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La chirurgie donnerait les meilleurs résultats chez les patients présentant peu de métastases, un nombre limité de facteurs de risque, un maximum de 3 critères de l'IMDC ( International Metastatic Renal Cell Carcinoma Database Consortium) et une espérance de vie d'au moins 12 mois. La néphrectomie cytoréductrice constituait l'approche standard chez les patients souffrant d'un carcinome à cellules rénales métastasé, jusqu'à la publication de l'étude CARMENA, en 2018. Dans cette étude prospective de phase III, ces patients ont été randomisés vers un groupe néphrectomie + sunitinib, ou vers un groupe traité uniquement par sunitinib. L'étude a montré que le traitement par sunitinib seul n'était pas inférieur au traitement par néphrectomie + sunitinib. Ces résultats sonneraient-ils le glas de la néphrectomie cytoréductrice ? L'étude CARMENA n'a montré aucun avantage pour cette intervention, contrairement à plusieurs études rétrospectives qui avaient mis en évidence un bénéfice de 5 à 18 mois. Le Pr Albersen explique cette différence par un certain nombre de restrictions de l'étude CARMENA, notamment la sélection des patients, qui ne correspondaient pas aux patients typiques subissant une néphrectomie cytoréductrice en pratique clinique. Contrairement à l'échantillon de l'étude de la National Cancer Database (NCDB), celui de l'étude CARMENA incluait des patients présentant une charge métastatique importante et une tumeur locale moins agressive ou moins étendue (l'inverse de la NCDB). Or, les études de l'IMDC nous ont déjà appris que cette catégorie de patients profitaient peu d'une cytoréduction. Les conclusions de l'étude CARMENA ne sont donc pas surprenantes. Une analyse de sous-groupes a montré que les patients ayant encore subi une néphrectomie cytoréductrice retardée après le sunitinib obtenaient bien un avantage en termes de survie. Ce point a été examiné plus en détail dans l'étude SURTIME, qui a pu démontrer qu'une néphrectomie cytoréductrice retardée n'avait aucun impact sur la survie sans progression (PFS) après 28 semaines, mais qu'elle était bel et bien associée à un avantage en termes de survie. En outre, il a également été démontré que les patients dont l'état s'était détérioré durant le traitement systémique ne tiraient plus aucun bénéfice de la néphrectomie cytoréductrice. Cette étude présente toutefois le défaut de n'avoir inclus que 99 patients, soit beaucoup moins que l'objectif initial, ce qui explique l'impossibilité de parvenir à des conclusions définitives. Une analyse combinée de l'étude CARMENA et de l'étude SURTIME a montré que les patients souffrant d'un carcinome à cellules rénales métastasé, à risque intermédiaire, tiraient des bénéfices d'un traitement systémique initial suivi d'une néphrectomie cytoréductrice retardée. Ce constat a également été confirmé dans une analyse rétrospective de la base de données IMDC " real life ". Les études européennes ont montré que cette intervention était sûre, avec seulement 6 % de complications de haut grade, notamment déterminées par le nombre d'interventions et les pertes de sang peropératoires. Le Pr Albersen indique que les données de CARMENA ont modifié la pratique et que les patients présentant un risque intermédiaire (2 critères IMDC) ou élevé doivent recevoir une thérapie systémique immédiate. En outre, un premier traitement par thérapie systémique peut constituer un moyen d'identifier les patients présentant une tumeur agressive et prédisposés à mal évoluer. Néanmoins, la néphrectomie cytoréductrice garde une place, notamment chez les patients symptomatiques, ceux à risque faible/intermédiaire IMDC 0-1, chez les patients oligométastatiques et chez ceux dont toutes les tumeurs peuvent être réséquées, avec une morbidité limitée. Selon le Pr Albersen, ces patients peuvent être mieux sélectionnés via les données du TracerX, qui permet de faire la distinction entre une progression métastatique rapide et plus lente, via le profilage moléculaire. En outre, l'étude Nordic Sun devra montrer si les recommandations susmentionnées au sujet de la place de la néphrectomie cytoréductrice sont également d'application chez les patients souffrant d'un carcinome à cellules rénales métastasé après une immunothérapie initiale, qui constitue pour le moment le pilier thérapeutique standard, à la place du sunitinib.