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Le programme français " AcSé immunothérapie et cancers rares " s'inscrit dans cette ligne via les essais AcSé nivolumab et AcSé pembrolizumab. Ils offrent, de façon sécurisée, l'accès à l'innovation aux patients atteints d'un cancer rare et recueillent des données scientifiques sur ces deux agents anti-PD1 dans le traitement de cancers rares de l'adulte et de l'enfant. AcSé pembrolizumab est un essai multicentrique de phase II non randomisé, mené en non-aveugle destiné à évaluer l'efficacité et la tolérance du pembrolizumab (200 mg en IV tous les 21 jours) sur des cohortes parallèles de patients. Ceux-ci sont porteurs de sarcomes rares histologiquement confirmés, métastatiques ou localement avancés, non résécables et pour lesquels il n'existe pas d'options thérapeutiques validées. Le critère de jugement principal était le pourcentage de patients présentant une réponse objective lors de la première visite d'évaluation, après mise en route du traitement (J 84 ± 7 j). Sur une période de 33 mois, 46 centres ont enrôlé 81 patients répartis en 5 groupes histologiques (chordome n=24 ; sarcomes alvéolaires des parties molles n=14 ; tumeurs desmoplastiques à petites cellules rondes n=5 ; tumeurs rhabdoïdes malignes SMARCA4 n=6 ; autres histotypes n=32 dont 6 sarcomes épithélioïdes). Au 17 mars 2020, 5 réponses partielles et 34 stabilisations étaient documentées (soit un contrôle tumoral pour 39 patients). Le nombre médian de cycles était de 6 et 76% des patients avaient arrêté l'essai après une médiane de 4 cycles. Il y avait eu plus de toxicités en rapport avec la progression (n=51) qu'en rapport avec le traitement (n=13). La médiane de PFS était de 7,9 mois (38 événements) et la médiane d'OS de 19,7 mois (33 décès). Les meilleurs résultats ont été documentés dans les sarcomes alvéolaires des parties molles, les sarcomes SMARCA4 déficients, les sarcomes épithélioïdes, les tumeurs rhabdoïdes et les chordomes. Notons que ces sarcomes ne sont pas associés de façon constante avec une expression élevée de PL1, une charge tumorale élevée, des infiltrats cellulaires et/ou des structures lymphoïdes tertiaires. C'est ce qui fait tout l'intérêt des recherches translationnelles en cours pour élucider les déterminants de la réponse. La trabectédine (TRA) est approuvée en Europe pour le traitement des sarcomes des tissus mous (STM) et des cancers de l'ovaire (CO). Les inhibiteurs des points de contrôle de l'immunité (anti-PD1/PD-L1) ont montré une certaine efficacité dans ces mêmes pathologies. C'est sur cette base qu'a été conçue TRAMUNE, une étude multicentrique prospective de phase Ib évaluant la combinaison de la TRA administrée à J1 via une perfusion de 3 heures et de l'anti-PD-L1 durvalumab administré à J2 en IV, à la dose fixe de 1120 mg, les cycles étant de 3 semaines. Après une séquence d'escalade de dose pour établir la dose maximale tolérée de TRA (1 ; 1,2 ; 1,5 mg/m2), TRAMUNE s'est concentrée sur deux cohortes d'expansion (CO récidivants et STM métastatiques ou non résécables déjà traités). L'objectif principal était de déterminer la tolérance et la sécurité d'emploi ; par ailleurs, des résultats préliminaires d'efficacité (réponses objectives) dans les expansions sont également documentés. Au total 40 patients ont participé à l'étude dont 9 à l'escalade et 31 aux expansions (CO n=15, STM n=16). La constatation, chez 2 patients, d'une cytolyse hépatique (augmentation de l'ALAT de grade IV) et chez un patient d'une neutropénie de grade IV à la dose de 1,2 mg/m2 a fait considérer qu'il s'agissait de la dose maximale tolérée de TRA en association au durvalumab. Au total, 8 cas de cytolyse hépatique de grade III ou IV ont été signalés lors de l'escalade. Les effets indésirables de grade I-II les plus fréquents dans les deux cohortes d'expansion étaient les nausées, la fatigue et les anomalies biologiques (cytopénie et cytolyse hépatique). Au total, 19 patients sur les 30 analysables ont présenté des effets indésirables de grade III-IV, parmi lesquels 10 cas de cytolyse hépatique et 11 cas de neutropénie ; 2 cas d'aplasie fébrile de grade V ont également été rapportés. Sur le plan de l'efficacité, au cours d'un suivi médian de 10,7 mois, 6 patients STM sur les 14 évaluables ont présenté une régression tumorale, dont 1 réponse partielle selon les critères RECIST 1.1 (critère principal de positivité atteint). 8 patients sont restés stables, 4 ont progressé et 1 n'a pas été évalué centralement. La PFS à 6 mois est de 28,6%, avec une durée médiane de 2,3 mois. Des premières données concernant des biomarqueurs potentiels indiquent: - une faible expression de PD-L1 et de CD8 suggérant qu'il s'agit de sarcomes " froids ", - une absence de corrélation entre densité initiale de cellules CD163+ et régression tumorale, - une tendance à une PFS plus longue sous traitement par l'association en cas de profil initial tumoral " CD8 élevé/ CD163 ". Des études complémentaires sont en cours. L'étude de phase II REGOBONE montre que la probabilité de PFS est 3 fois plus élevée chez les patients atteints de sarcome d'Ewing recevant le régorafénib que chez les sujets recevant le placebo et ce, à 24 semaines. Le problème est que cet essai non comparatif n'a pas satisfait le critère de jugement principal: il n'y avait sous régorafénib que 13 patients avec PFS à 8 semaines, au lieu des 14 requis pour que l'essai soit positif. Compte tenu de l'agressivité du sarcome d'Ewing et de la rareté des traitements efficaces, les chercheurs ont néanmoins décidé de poursuivre les études pour explorer l'impact du régorafénib associé à un anti-PD-1 ou anti-PD-L1. A suivre. TK216 est composé ciblant les représentants de la famille ETS (E26 Transformation-Specific oncogene family) qui sont fortement exprimés en cas de sarcome d'Ewing. Sa première évaluation chez l'homme (phase I) indique une tolérance acceptable et gérable (myélosuppression transitoire à la dose actuellement utilisé de 200 mg/m2/j). Par ailleurs et surtout, les premiers résultats d'efficacité sont très encourageants avec 2 réponses complètes et 5 stabilisations sur une population de 15 malades. A suivre. D'après Jean-Yves Blay (1619O), Maud Toulmonde (LBA 67) Florence Duffaud (LBA68) et Joseph A Ludwig (1620O). ESMO Virtual Congress 2020, 19-21 septembre.