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Découvert en 2012, issu du décryptage d'un système immunitaire bactérien, élu innovation scientifique de l'année 2015 par le magazine Science, CRISPR-Cas9 est un nouvel outil de génie génétique qui permet de modifier le génome en supprimant ou en ajoutant des gènes, ou encore en les activant, en les réparant ou en les rendant muets. Il s'agit d' "éditer le génome", c'est-à-dire modifier de façon contrôlée la séquence du génome en des sites précis. Facile à mettre en oeuvre, peu onéreuse, précise et rapide, cette technique révolutionnaire suscite de grands espoirs au sein de la communauté scientifique internationale.Financé à hauteur de 250 millions de dollars par l'Institut Parker d'immunothérapie du cancer, un organisme fondé en avril dernier par le milliardaire et cofondateur de Napster Sean Parker, l'essai, qui doit encore recevoir l'aval de l'Agence américaine des produits alimentaires et pharmaceutiques (FDA), est conçu pour vérifier si CRISPR est sans danger et viable pour les personnes et pour tester son efficacité dans la guérison des cancers.L'expérience proposée par les chercheurs de l'Université de Pennsylvanie pourrait débuter à la fin de l'année. Il est prévu qu'elle dure deux ans. Au total, 18 patients seront recrutés et traités dans des centres de Californie et du Texas. Les scientifiques vont extraire les cellules T (ou lymphocyte T) des patients puis les traiter génétiquement avec CRISPR. Ce sont des globules blancs qui jouent un rôle important dans notre système immunitaire. Ces cellules sont particulièrement efficaces pour lutter contre les cellules cancéreuses chez les personnes atteintes d'un mélanome, d'un myélome, ou d'un sarcome.Au total, trois éditions successives de gènes humains seront réalisées au sein de ces cellules T avant qu'elles ne soient réintégrées chez les volontaires. La première édition permettra d'insérer un gène codant pour une protéine conçue pour détecter les cellules cancéreuses et instruire les cellules T pour qu'elles les ciblent. La deuxième supprimera une protéine naturelle des cellules T qui pourrait interférer avec ce processus. La troisième consistera à enlever le gène codant pour une protéine qui identifie les cellules T comme des cellules immunitaires et à empêcher les cellules cancéreuses de les désactiver.L'objectif de cette intervention est d'améliorer les cellules T afin de leur permettre de mieux cibler et de détruire plus efficacement les cellules tumorales.Même si les scientifiques ont déjà pratiqué d'autres formes de modifications génétiques afin de soigner différentes maladies, le recours à la technologie CRISP constituera un important pas en avant dans l'ingénierie génétique. Prudence néanmoins car, outre les questions éthiques que soulève la modification de l'ADN humain, ce traitement expérimental est loin d'être exempt de risques, en particulier celui d'opérer des coupes dans l'ADN là où il n'y a pas lieu et d'ainsi provoquer des... cancers.(référence : Nature, 22 juin 2016, doi : 10.1038/nature.2016.20137)