La première déclaration d'euthanasie pour un mineur communiquée à la Commission fédérale d'évaluation et de contrôle de l'euthanasie a suscité pas mal de réactions. Bien entendu, les opposants à l'euthanasie que ce soit pour des adultes ou des enfants, se sont lancés dans une surenchère de descriptions apocalyptiques : "La Belgique s'enfonce dans l'horreur". "La Belgique s'enfonce un peu plus dans l'ère obscure qui aura érigé en "progrès" l'abandon de malades, adultes ou mineurs".

L'homme politique belge, Alain Destexhe, s'est fendu d'une tribune dans le FigaroVox, pamphlet caricatural titré "Euthanasie pour un mineur en Belgique : toujours plus loin". Le Vatican, sans surprise, a formulé une condamnation claire et nette : l'euthanasie est un acte contre les religions, la vie est sacrée.

Notre Église, quant à elle, a tenu des propos plus modérés par la voix de son porte-parole Tommy Scholtès. Tommy Scholtès a rappelé que pour l'Église, les soins palliatifs sont la seule option mais a poursuivi en soulignant que nous ne connaissions ni l'enfant, ni ses parents, ni la situation.

De nombreux médias étrangers se sont intéressés à ce premier cas d'euthanasie de mineur en Belgique. Rappelons qu'il ne s'agit pas d'une première mondiale puisque les Pays-Bas, dès leur loi de 2001 concernant l'euthanasie, ont permis la demande d'euthanasie d'enfants à partir de l'âge de 12 ans. Des cas d'euthanasie d'enfants ont été rapportés même si, heureusement, ceux-ci ne sont pas nombreux.

Au cours des différents entretiens avec les journalistes étrangers, j'ai constaté la remarquable écoute dont je bénéficiais. Et pourtant tous étaient originaires de pays qui n'ont pas dépénalisé l'euthanasie ou le suicide assisté. Et pourtant, il n'était pas question d'adultes mais bien d'enfants.

Qu'y a-t-il de choquant dans l'histoire d'un enfant condamné à mort à brève échéance par la maladie, qui peut faire ses adieux entouré de sa famille et de ses amis ? Ce n'est pas l'euthanasie qui est choquante, mais bien la maladie qui, à brève échéance, va faire d'un jeune enfant un adulte sans toutefois arriver à la majorité. Ce qui est choquant est un enfant condamné à vivre la majeure partie de son temps à l'hôpital. Ce qui est choquant est un enfant qui ne peut pas vivre sa vie d'enfant. Ce qui est choquant est d'entendre sortir de ce corps d'enfant des paroles d'adulte. Ce qui est choquant est de voir mourir un enfant sous les yeux de ses parents, de ses grands-parents.

En 2013, d'autres questions avaient été soumises au Parlement : simplification de la déclaration anticipée, suppression de sa durée de validité, limite à poser en ce qui concerne le bon usage de la clause de conscience, extension du champ d'application de la clause de conscience à des patients atteints de lésions cérébrales graves. Seule la question de l'extension de l'euthanasie aux mineurs a pu être concrétisée par une loi avant la fin de la législature, après avoir pu rassembler une majorité parlementaire, en dépit de la sensibilité de ce sujet. Il est vrai que des pédiatres sont venus témoigner devant le Sénat de l'existence de demandes d'euthanasie émanant d'enfants et de leur désarroi devant de telles situations, se trouvant devant le dilemme soit de respecter la parole de l'enfant et d'être hors-la-loi, soit de répondre à l'enfant que la chose n'était pas possible.

Les Académies royales de Médecine s'étaient également penchées sur cette question et avaient rendu un avis favorable à la prise en compte de demandes d'enfants pour l'euthanasie.

