...

Dans son comparatif si français et impossible à réaliser en Belgique en raison des réticences du monde hospitalier (spécial cliniques du 27/08/2019) l'hebdomadaire Le Point a interrogé le Dr Cédric Carbonneil chef du service d'évaluation des actes à l'HAS (Haute Autorité de santé) alors qu'on répertorie dans l'Hexagone 159 robots chirurgicaux installés dans 142 sites (69 privés et 73 publics lesquels ont mené 23.269 interventions en 2018).Malgré le succès ce 24 septembre des deux premières angioplasties coronaires avec l'assistance de la plateforme robotique R-One au CHU de Rouen et à la Clinique Pasteur de Toulouse, " en France comme chez nos homologues européens, nous n'arrivons pas à mettre en évidence, compte tenu de la faiblesse des données comparatives, le bénéfice pour le patient de la robot-chirurgie par rapport à la coeliochirurgie ", décrit le Dr Carbonneil.L'Assurance maladie française constate que " l'assistance robotique n'apporte pas le bénéfice démontré en termes de qualité et de sécurité des soins pour le patient " et " induit des coûts supplémentaires pour les établissements ".Dans un rapport datant de 2008 (104B) et caduque, le Centre fédéral belge d'expertise des soins de santé (KCE) recommandait de ne pas la rembourser de façon inconditionnelle étant donné qu'elle n'apportait pas de preuves suffisantes de ses avantages par rapport à la chirurgie traditionnelle. Il ressortait par ailleurs " que certains systèmes avaient été achetés plutôt pour des raisons de marketing : le robot est un signe que l'hôpital mène la course en tête en matière de technologie. "Les chirurgiens belges utilisateurs de cette technique sont en revanche souvent dithyrambiques. Une évaluation portant sur 600 opérations, sous la direction du Dr Hubert Nicolas, chef du service d'urologie du CHR de La Citadelle (Liège), constate que " la chirurgie avec le robot Da Vinci détrône la laparoscopie conventionnelle à son tour, dans de multiples indications pour lesquelles les opérations sont déjà parfaitement standardisées. Tous les domaines urologiques sont concernés : en particulier la prostatectomie radicale pour cancer mais aussi les néphrectomies totales et partielles, les cures de prolapsus, les corrections d'anomalies congénitales, le traitement de certaines lithiases, etc. "La vision en relief, particulièrement, combinée à un agrandissement de l'image " apporte un plus extraordinaire, difficilement descriptible ". Le rapport parle d'expérience extrêmement encourageante et " des résultats globalement excellents des points de vue fonctionnel et oncologique, avec confirmation du caractère mini-invasif pour la majorité des patients et avec absence de complications spécifiquement liées à l'utilisation du robot. " Moins fatigante, la chirurgie mini-invasive par laparoscopie offre au patient un confort accru : " perte sanguine moindre, suites opératoires allégées, nette diminution de la douleur, amélioration de la récupération fonctionnelle et convalescence raccourcie ".Le Dr Thierry Quackels, urologue à Erasme rappelle que son hôpital utilise un tel robot (à trois bras) depuis 2001, en urologie et en chirurgie cardiaque. En 2007, la version 4 bras est arrivée. En 2011, l'hôpital universitaire a acheté robot plus moderne. " Les principaux utilisateurs sont les urologues. On comptait environ 570 interventions par an. On l'utilise peu en cardiologie, en gynécologie de plus en plus. Un chirurgien hépatique a fait une hépatectomie au titre de première. " La chirurgie robotique représente aujourd'hui pas tout à fait 200 procédures par an.Que dire du fossé entre les autorités dubitatives et les chirurgiens relativement dithyrambiques ? " Cet outil procure une vision tridimensionnelle impressionnante tandis que la coelioscopie traditionnelle est en 2 D avec des instruments rigides. L'urologie a fortement pris le pli de la robotique surtout pour la prostatectomie radicale car la prostate se trouve dans l'arrière du bassin, difficile d'accès. Il y a des sutures à faire. On essaie de préserver la continence et les nerfs érecteurs. L'outil récupère la flexibilité distale et la vision 3 D. On est plongé 'dans' le patient alors qu'avec la coelioscopie traditionnelle, les bras tendent vers le bas et l'écran se trouve en haut. Le confort du chirurgien est indiscutable sur la précision. D'où l'engouement. Les chirurgiens faisaient de la laparoscopie avant et de la chirurgie ouverte encore auparavant. C'est donc très compliqué d'avoir des études comparatives randomisées. "Néanmoins, deux études ont été publiées en urologie : une étude australienne comparant l'ouverte à la robotique1. Elle porte sur environ 300 patients. Et une étude allemande de Markus Graefen2 sur 10.000 patients : 3.000 en ouverte et 7.000 en robotique. " On ne constate pas de différence en terme de récupération continence et de récupération d'érection bien que les patients récupèrent plus vite et qu'on constate moins de saignements post-opératoires et une diminution des durées d'hospitalisation. Il y a dix ans, en 'ouverte', un patient restait dix jours à l'hôpital. Aujourd'hui, il reste trois nuits. Bien entendu, on ne peut pas mettre cela seulement au crédit du robot mais bien de toute la technologie qui progresse à grande vitesse que ce soit l'imagerie ou d'autres processus de récupération rapide. Cependant, l'investissement machine est important (à partir de deux millions d'euros), plus 1.000 à 1.500 euros de matériel. In fine, cela coûte moins cher à l'assurance maladie puisqu'il y a moins de complications et d'hospitalisations. "La prostatectomie radicale par robot est donc la seule remboursée en Belgique actuellement 3. " Les conclusions d'une étude multicentrique belge auprès de 17 centres (KUL Bordet Erasme Alost Bruges) avec plus de 8.000 patients ont été remises à l'Inami en 2016. Aucune nouvelle. Le code Inami rapporte 1.000 euros, ce qui est insuffisant. Le solde est supporté par l'hôpital sans suppléments. "Une autre " très belle " indication pour le robot est la néphrectomie partielle. " A l'essor de la laparoscopie en 2000 en urologie, on recommandait la néphrectomie totale plutôt qu'enlever juste la petite tumeur. On s'est retrouvé comme en France avec une augmentation de la radicale plutôt que faire de la partielle ouverte qui était moins à la mode parce que la coelioscopie était compliquée. Donc, on refait la partielle grâce à la robotique car on suture beaucoup plus vite... On l'a rappelé en mars au congrès européen d'urologie. L'impact est positif. "Erasme a stimulé ses chirurgiens digestifs à l'utiliser " sur mesure ". Le Dr Quackels n'est cependant pas un apôtre du tout-robot. " Pour la néphrectomie totale, le robot n'a pas intérêt. Les clips permettent de contrôler les vaisseaux. Je serais moins fatigué avec le robot mais le rapport qualité-prix n'est pas intéressant. En ouverte, j'en fais encore. "Est-ce rentable de n'en faire que 200 par an ? Plus la machine est utilisée, meilleur est l'amortissement. Mais Erasme ne pousse ni à en faire plus ni à en faire moins... Quant à l'argument publicitaire, le CEO Johan Kipps estimerait inconcevable qu'Erasme n'ait pas de robot. Mais avec les réseaux hospitaliers, il ne faut plus quatre robots pour quelques chirurgiens. Il vaut mieux rentabiliser chaque machine au maximum. D'autant qu'aucun supplément d'honoraire n'est demandé. C'est la loi. " Le surcoût robotique est entièrement à charge de notre hôpital... "