Résumer en quelques mots le 7e rapport de la Commission fédérale de contrôle et d'évaluation de l'euthanasie - CFCEE - relève de la gageure. Afin de donner l'image la plus détaillée possible de la pratique de l'euthanasie telle qu'elle se dégage des déclarations reçues pour les années 2014-2015, la CFCEE s'est efforcée de compléter les éléments concernant les affections médicales à l'origine des demandes d'euthanasie, de répondre à des questions portant sur les souffrances et les patients psychiatriques ou encore la problématique des polypathologies en les illustrant par des extraits de déclarations.

Il est vivement conseillé de consulter l'intégralité de ce rapport qui est publié sur le site de la CFCEE (www.health.belgium.be/euthanasie).

1)Tendances à dégager de l'analyse de ce 7e rapport

Depuis 2002, le nombre de déclarations tend à croître sans cependant que l'on enregistre d'augmentation exponentielle. Le nombre de déclarations enregistrées en 2015, soit 2.022, reste inférieur à 2 % de l'ensemble des décès en Belgique. L'on note même un certain tassement de cette augmentation au cours des deux dernières années. Il n'est pas impossible qu'en 2016, le nombre de déclarations soit inférieur à 2.000.

Une constante : la proportion de déclarations rédigées en français et celles rédigées en néerlandais : 20 contre 80 alors que l'on aurait pu attendre une proportion de 40 contre 60 au regard de la population s'exprimant en français et en néerlandais.

En ce qui concerne l'âge des patients, 35,6 % des patients étaient âgés de plus de 79 ans, en ce compris des centenaires. Aucune déclaration ne concernait un mineur.

L'implication des soins palliatifs est également à relever dans le processus de demande d'euthanasie.

Pour le lieu de l'euthanasie, le domicile ou les MR et MRS interviennent pour plus de 56 %.

Seuls 15 % des euthanasies concernaient des décès non prévus à brève échéance et seulement 2 % sur base d'une déclaration anticipée.

2)La question de la polypathologie

Rappelons que pour qu'une demande d'euthanasie puisse être prise en considération, elle doit s'appuyer sur l'existence de souffrances physiques ou psychiques inapaisables résultant d'une affection médicale. Les trois conditions - demande, affection médicale, souffrances - interagissent et doivent par conséquent être examinées de manière conjointe. Le lien entre la dimension médicale et la souffrance est indispensable.

Le législateur n'a pas entendu donner une liste des pathologies qui peuvent être prises en considération. Dans certaines situations, plusieurs affections médicales peuvent coexister et c'est parfois la superposition de ces affections qui peut constituer le caractère grave ainsi qu'être à l'origine du caractère inapaisable des souffrances. Depuis que la Commission adopte la classification selon le modèle des codes ICD-10-CM, certains cas qui auparavant étaient classés dans la catégorie "cancer" ont été mutés dans la catégorie "polypathologie", dès lors qu'à côté de ce diagnostic figuraient également des troubles de la mobilité, de l'audition, de la vue, etc.

La polypathologie se manifeste clairement de manière plus fréquente pour les cas de patients âgés, avec la kyrielle des maux qui accompagnent le vieillissement. Mais la polypathologie peut également affecter un adulte jeune ou d'âge moyen. Pour rappel, la vieillesse même si d'aucuns l'ont qualifiée de naufrage (Chateaubriand avant de Gaulle) n'est pas en soi une maladie !

3)Patients psychiatriques

Comme l'a noté la Commission, le groupe des patients souffrant de troubles mentaux et du comportement ou affections psychiatriques (démence, psychoses irréductibles, hallucinations, troubles de l'humeur, troubles de la personnalité, autisme, ...) est très restreint, soit sur 2 ans 124 cas sur 3.950 euthanasies, représentant 3, 1 % des déclarations (page 36 du rapport).

Certes, les décisions en ces cas de patients atteints de troubles mentaux exigent des médecins confrontés à de telles demandes d'euthanasie encore plus de réflexion, de prudence que pour les patients souffrant de maladies somatiques. Il s'agit que le médecin et le patient aboutissent à la conclusion que tout a été essayé, qu'il n'y a plus de traitement, au sens large du terme, qui puisse être proposé.

Et il faut également souligner la confusion entretenue par d'aucuns entre souffrances psychiques et maladies psychiques : la souffrance psychique n'est nullement l'apanage des maladies mentales : très souvent, elle est ressentie par des patients atteints de maladies somatiques.

Il serait certainement utile que les professionnels de la santé mentale en Belgique étudient cette question et, à l'instar de leurs collègues néerlandaisformulent des protocoles qui pourraient aider à la décision les médecins traitants confrontés à des demandes d'euthanasie de patients psychiatriques.

