Après avoir sorti une édition spéciale, sorte de guide à destination du médecin, du pharmacien mais aussi du patient, Roularta Healthcare organisait une table ronde pour faire avancer la cause des patients atteints de maladies rares.

Autour de la table, Eva Schoeters, présidente de RaDiOrg, l'association faîtière belge des personnes atteintes de maladies rares, le Dr Paul De Munck, président du GBO, la Dre Greet van Kersschaever, conseillère maladies rares du ministre fédéral de la Santé Franck Vandenbroucke, la Pre Marion Delcroix, membre du département des maladies rares de l'UZ Leuven et Armand Voorschuur, European Policy & Market Access Advisor pour Pharma.be.

"L'objectif est d'accélérer le diagnostic pour les patients, d'informer les prestataires de soins et d'améliorer la connaissance autour des maladies rares", explique Jan Bamelis, directeur/éditeur de Roularta Healthcare, en préambule de la table ronde.

La première ligne, la première étape

"Orphanet recense 6.300 maladies rares. En Belgique, il n'y a malheureusement pas de recensement", explique Eva Schoeters.

En tant que patient, le premier problème est d'être diagnostiqué. Pour ce faire, il se dirige en premier lieu chez son médecin généraliste, qui est parfois désemparé. "Cette initiative permet de sensibiliser les médecins généralistes. C'est la première étape, essentielle", estime le Dr Paul De Munck. "Ensuite, une maladie rare n'est pas si rare que cela. On estime qu'un patient sur 20 peut être atteint d'une maladie rare. Il faut donner des outils tels que des red flags dans les outils informatiques pour alerter les médecins à être attentifs dans telle ou telle situation. Ensuite, il faut apprendre les bons réflexes pendant le cursus. Aujourd'hui, le médecin n'est pas formé à repérer le zèbre, encore moins la licorne, mais plutôt le cheval."

"C'est insupportable qu'aujourd'hui des patients attendent 4,5 ans en moyenne pour être diagnostiqués", continue Paul De Munck. "Je ne souscris pas aux priorités de la santé publique qui s'oriente uniquement sur les maladies les plus fréquentes et les maladies chroniques. Les performances d'un système de santé se mesurent également à la prise en charge des pathologies complexes et/ou rares."

"Nous avons un système complexe, avec des réseaux européens qui s'imbriquent dans la structure bizarre de notre État. Il y a une rupture entre ce qui se passe au niveau fédéral et au niveau régional. Il y a de bonnes choses au niveau régional, mais il n'y a pas de financement, pas de pouvoir de gestion", regrette la Pre Marion Delcroix. "Il y a huit centres d'expertise ou fonctions maladies rares, mais il n'y a pas d'expertise au niveau de maladies spécifiques."

Les soins, encore plus complexes

"Le parcours diagnostique est déjà difficile. Mais ensuite, le parcours médicamenteux est également difficile. Et il coûte cher", constate Eva Schoeters. "Nous manquons d'une structure pour trouver l'expertise, qui est mal répertoriée. Ce sont des maladies multidisciplinaires qui nécessitent une prise en charge multidisciplinaire."

Pour améliorer l'accès aux médicaments, il faut des choix politiques, estime Paul De Munck. "La recherche de médicaments n'est certes pas rentable sur un plan économique, mais il faut sensibiliser les partenaires de l'industrie pharmaceutique car ils ont une responsabilité sociale. Les autorités belges doivent également comprendre qu'ils ont une responsabilité sociale. La complexité de l'État belge n'aide pas à trouver un plan national."

"C'est un système complexe", acquiesce le Dr Greet Van Kersschaeven. "Il faut clarifier le trajet des patients atteints de maladies rares pour accélérer le diagnostic et diminuer l'errance diagnostique."

"Il est également possible de travailler sur le prix des médicaments", explique Armand Voorschuur. "L'industrie pharmaceutique investit dans les maladies rares, mais il faut que cela soit soutenable financièrement. Il y a certainement des choses à faire de ce côté-là."

