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Pascal Mertens a d'abord réagi à propos de la norme de croissance, sujet abordé par presque tous les partis présents, mais finalement peu important selon lui. "En tant que directeur d'hôpital, je vous le dis franchement, la problématique de la norme de croissance ou la problématique du renforcement des salaires ne sont pas les enjeux premiers. Nous sommes conscients de la situation financière. Arrêtons de laisser croire que demain nous serons capables de dégager énormément de moyens supplémentaires. Non. Les finances publiques sont telles que nous devons réfléchir à mieux allouer les moyens."Les besoins sont une vraie concertation, une stabilité sur une législature notamment par rapport aux moyens alloués au secteur, estime le DG de Vivalia. "Nous manquons d'une vision. C'est quand on a une vision que l'on peut réfléchir à l'allocation des moyens. Et nous manquons de ressources humaines suffisantes pour garantir nos trois missions de base: l'accessibilité, la qualité et la sécurité des soins. Dans ce cadre, des solutions comme le flexi-job peuvent constituer une solution.""La concertation, c'est la base de la base", réagit Sophie Rohonyi (DéFI), députée fédérale. "Une bonne mesure sera une mesure qui aura été concertée avec le terrain. Ce bon sens n'est malheureusement pas toujours exercé", s'attaquant indirectement au ministre Vandenbroucke, connu pour son manque de concertation avec le terrain. Delphine Chabbert, députée PS au Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, avait quant à elle abordé plus tôt dans le débat la question de la norme de croissance et s'est sentie personnellement visée par la remarque de Pascale Mertens. "Je suis contente de savoir que la norme de croissance ne constitue pas votre priorité. En tout cas c'est la nôtre, pour vraiment avoir une vision globale du système de santé. On ne peut pas, je pense, être crédible et sérieux si l'on vous propose une vision sans réfléchir aux moyens."Ensuite, Pascal Mertens a abordé la question des réseaux hospitaliers. La réforme, initiée par Maggie De Block et franchement mise de côté par son successeur, suscite des interrogations. Quel est l'avenir des réseaux, qui aujourd'hui n'ont rien de concret? "Il y a une réponse politique et une réponse moins politique à cette réponse", estime Élisabeth Degryse, tête de liste des Engagés à Bruxelles et ancienne vice-présidente de la Mutualité chrétienne. "La réponse politique est que le ministre actuel n'est pas convaincu par la réforme des réseaux telle qu'elle a été construite. La réforme des réseaux n'a donc pas été sa priorité pendant son mandat qui a déjà été amputé par deux ans de covid. La réponse plus concrète, c'est qu'aujourd'hui, les réseaux existent. Et que c'est compliqué pour certains de fonctionner, notamment parce que la législation ne s'est pas adaptée. Par exemple, si l'on veut utiliser le même DPI dans trois hôpitaux appartenant au même réseau, on ne le peut pas à cause du RGPD. C'est pourtant le genre de décision qui incombe aux réseaux, et qui pourrait générer des économies d'échelle. Aujourd'hui, il faut donc adapter la loi, proposer des incitants et surtout vous donner les outils pour avancer, car les réalités des uns ne sont pas celles des autres."Sophie Rohonyi va dans le même sens. "Cette réforme est nécessaire, elle permet de mutualiser les expertises spécifiques des hôpitaux au bénéfice des patients, et de réaliser des économies d'échelle pour les institutions. Cela permettrait de dégager des moyens pour des domaines tels que la cybersécurité." Tout comme Élisabeth Degryse, Sophie Rohonyi préconise de travailler sur des incitants et d'adapter les lois "car nous avons déjà trop tardé à concrétiser cette réforme et que le monde a changé". Pour le PTB, cette réforme n'est pas un pas dans la bonne direction. "Je regrette que le paysage hospitalier se dirige vers de gros plateaux techniques et une perte de l'hôpital de proximité. Dans l'idéal, il faudrait que les réseaux soient organisés autrement. À Charleroi, il y a un réseau public et un réseau privé à quelques kilomètres l'un de l'autre. En termes d'efficience, d'équité pour le personnel soignant, cela fait question. Le défi est grand. Il faut s'y prendre autrement et s'inspirer du modèle de financement à la population, à l'instar de ce qui se fait en