4)Délai d'attente - temps de réflexion

Certainement pour les patients psychiatriques mais également pour tout patient atteint d'une affection qui ne provoquera pas le décès à brève échéance, la question du temps de réflexion et du délai d'attente prend toute sa dimension. Le législateur impose pour ces cas de respecter à tout le moins un mois entre la demande écrite d'euthanasie et l'acte lui-même. Le temps de réflexion est ce qui se passe en amont de la rédaction de la demande. Avant même d'exprimer une demande orale, le patient réfléchit à sa situation, à l'évolution de la maladie. Ce n'est qu'après un premier temps de réflexion que le patient va exprimer pour la première fois une demande d'euthanasie auprès de son médecin. Commence alors un autre temps de réflexion, réflexion partagée avec le médecin, avec éventuellement l'équipe médicale, avec les proches, avec aussi les médecins qui doivent être obligatoirement consultés. La loi impose également que la demande du patient soit non seulement volontaire et bien informée mais elle doit aussi être répétée, réitérée. Le médecin doit s'assurer de la persistance de cette demande. Autrement dit, ce type de décision est pris en son for intérieur et ensuite discuté avec des tiers mais n'est jamais pris à la légère. Dans le formulaire que doit remplir le médecin, il n'y a pas de case particulière pour ce temps de réflexion. Néanmoins, certains indices ont permis de relever que même le délai d'attente est très souvent largement supérieur au mois imposé par la loi.

Conclusion

Depuis l'entrée en vigueur de la loi, la Commission a enregistré plus de 14.000 déclarations d'euthanasie. Certes, la Commission relève dans ses conclusions, la nécessité de l'information et de la formation, l'utilité d'une étude transversale portant sur les décisions médicales en fin de vie. Une clarification des notions de sédation palliative, d'arrêt ou de décision de ne pas commencer un traitement, d'augmentation des doses de morphine avec pour intention première de lutter contre la douleur serait également utile, afin d'éviter les confusions avec l'euthanasie telle que définie par la loi.

Entretemps, notons également les quelques commentaires faits par les médecins en dehors des informations qu'ils doivent délivrer conformément à la loi. Très souvent, il est question d'une mort sereine, le patient étant entouré de ses proches et s'endormant un sourire aux lèvres. Il est aussi question de remerciements que le patient adresse à son médecin le jour choisi pour l'euthanasie, ainsi que de remerciements des proches par après. Aux médecins, je serais tentée de dire : "N'ayez pas peur. Vous allez connaître des moments très forts au point de vue émotionnel. Vous serez vous-même remis en question. Parfois, vous vous demandez quels moyens utiliser, quelle est la procédure à suivre ? N'hésitez pas à vous informer et à vous former pour ces questions de fin de vie".