Tous ceux qui étaient en faveur de cette extension étaient cependant animés d'un seul espoir : qu'un minimum de demandes de mettre fin à la vie d'un enfant voit le jour. Le législateur a introduit des balises plus strictes pour l'euthanasie des enfants que pour celle des adultes. Le décès doit être prévisible à brève échéance, seules les situations somatiques sont prises en compte, la capacité de discernement de l'enfant doit être attestée par un pédopsychiatre ou un psychologue, les parents doivent donner leur consentement. Pour ce dernier point, j'aurais certes préféré une autre formulation : l'impossibilité de poursuivre une procédure d'euthanasie en cas d'opposition des parents. En effet, c'est mettre une terrible charge sur les parents que de leur imposer ce consentement alors qu'ils ont déjà dû traverser des moments très difficiles et qu'ils pourraient avoir le sentiment, en signant leur accord, de contribuer à la mort de leur enfant. Ce n'est bien évidemment pas le cas. Très souvent, les enfants peuvent trouver les mots pour que leurs parents acceptent que cet ultime traitement que l'on propose soit le traitement de trop, qu'ils sont fatigués, qu'ils n'en peuvent plus, qu'ils souhaiteraient s'endormir à jamais.

À ceux qui s'étonnent de ce qu'il n'y a eu qu'une seule déclaration depuis 2014, donnant en quelque sorte l'impression de se plaindre de ce qu'il n'y a pas plus d'euthanasies d'enfants, je leur réponds qu'un des premiers bénéfices de cette loi est de permettre la liberté de parole. Aujourd'hui, lorsqu'un pédiatre, un spécialiste travaillant dans un hôpital pour enfants est confronté à une demande de mettre fin à la vie de son jeune patient, il peut évoquer avec lui et avec ses parents les possibilités de traitement, sans que ses paroles puissent être considérées comme un évitement de la question posée par l'enfant : m'aideras-tu lorsque je ne pourrai plus supporter la souffrance?

Les soins palliatifs pédiatriques doivent encore être développés, principalement à domicile. Nous vivons dans un pays où il est possible d'évoquer et de travailler pour l'amélioration des soins palliatifs tout comme il est possible d'évoquer et de formuler une demande d'euthanasie. Un enfant de 10 ans, un adolescent de 17 ans, n'est pas immunisé contre les maladies incurables ni contre la souffrance. Il eût été inhumain de répondre à ces enfants : souffre en silence et attends si tu peux d'avoir 18 ans pour demander de sortir de tes souffrances.

