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Rappelons - si besoin en est que l'étude FIRE-3, comparait l'association à un protocole FOLFIRI (5-FU, acide folinique et irinotecan) soit de cetuximab, un anticorps monoclonal murin humanisé ciblant EGFR, soit de bevacizumab un autre anticorps monoclonal humanisé qui agit sur les mécanismes de l'angiogenèse tumorale, en bloquant les récepteurs pour le VEGF. La population étudiée se composait de patients avec un diagnostic de cancer colorectal métastasé, confirmé à l'histologie, avec un état fonctionnel (ECOG PS) de 0 à 2 et qui n'avaient pas reçu de chimiothérapie préalable pour traiter la maladie au stade métastasé. Une chimiothérapie adjuvante était autorisée si la dernière administration avait eu lieu au moins six mois avant l'initiation de l'étude.Fire-3, le design Un total de 735 patients issus de 150 centres allemands avait initialement été inclus dans l'étude. Les patients étaient randomisés vers deux bras thérapeutiques. Les deux bras recevaient une chimiothérapie de type FOLFIRI (en bolus IV : 5-FU 400 mg/m²; acide folinique 400 mg/m²; irinotecan 180mg/m² et 5-FU 2400 mg/m² en iv sur 48h). Dans le premier bras, un traitement par cetuximab (dose initiale de 400 mg/m² en IV sur 120 min, puis 250 mg/m² en IV sur 60 min, chaque semaine) était associé à cette chimiothérapie. Dans le second bras, l'association s'est faite avec le bevacizumab à raison de 5 mg/kg en IV sur 30-90 min toutes les deux semaines. Le principal critère d'évaluation de l'étude était le taux de réponse objective (ORR, évalué par les auteurs de l'étude). Figure 1 Design de Fire-3Extensions successives de l'analyse des sous-groupes Dans un premier temps, la population en intention de traiter (ITT) comportait tous les patients qui avaient reçu au moins une séance de traitement, le protocole de l'étude a ensuite été amendé pour ne retenir que les patients qui présentaient un KRAS non muté (WT, Wild Type), tenant ainsi compte du fait que le cetuximab ne s'est révélé efficace que dans cette population patients, au contraire des patients avec un KRAS muté (MT, Mutated Type). Avec le progrès des connaissances du système de signalisation RAS, ce sont finalement les patients RAS WT qui ont été analysés, incluant les mutations au niveau des exons 3 et 4 de KRAS, ainsi que des exons 2, 3 et 4 de NRAS.Une étude qui aura réservé bien des surprises Diverses analyses des résultats de l'étude FIRE-3 ont été présentées au cours des congrès successifs de l'ASCO, de l'ESMO et du WCGIC. L'étude qui est négative pour ce qui est de son principal critère d'évaluation et de la survie sans progression, où aucune différence significative n'a été mise en évidence dans les deux bras thérapeutiques a cependant créé la surprise en montrant une amélioration significative de la survie globale en faveur du groupe cetuximab. Cette différence s'est observée chez les patients KRAS WT dans un premier temps et s'est avérée encore plus marquée chez les patients sans mutations découvertes lors d'une analyse plus étendue du système de signalisation RAS. La dernière analyse de la survie globale réalisée chez les patients RAS WT montre un avantage très significatif de plus de 8 mois en facteur du traitement FOLFIRI/cetuximab, par rapport à FOLFIRI/bevacizumab (33.1 mois contre 25 mois, respectivement dans ces deux groupes), soit une réduction significative de 30% du risque de décès (HR=0.697 ; p=0.0059). Figure 2 Analyse de la survie globale dans la population RAS WTDonnées finales de Fire-3 Lors de la session consacrée à la stratégie thérapeutique optimale en première ligne dans le cancer colorectal métastasé à Madrid, le Dr Stintzing a montré les résultats d'une revue, mené par un comité d'évaluation indépendant, de la réponse radiologique au traitement. Ces données montrent des taux de réponse globale radiologique (ORR) significativement supérieurs dans le groupe de patients traités par l'association chimiothérapie/cetuximab par rapport à ceux où ce même protocole de chimiothérapie était associé au bevacizumab. Dans la population RAS WT les taux de réponse radiologique globale étaient de 72% dans le groupe 'cetuximab' contre 56.1% dans le groupe bevacizumab, une différence significative (p=0.003). A noter que l'analyse limitée aux patients KRAS WT montrait déjà une différence en faveur de ce bras thérapeutique (66.5% contre 55.6% ; p=0.016) sur le plan de la réponse radiologique.Deux nouveaux marqueurs importants d'efficacité Deux autre points particulièrement importants, selon les investigateurs de FIRE-3 étaient la mise en évidence d'une supériorité du groupe chimiothérapie/cetuximab en termes de diminution du volume de la tumeur (early tumor shrinkage ou ETS), ainsi qu'une plus grande profondeur de réponse chez les patients de ce groupe (Depth of Response ou DpR). L'ETS était défini comme une réduction de plus de 20% du volume tumoral à six semaines (date de la première évaluation). La profondeur de la réponse, quant à elle, était définie comme la réduction maximale du volume de la tumeur, observée au nadir, par rapport au début du traitement. Ces données ont été évaluées à la fois dans la population en 'intention de traiter' et chez les patients sans mutation au niveau des exons analysés de KRAS et NRAS. Les différences significatives s'observent dans ce deuxième groupe.Corrélation avec PFS et OS Pour ce qui est de la survie sans progression, la dernière analyse montre, chez les patients avec une diminution précoce du volume tumoral (ETS), une PFS de 9.7 mois dans le groupe cetuximab contre 5.8 mois chez les patients sans ETS. Dans le groupe de patients avec un ETS sous bevacizumab la PFS était de 11.7 mois contre 8.3 mois chez les patients non-ETS. Figure 3 Réduction précoce du volume tumoral (ETS) et survie Par ailleurs, une corrélation significative (p<0.0001 dans la population RAS WT de l'analyse finale de FIRE-3) est observée entre la profondeur de la réponse, la survie globale et la PFS. Le temps moyen pour atteindre le nadir était de 15 semaines dans le groupe cetuximab et de 15.7 semaines avec le bevacizumab. Figure 4 Profondeur de la réponse (DpR)Bénéfice de plus de 8 mois de survie " Ces différences peuvent certainement expliquer en partie l'avantage significatif observé du point de vue de la survie globale dans le groupe recevant le cetuximab par rapport aux patients traités par bevacizumab pour ce qui est de la population 'Wild Type' (absence de mutation) pour l'ensemble des composantes étudiées du système RAS ", souligne Sebastian Stintzing.