Quelques explications s'imposent pour comprendre l'importance de notre système d'accords et son impact positif sur la qualité des soins en Belgique. Lorsque, après la guerre, le gouvernement belge est rentré de son exil anglais, il a instauré dans la foulée un système de sécurité sociale. Il ne choisit pas le système beveridgien bien qu'il ait pu assister à sa mise en place en Angleterre. Il opte plutôt pour un système bismarkien qui est toujours le nôtre, c'est-à-dire, un système d'assurance financé essentiellement par les cotisations des travailleurs et des patrons même si l'Etat complète.

Ceci dit, les systèmes beveridgiens financés par l'impôt sont toujours étatiques. Les systèmes bismarkiens peuvent, eux, prendre parfois l'aspect d'un système à l'anglaise comme aux Pays-Bas.

En 1945-46, quand le système belge s'est mis en place, il y a eu peu de contestations de la part des médecins ; ce qui prouve, contrairement à ce qui a été continuellement colporté, que les médecins n'étaient pas opposés au principe de la sécurité sociale. Du côté du Cabinet et des mutuelles, on était moins heureux. En effet, chaque tentative d'ajuster les remboursements aux tarifs pratiqués se soldait par des augmentations de tarifs. De là, la volonté des mutuelles d'avoir leurs propres établissements où elles contrôlaient les prix et de changer le système.

A l'époque, elles n'avaient guère besoin de relai politique puisque mutuelles et gouvernement se confondaient. M. Leburton était à la fois Président de l'Union nationale des Mutualités socialistes et Ministre des Affaire sociales (c'est-à-dire Ministre de tutelle des mutualités - cherchez le conflit d'intérêts !).

M. Leburton fût donc le père de la loi qui créait pour les médecins un tas d'obligations (respect des tarifs, carnet de santé, inscription). En échange, les médecins recevaient une pension mirifique en fin de carrière dont quelques-uns ont d'ailleurs profité. C'était une étatisation de fait sans les avantages des salariés (à part la pension).

Etatisation signifie qu'on est au service de l'Etat. Ceci n'a rien d'infâmant en soi. L'Etat a besoin de serviteurs mais, il est des professions qui doivent avant tout être au service de l'individu.

Imaginons-nous un avocat ou un journaliste au service de l'Etat ? C'est ce qui consiste à transformer une démocratie en état totalitaire.

Il en est de même pour les médecins. Leur éthique leur impose d'être toujours au côté de l'individu car c'est lui qui souffre et qui meurt. Bien sûr, l'intérêt de l'un n'est pas toujours opposé à l'intérêt de l'autre mais, en cas de conflit d'intérêts, le médecin se doit de défendre le patient et de s'en faire l'avocat le cas échéant.

Après une longue grève contre le gouvernement d'un corps médical soudé, une Pax Medica s'établit, basée sur un système d'accords qui allait permettre la coexistence harmonieuse d'un financement social avec une médecine libérale.

La médecine libérale a joui d'une grande liberté dans ce système puisque les accords annuels jusqu'aux années 90 étaient signés librement par les organisations médicales et les mutuelles et qu'ils ne s'imposaient pas à chaque médecin mais que chacun avait le droit de refuser pour autant qu'il y ait au moins 60% qui acceptent dont 50% de médecins généralistes et 50% de médecins spécialistes. Ceux qui acceptaient, pouvaient encore définir des plages horaires où ils pourraient ne pas respecter les clauses de l'accord. Enfin, ceux qui acceptaient totalement l'accord, n'en étaient pas encore prisonniers et pouvaient tarifier davantage aux patients ayant une exigence particulière.

Cette liberté n'existe dans aucun autre pays où il y a un système d'accords. Dans ces pays (France, Luxembourg, Allemagne, ...), une fois les accords signés, ils s'imposent à tous les médecins. Cette liberté va avoir des conséquences diamétralement opposées.

D'une part, la liberté thérapeutique du médecin, le paiement sous forme d'honoraires, la liberté de choix du patient vont contribuer de manière importante à faire de la Belgique un des pays, sinon, le pays, où les soins sont de la meilleure qualité : disponibilité du médecin, disponibilité d'un second avis, temps consacré au patient, proximité, absence de liste d'attente (et de rationnement du moins jusqu'ici).

D'autre part, cette liberté va être une pierre d'achoppement lors de la discussion de tous les accords et va en arriver à pourrir les relations entre les médecins et les autorités politiques ainsi que les mutuelles. Les unes et les autres vont vouloir limiter les libertés issues des accords de la St-Jean, résultat des négociations de 1964 après la grande grève.