"On peut imaginer un accès précoce aux molécules comme en France. Mais la structure de l'État empêche cela.", enchérit la Pre Delcroix. "Nous espérons pouvoir aller vers cela", réagit la représentante du ministre Vandenbroucke. "Je l'espère, mais cela fait 20 ans que nous menons ce combat", rétorque Mario Delcroix.

"Il ne faut pas se décourager, c'est le moment d'aller voir tous les partis pour voir ce qu'ils proposeront après juin 2024", positive Paul De Munck. "Il faut (re)convaincre, dans la nouvelle législature, de l'intérêt des maladies rares. J'ai eu des contacts avec le cabinet de la ministre wallonne de la Santé, il y a une volonté d'avancer. Il faut s'obstiner. La bonne nouvelle est que la SSMG s'empare désormais de la thématique des maladies rares. Il y a des congrès, un interlocuteur désormais. Demain, tous les prestataires doivent être conscientisés. Les spécialistes, mais aussi tout qui passe par la première ligne. L'interdisciplinarité sera importante."

La place du patient

"Les associations ne sont pas suffisamment reconnues. C'est difficile de rester en vie", témoigne Eva Schoeters. "Le ministre Vandenbroucke veut rencontrer davantage les patients, être à leur écoute", réagit Greet Van Kersschaeven.

"La place des patients grandit", positive le Dr Paul De Munck. "Avant, on n'en parlait simplement pas. Aujourd'hui, la Luss représente les patients dans les commissions à l'Inami. Je trouve que pour avancer, il faut que les universités invitent davantage les patients pour les visibiliser. Enfin, les mutualités, qui représentent également les patients, ont aussi un rôle à jouer."

Les priorités des intervenants, en bref

JDM
© JDM

Greet van Kersschaever

  • Concentrer l'expertise
  • Soutenir les patients
  • Un accès plus souple aux médicaments

Armand Voorschuur

  • Davantage travailler ensemble
  • Établir des priorités
  • Améliorer l'accessibilité aux médicaments

Eva Schoeters

  • Une accessibilité égale pour les patients, y compris ceux atteints d'une maladie rare, aux soins
  • Une expertise concentrée

Paul De Munck

  • En Wallonie : une structure, des moyens pour les maladies rares
  • Acquérir un réflexe "maladie rare" en médecine générale
  • Réforme de la première ligne de soins : trouver des porte-voix pour les maladies rares
  • Mieux soutenir les associations de patients

