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Depuis plusieurs années, l'immunothérapie, ce nouveau traitement révolutionnaire anti-cancer, suscite de nombreux espoirs chez les médecins et les malades. La technique est prometteuse mais elle est aussi coûteuse et, à l'heure actuelle, seulement 15 à 30% des malades y répondent positivement, sans que l'on sache exactement pourquoi. De plus la réponse de chaque patient varie selon son type de cancer. D'où l'intérêt, avant d'administrer une immunothérapie, d'identifier en un coup d'oeil ceux et celles chez qui elle a des chances de fonctionner.Partant de ce constat, des chercheurs français ont entraîné un algorithme à déterminer seul, à partir d'images scanner d'une tumeur cancéreuse, si un patient va réagir favorablement. Ils ont créé une signature dite "radiomique" qui définit le niveau d'"infiltration lymphocytaire" d'une tumeur, c'est-à-dire la présence dans la zone tumorale de certains globules blancs dits "cytotoxiques", chargés par le système immunitaire de détruire les cellules cancéreuses, et qui fournit un score prédictif de l'efficacité de l'immunothérapie chez le patient.Dans cette étude rétrospective, pendant plus de deux ans, la signature radiomique a été apprise, entraînée et validée sur quelque 500 patient(e)s adultes présentant une tumeur solide et issus de quatre cohortes indépendantes. Elle a été validée au niveau génomique, histologique et clinique, ce qui la rend particulièrement robuste. Dans une démarche basée sur l'apprentissage automatique, les chercheurs ont d'abord appris à l'algorithme à exploiter les informations pertinentes extraites des scanners de patients inclus dans l'essai MOSCATO qui comportait aussi les données génomiques tumorales des patients. Ainsi, en se basant uniquement sur des images, l'algorithme a appris à reconnaître les tumeurs riches en lymphocytes T cytotoxiques (CD8) qui rendent l'immunothérapie plus efficace.Cette signature radiomique a été ensuite testée et validée dans d'autres cohortes dont celle du TCGA (The Cancer Genome Atlas). Puis, pour tester sa pertinence en situation réelle et la corréler à la prédiction de l'efficacité de l'immunothérapie, elle a été évaluée à partir de scanners réalisés avant la mise sous traitement de patients inclus dans cinq essais d'immunothérapie anti-PD-1/PD-L1 de phase I. Les chercheurs ont montré que les patients chez qui l'immunothérapie fonctionnait après trois et six mois présentaient un score radiomique plus élevé, tout comme ceux qui avaient une meilleure survie.L'intérêt du nouveau procédé est de s'affranchir du besoin de profilage génétique souvent réalisé grâce à une biopsie, procédure qui peut être risquée en fonction de la localisation de la tumeur, par exemple dans certains cas de cancers du poumon. Les essais doivent désormais se poursuivre avec un plus grand nombre de patients et en les stratifiant en fonction du type de cancer afin d'affiner la signature, d'améliorer significativement la sélection des candidats à l'immunothérapie, d'éviter d'y soumettre les patients qui y réagiraient mal et de bonifier le rapport efficacité / coût de cette approche. Tout l'enjeu est de donner le plus rapidement possible la meilleure thérapeutique à des patients avec un cancer avancé. Un beau challenge !(référence : The Lancet Oncology, 14 août 2018, DOI : 10.1016/S1470-2045(18)30413-3)https://www.thelancet.com/journals/lanonc/article/PIIS1470-2045(18)30413-3/fulltext