La première déclaration d'euthanasie pour un mineur communiquée à la Commission fédérale d'évaluation et de contrôle de l'euthanasie a suscité pas mal de réactions. Bien entendu, les opposants à l'euthanasie que ce soit pour des adultes ou des enfants, se sont lancés dans une surenchère de descriptions apocalyptiques : "La Belgique s'enfonce dans l'horreur". "La Belgique s'enfonce un peu plus dans l'ère obscure qui aura érigé en "progrès" l'abandon de malades, adultes ou mineurs".L'homme politique belge, Alain Destexhe, s'est fendu d'une tribune dans le FigaroVox, pamphlet caricatural titré "Euthanasie pour un mineur en Belgique : toujours plus loin". Le Vatican, sans surprise, a formulé une condamnation claire et nette : l'euthanasie est un acte contre les religions, la vie est sacrée.Notre Église, quant à elle, a tenu des propos plus modérés par la voix de son porte-parole Tommy Scholtès. Tommy Scholtès a rappelé que pour l'Église, les soins palliatifs sont la seule option mais a poursuivi en soulignant que nous ne connaissions ni l'enfant, ni ses parents, ni la situation.De nombreux médias étrangers se sont intéressés à ce premier cas d'euthanasie de mineur en Belgique. Rappelons qu'il ne s'agit pas d'une première mondiale puisque les Pays-Bas, dès leur loi de 2001 concernant l'euthanasie, ont permis la demande d'euthanasie d'enfants à partir de l'âge de 12 ans. Des cas d'euthanasie d'enfants ont été rapportés même si, heureusement, ceux-ci ne sont pas nombreux.Au cours des différents entretiens avec les journalistes étrangers, j'ai constaté la remarquable écoute dont je bénéficiais. Et pourtant tous étaient originaires de pays qui n'ont pas dépénalisé l'euthanasie ou le suicide assisté. Et pourtant, il n'était pas question d'adultes mais bien d'enfants.Qu'y a-t-il de choquant dans l'histoire d'un enfant condamné à mort à brève échéance par la maladie, qui peut faire ses adieux entouré de sa famille et de ses amis ? Ce n'est pas l'euthanasie qui est choquante, mais bien la maladie qui, à brève échéance, va faire d'un jeune enfant un adulte sans toutefois arriver à la majorité. Ce qui est choquant est un enfant condamné à vivre la majeure partie de son temps à l'hôpital. Ce qui est choquant est un enfant qui ne peut pas vivre sa vie d'enfant. Ce qui est choquant est d'entendre sortir de ce corps d'enfant des paroles d'adulte. Ce qui est choquant est de voir mourir un enfant sous les yeux de ses parents, de ses grands-parents.En 2013, d'autres questions avaient été soumises au Parlement : simplification de la déclaration anticipée, suppression de sa durée de validité, limite à poser en ce qui concerne le bon usage de la clause de conscience, extension du champ d'application de la clause de conscience à des patients atteints de lésions cérébrales graves. Seule la question de l'extension de l'euthanasie aux mineurs a pu être concrétisée par une loi avant la fin de la législature, après avoir pu rassembler une majorité parlementaire, en dépit de la sensibilité de ce sujet. Il est vrai que des pédiatres sont venus témoigner devant le Sénat de l'existence de demandes d'euthanasie émanant d'enfants et de leur désarroi devant de telles situations, se trouvant devant le dilemme soit de respecter la parole de l'enfant et d'être hors-la-loi, soit de répondre à l'enfant que la chose n'était pas possible.Les Académies royales de Médecine s'étaient également penchées sur cette question et avaient rendu un avis favorable à la prise en compte de demandes d'enfants pour l'euthanasie.Tous ceux qui étaient en faveur de cette extension étaient cependant animés d'un seul espoir : qu'un minimum de demandes de mettre fin à la vie d'un enfant voit le jour. Le législateur a introduit des balises plus strictes pour l'euthanasie des enfants que pour celle des adultes. Le décès doit être prévisible à brève échéance, seules les situations somatiques sont prises en compte, la capacité de discernement de l'enfant doit être attestée par un pédopsychiatre ou un psychologue, les parents doivent donner leur consentement. Pour ce dernier point, j'aurais certes préféré une autre formulation : l'impossibilité de poursuivre une procédure d'euthanasie en cas d'opposition des parents. En effet, c'est mettre une terrible charge sur les parents que de leur imposer ce consentement alors qu'ils ont déjà dû traverser des moments très difficiles et qu'ils pourraient avoir le sentiment, en signant leur accord, de contribuer à la mort de leur enfant. Ce n'est bien évidemment pas le cas. Très souvent, les enfants peuvent trouver les mots pour que leurs parents acceptent que cet ultime traitement que l'on propose soit le traitement de trop, qu'ils sont fatigués, qu'ils n'en peuvent plus, qu'ils souhaiteraient s'endormir à jamais.À ceux qui s'étonnent de ce qu'il n'y a eu qu'une seule déclaration depuis 2014, donnant en quelque sorte l'impression de se plaindre de ce qu'il n'y a pas plus d'euthanasies d'enfants, je leur réponds qu'un des premiers bénéfices de cette loi est de permettre la liberté de parole. Aujourd'hui, lorsqu'un pédiatre, un spécialiste travaillant dans un hôpital pour enfants est confronté à une demande de mettre fin à la vie de son jeune patient, il peut évoquer avec lui et avec ses parents les possibilités de traitement, sans que ses paroles puissent être considérées comme un évitement de la question posée par l'enfant : m'aideras-tu lorsque je ne pourrai plus supporter la souffrance?Les soins palliatifs pédiatriques doivent encore être développés, principalement à domicile. Nous vivons dans un pays où il est possible d'évoquer et de travailler pour l'amélioration des soins palliatifs tout comme il est possible d'évoquer et de formuler une demande d'euthanasie. Un enfant de 10 ans, un adolescent de 17 ans, n'est pas immunisé contre les maladies incurables ni contre la souffrance. Il eût été inhumain de répondre à ces enfants : souffre en silence et attends si tu peux d'avoir 18 ans pour demander de sortir de tes souffrances.