A suivre ...

Quelques explications s'imposent pour comprendre l'importance de notre système d'accords et son impact positif sur la qualité des soins en Belgique. Lorsque, après la guerre, le gouvernement belge est rentré de son exil anglais, il a instauré dans la foulée un système de sécurité sociale. Il ne choisit pas le système beveridgien bien qu'il ait pu assister à sa mise en place en Angleterre. Il opte plutôt pour un système bismarkien qui est toujours le nôtre, c'est-à-dire, un système d'assurance financé essentiellement par les cotisations des travailleurs et des patrons même si l'Etat complète.Ceci dit, les systèmes beveridgiens financés par l'impôt sont toujours étatiques. Les systèmes bismarkiens peuvent, eux, prendre parfois l'aspect d'un système à l'anglaise comme aux Pays-Bas.En 1945-46, quand le système belge s'est mis en place, il y a eu peu de contestations de la part des médecins ; ce qui prouve, contrairement à ce qui a été continuellement colporté, que les médecins n'étaient pas opposés au principe de la sécurité sociale. Du côté du Cabinet et des mutuelles, on était moins heureux. En effet, chaque tentative d'ajuster les remboursements aux tarifs pratiqués se soldait par des augmentations de tarifs. De là, la volonté des mutuelles d'avoir leurs propres établissements où elles contrôlaient les prix et de changer le système.A l'époque, elles n'avaient guère besoin de relai politique puisque mutuelles et gouvernement se confondaient. M. Leburton était à la fois Président de l'Union nationale des Mutualités socialistes et Ministre des Affaire sociales (c'est-à-dire Ministre de tutelle des mutualités - cherchez le conflit d'intérêts !).M. Leburton fût donc le père de la loi qui créait pour les médecins un tas d'obligations (respect des tarifs, carnet de santé, inscription). En échange, les médecins recevaient une pension mirifique en fin de carrière dont quelques-uns ont d'ailleurs profité. C'était une étatisation de fait sans les avantages des salariés (à part la pension).Etatisation signifie qu'on est au service de l'Etat. Ceci n'a rien d'infâmant en soi. L'Etat a besoin de serviteurs mais, il est des professions qui doivent avant tout être au service de l'individu.Imaginons-nous un avocat ou un journaliste au service de l'Etat ? C'est ce qui consiste à transformer une démocratie en état totalitaire.Il en est de même pour les médecins. Leur éthique leur impose d'être toujours au côté de l'individu car c'est lui qui souffre et qui meurt. Bien sûr, l'intérêt de l'un n'est pas toujours opposé à l'intérêt de l'autre mais, en cas de conflit d'intérêts, le médecin se doit de défendre le patient et de s'en faire l'avocat le cas échéant.Après une longue grève contre le gouvernement d'un corps médical soudé, une Pax Medica s'établit, basée sur un système d'accords qui allait permettre la coexistence harmonieuse d'un financement social avec une médecine libérale.La médecine libérale a joui d'une grande liberté dans ce système puisque les accords annuels jusqu'aux années 90 étaient signés librement par les organisations médicales et les mutuelles et qu'ils ne s'imposaient pas à chaque médecin mais que chacun avait le droit de refuser pour autant qu'il y ait au moins 60% qui acceptent dont 50% de médecins généralistes et 50% de médecins spécialistes. Ceux qui acceptaient, pouvaient encore définir des plages horaires où ils pourraient ne pas respecter les clauses de l'accord. Enfin, ceux qui acceptaient totalement l'accord, n'en étaient pas encore prisonniers et pouvaient tarifier davantage aux patients ayant une exigence particulière.Cette liberté n'existe dans aucun autre pays où il y a un système d'accords. Dans ces pays (France, Luxembourg, Allemagne, ...), une fois les accords signés, ils s'imposent à tous les médecins. Cette liberté va avoir des conséquences diamétralement opposées.D'une part, la liberté thérapeutique du médecin, le paiement sous forme d'honoraires, la liberté de choix du patient vont contribuer de manière importante à faire de la Belgique un des pays, sinon, le pays, où les soins sont de la meilleure qualité : disponibilité du médecin, disponibilité d'un second avis, temps consacré au patient, proximité, absence de liste d'attente (et de rationnement du moins jusqu'ici).D'autre part, cette liberté va être une pierre d'achoppement lors de la discussion de tous les accords et va en arriver à pourrir les relations entre les médecins et les autorités politiques ainsi que les mutuelles. Les unes et les autres vont vouloir limiter les libertés issues des accords de la St-Jean, résultat des négociations de 1964 après la grande grève.A suivre ...