmes myéloprolifératifs, dont l'identification a été grandement facilitée grâce à la découverte de nouveaux marqueurs moléculaires (comme JAK2 ou CALR...). Le diagnostic est ainsi plus aisé, plus précoce et plus systématique, notamment chez les personnes âgées, puisqu'une ponction-biopsie médullaire n'est plus indispensable, mais qu'une prise de sang peut suffire." Les auteurs de l'étude ont également voulu savoir ce qu'il fallait attendre pour l'avenir. Ils ont ainsi réalisé une projection des incidences d'ici 2025. "Selon nos calculs statistiques, on pourrait assister, par extrapolation des données d'incidences sur la période 2004-2018, à une augmentation des HM tant chez les hommes (de 35 à 45 cas pour 100.000 hommes) que chez les femmes (de 25 à 31/100.000 femmes). En particulier, à un doublement de l'incidence des hémopathies myéloïdes chroniques entre 2004 et 2025, passant de 6 à 12/100.000 hommes, et de 4 à 9/100.000 femmes", poursuit la chercheuse.Grâce à la médecine de précision, qui permet à la fois de mieux diagnostiquer les hémopathies malignes en particulier, et de les traiter de manière de plus en plus ciblée et efficace, cette augmentation d'incidence pourrait ne pas faire grimper le nombre de décès. "C'est tout l'enjeu des nouvelles générations d'inhibiteurs, mais aussi de leurs combinaisons qui sont aujourd'hui testées...", conclut le Dr Hélène Antoine-Poirel.Référence : 1. Hematological malignancies - Belgium 2004-2018 de la Fondation Registre du Cancer, disponible via kankerregister.org/media/docs/cijfersoverkanker/HaematoPublication_FINAL_09062021.pdf