Marion Delcroix

  • Améliorer l'expertise
  • Structurer les soins
  • Trouver des partenariats plus large, mettre tout le monde autour de la table
Après avoir sorti une édition spéciale, sorte de guide à destination du médecin, du pharmacien mais aussi du patient, Roularta Healthcare organisait une table ronde pour faire avancer la cause des patients atteints de maladies rares.Autour de la table, Eva Schoeters, présidente de RaDiOrg, l'association faîtière belge des personnes atteintes de maladies rares, le Dr Paul De Munck, président du GBO, la Dre Greet van Kersschaever, conseillère maladies rares du ministre fédéral de la Santé Franck Vandenbroucke, la Pre Marion Delcroix, membre du département des maladies rares de l'UZ Leuven et Armand Voorschuur, European Policy & Market Access Advisor pour Pharma.be. "L'objectif est d'accélérer le diagnostic pour les patients, d'informer les prestataires de soins et d'améliorer la connaissance autour des maladies rares", explique Jan Bamelis, directeur/éditeur de Roularta Healthcare, en préambule de la table ronde."Orphanet recense 6.300 maladies rares. En Belgique, il n'y a malheureusement pas de recensement", explique Eva Schoeters.En tant que patient, le premier problème est d'être diagnostiqué. Pour ce faire, il se dirige en premier lieu chez son médecin généraliste, qui est parfois désemparé. "Cette initiative permet de sensibiliser les médecins généralistes. C'est la première étape, essentielle", estime le Dr Paul De Munck. "Ensuite, une maladie rare n'est pas si rare que cela. On estime qu'un patient sur 20 peut être atteint d'une maladie rare. Il faut donner des outils tels que des red flags dans les outils informatiques pour alerter les médecins à être attentifs dans telle ou telle situation. Ensuite, il faut apprendre les bons réflexes pendant le cursus. Aujourd'hui, le médecin n'est pas formé à repérer le zèbre, encore moins la licorne, mais plutôt le cheval.""C'est insupportable qu'aujourd'hui des patients attendent 4,5 ans en moyenne pour être diagnostiqués", continue Paul De Munck. "Je ne souscris pas aux priorités de la santé publique qui s'oriente uniquement sur les maladies les plus fréquentes et les maladies chroniques. Les performances d'un système de santé se mesurent également à la prise en charge des pathologies complexes et/ou rares.""Nous avons un système complexe, avec des réseaux européens qui s'imbriquent dans la structure bizarre de notre État. Il y a une rupture entre ce qui se passe au niveau fédéral et au niveau régional. Il y a de bonnes choses au niveau régional, mais il n'y a pas de financement, pas de pouvoir de gestion", regrette la Pre Marion Delcroix. "Il y a huit centres d'expertise ou fonctions maladies rares, mais il n'y a pas d'expertise au niveau de maladies spécifiques.""Le parcours diagnostique est déjà difficile. Mais ensuite, le parcours médicamenteux est également difficile. Et il coûte cher", constate Eva Schoeters. "Nous manquons d'une structure pour trouver l'expertise, qui est mal répertoriée. Ce sont des maladies multidisciplinaires qui nécessitent une prise en charge multidisciplinaire."Pour améliorer l'accès aux médicaments, il faut des choix politiques, estime Paul De Munck. "La recherche de médicaments n'est certes pas rentable sur un plan économique, mais il faut sensibiliser les partenaires de l'industrie pharmaceutique car ils ont une responsabilité sociale. Les autorités belges doivent également comprendre qu'ils ont une responsabilité sociale. La complexité de l'État belge n'aide pas à trouver un plan national.""C'est un système complexe", acquiesce le Dr Greet Van Kersschaeven. "Il faut clarifier le trajet des patients atteints de maladies rares pour accélérer le diagnostic et diminuer l'errance diagnostique.""Il est également possible de travailler sur le prix des médicaments", explique Armand Voorschuur. "L'industrie pharmaceutique investit dans les maladies rares, mais il faut que cela soit soutenable financièrement. Il y a certainement des choses à faire de ce côté-là.""On peut imaginer un accès précoce aux molécules comme en France. Mais la structure de l'État empêche cela.", enchérit la Pre Delcroix. "Nous espérons pouvoir aller vers cela", réagit la représentante du ministre Vandenbroucke. "Je l'espère, mais cela fait 20 ans que nous menons ce combat", rétorque Mario Delcroix."Il ne faut pas se décourager, c'est le moment d'aller voir tous les partis pour voir ce qu'ils proposeront après juin 2024", positive Paul De Munck. "Il faut (re)convaincre, dans la nouvelle législature, de l'intérêt des maladies rares. J'ai eu des contacts avec le cabinet de la ministre wallonne de la Santé, il y a une volonté d'avancer. Il faut s'obstiner. La bonne nouvelle est que la SSMG s'empare désormais de la thématique des maladies rares. Il y a des congrès, un interlocuteur désormais. Demain, tous les prestataires doivent être conscientisés. Les spécialistes, mais aussi tout qui passe par la première ligne. L'interdisciplinarité sera importante.""Les associations ne sont pas suffisamment reconnues. C'est difficile de rester en vie", témoigne Eva Schoeters. "Le ministre Vandenbroucke veut rencontrer davantage les patients, être à leur écoute", réagit Greet Van Kersschaeven."La place des patients grandit", positive le Dr Paul De Munck. "Avant, on n'en parlait simplement pas. Aujourd'hui, la Luss représente les patients dans les commissions à l'Inami. Je trouve que pour avancer, il faut que les universités invitent davantage les patients pour les visibiliser. Enfin, les mutualités, qui représentent également les patients, ont aussi un rôle à jouer."