Allemagne et au Canada", préconise Sofie Merckx, députée fédérale (PTB). Au Parti socialiste, on reconnaît l'utilité des réseaux hospitaliers, "bien que la réforme n'ait pas été portée par un ministre de notre couleur", explique Delphine Chabbert. "Cela peut constituer un vrai outil pour aider les institutions et objectiver les besoins. Mais aujourd'hui, il s'agit de coquilles vides. Il faut revoir avec vous - vous parliez de concertation - leur fonctionnement et comment les remplir. Concernant l'IT et la cybersécurité, nous allons demander, lors les négociations, la réalisation d'un master plan de financement sur les questions de cybersécurité et d'IT dans les hôpitaux. Et cela, on ne peut pas le faire sans vous. Et les réseaux pourraient être utiles dans l'élaboration de ce master plan.""La réforme des réseaux était une politique fédérale, mais la Flandre avait dix ans d'avance sur l'organisation territoriale et savait vers quoi elle devait aller", conclut, sur le sujet, Laurence Hennuy députée fédérale (Ecolo). On lui laissera défendre ses propos car la formation des réseaux en Flandre n'a pas été plus simple qu'en Belgique francophone, loin s'en faut. "Le problème de cette réforme est que l'on ne lui a pas donné d'objectif autre que de rationaliser l'offre de soins. La Wallonie avait-elle la connaissance de ses objectifs de santé publique?", questionne l'économiste de formation, qui reste persuadée que les réseaux vont se structurer et, de ce fait, attirer du personnel intéressé par l'approche des réseaux. "Vivalia qui sort de terre dans le Luxembourg, avec sa concentration d'expertise à un endroit, va attirer des médecins."Telle est la suggestion de Pascal Mertens. "Il faut raisonner comme on le fait pour d'autres métiers - pharmaciens, notaires - par le biais des réseaux. Il y a 25 réseaux qui représentent un quota de la population. Pourquoi, demain, ne pas allouer autant de personnel soignant par réseau en fonction des missions qui lui sont confiées?""Pourquoi pas?", rétorque Elisabeth Degryse. "Ce n'est pas parce que l'on veut supprimer les quotas qu'il ne faut pas de régulation. C'est sans doute une piste que l'on pourrait explorer. C'est une suggestion qui peut faire sens, et qui est directement liée à la question des objectifs en matière de santé qui doivent être définis en fonction des besoins des différents territoires. Cependant, ces besoins sont évolutifs, il faut donc aller au bout de la réflexion. On ne peut pas laisser le nombre de médecins aller à veau l'eau en fonction des choix individuels et des envies de chacun. Sinon, on se retrouvera dans cinq ans avec trop de dermatos qui exercent dans des cliniques privées et pas assez de pédiatres.""C'est une histoire qui n'est nullement un long fleuve tranquille", consent Marie-Christine Marghem (MR). "J'entends bien votre réflexion, qui est intéressante. Mais j'ai déjà entendu tous les systèmes possibles et imaginables pour résoudre ce problème. Nous espérons que l'ouverture de davantage de places avec des incitants financiers va pousser les jeunes médecins à s'installer dans les territoires en pénurie et combler les spécialités déficitaires. Je ne crois pas que la liberté individuelle seule va résoudre le problème. Il faudra peut être avoir des incitants tellement forts que cela devient presque une obligation.""Je peux entendre votre proposition, mais il faut faire attention à ce que la clé de répartition ne soit pas arbitraire et corresponde bien aux besoins du terrain", estime pour sa part Sophie Rohonyi. "La clé existante n'y correspond pas. Ensuite, il être attentif à proposer des incitants pour que les jeunes médecins s'installent en zone de pénurie, mais également leur proposer de meilleures conditions de vie."Sofie Merckx conclut: "Dans l'idéal, il faut une politique de soins de santé basée sur les besoins. Ces besoins, on peut les identifier en parlant avec les acteurs du terrain. C'est là-dessus qu'il faut baser les quotas. Aujourd'hui, la Commission de planification fait de son mieux, mais se contente d'ajouter un pourcentage à la masse de médecins existante. Ils ne tiennent pas compte du vieillissement de la population des médecins." Cette dernière critique est erronée puisque la Commission de planification suit et tient compte, à travers ses missions, de l'évolution de la pyramide d'âge des professionnels de la santé.