Résumer en quelques mots le 7e rapport de la Commission fédérale de contrôle et d'évaluation de l'euthanasie - CFCEE - relève de la gageure. Afin de donner l'image la plus détaillée possible de la pratique de l'euthanasie telle qu'elle se dégage des déclarations reçues pour les années 2014-2015, la CFCEE s'est efforcée de compléter les éléments concernant les affections médicales à l'origine des demandes d'euthanasie, de répondre à des questions portant sur les souffrances et les patients psychiatriques ou encore la problématique des polypathologies en les illustrant par des extraits de déclarations.Il est vivement conseillé de consulter l'intégralité de ce rapport qui est publié sur le site de la CFCEE (www.health.belgium.be/euthanasie). Depuis 2002, le nombre de déclarations tend à croître sans cependant que l'on enregistre d'augmentation exponentielle. Le nombre de déclarations enregistrées en 2015, soit 2.022, reste inférieur à 2 % de l'ensemble des décès en Belgique. L'on note même un certain tassement de cette augmentation au cours des deux dernières années. Il n'est pas impossible qu'en 2016, le nombre de déclarations soit inférieur à 2.000.Une constante : la proportion de déclarations rédigées en français et celles rédigées en néerlandais : 20 contre 80 alors que l'on aurait pu attendre une proportion de 40 contre 60 au regard de la population s'exprimant en français et en néerlandais.En ce qui concerne l'âge des patients, 35,6 % des patients étaient âgés de plus de 79 ans, en ce compris des centenaires. Aucune déclaration ne concernait un mineur.L'implication des soins palliatifs est également à relever dans le processus de demande d'euthanasie.Pour le lieu de l'euthanasie, le domicile ou les MR et MRS interviennent pour plus de 56 %.Seuls 15 % des euthanasies concernaient des décès non prévus à brève échéance et seulement 2 % sur base d'une déclaration anticipée. Rappelons que pour qu'une demande d'euthanasie puisse être prise en considération, elle doit s'appuyer sur l'existence de souffrances physiques ou psychiques inapaisables résultant d'une affection médicale. Les trois conditions - demande, affection médicale, souffrances - interagissent et doivent par conséquent être examinées de manière conjointe. Le lien entre la dimension médicale et la souffrance est indispensable.Le législateur n'a pas entendu donner une liste des pathologies qui peuvent être prises en considération. Dans certaines situations, plusieurs affections médicales peuvent coexister et c'est parfois la superposition de ces affections qui peut constituer le caractère grave ainsi qu'être à l'origine du caractère inapaisable des souffrances. Depuis que la Commission adopte la classification selon le modèle des codes ICD-10-CM, certains cas qui auparavant étaient classés dans la catégorie "cancer" ont été mutés dans la catégorie "polypathologie", dès lors qu'à côté de ce diagnostic figuraient également des troubles de la mobilité, de l'audition, de la vue, etc.La polypathologie se manifeste clairement de manière plus fréquente pour les cas de patients âgés, avec la kyrielle des maux qui accompagnent le vieillissement. Mais la polypathologie peut également affecter un adulte jeune ou d'âge moyen. Pour rappel, la vieillesse même si d'aucuns l'ont qualifiée de naufrage (Chateaubriand avant de Gaulle) n'est pas en soi une maladie !Comme l'a noté la Commission, le groupe des patients souffrant de troubles mentaux et du comportement ou affections psychiatriques (démence, psychoses irréductibles, hallucinations, troubles de l'humeur, troubles de la personnalité, autisme, ...) est très restreint, soit sur 2 ans 124 cas sur 3.950 euthanasies, représentant 3, 1 % des déclarations (page 36 du rapport). Certes, les décisions en ces cas de patients atteints de troubles mentaux exigent des médecins confrontés à de telles demandes d'euthanasie encore plus de réflexion, de prudence que pour les patients souffrant de maladies somatiques. Il s'agit que le médecin et le patient aboutissent à la conclusion que tout a été essayé, qu'il n'y a plus de traitement, au sens large du terme, qui puisse être proposé.Et il faut également souligner la confusion entretenue par d'aucuns entre souffrances psychiques et maladies psychiques : la souffrance psychique n'est nullement l'apanage des maladies mentales : très souvent, elle est ressentie par des patients atteints de maladies somatiques.Il serait certainement utile que les professionnels de la santé mentale en Belgique étudient cette question et, à l'instar de leurs collègues néerlandaisformulent des protocoles qui pourraient aider à la décision les médecins traitants confrontés à des demandes d'euthanasie de patients psychiatriques.Certainement pour les patients psychiatriques mais également pour tout patient atteint d'une affection qui ne provoquera pas le décès à brève échéance, la question du temps de réflexion et du délai d'attente prend toute sa dimension. Le législateur impose pour ces cas de respecter à tout le moins un mois entre la demande écrite d'euthanasie et l'acte lui-même. Le temps de réflexion est ce qui se passe en amont de la rédaction de la demande. Avant même d'exprimer une demande orale, le patient réfléchit à sa situation, à l'évolution de la maladie. Ce n'est qu'après un premier temps de réflexion que le patient va exprimer pour la première fois une demande d'euthanasie auprès de son médecin. Commence alors un autre temps de réflexion, réflexion partagée avec le médecin, avec éventuellement l'équipe médicale, avec les proches, avec aussi les médecins qui doivent être obligatoirement consultés. La loi impose également que la demande du patient soit non seulement volontaire et bien informée mais elle doit aussi être répétée, réitérée. Le médecin doit s'assurer de la persistance de cette demande. Autrement dit, ce type de décision est pris en son for intérieur et ensuite discuté avec des tiers mais n'est jamais pris à la légère. Dans le formulaire que doit remplir le médecin, il n'y a pas de case particulière pour ce temps de réflexion. Néanmoins, certains indices ont permis de relever que même le délai d'attente est très souvent largement supérieur au mois imposé par la loi.Depuis l'entrée en vigueur de la loi, la Commission a enregistré plus de 14.000 déclarations d'euthanasie. Certes, la Commission relève dans ses conclusions, la nécessité de l'information et de la formation, l'utilité d'une étude transversale portant sur les décisions médicales en fin de vie. Une clarification des notions de sédation palliative, d'arrêt ou de décision de ne pas commencer un traitement, d'augmentation des doses de morphine avec pour intention première de lutter contre la douleur serait également utile, afin d'éviter les confusions avec l'euthanasie telle que définie par la loi.Entretemps, notons également les quelques commentaires faits par les médecins en dehors des informations qu'ils doivent délivrer conformément à la loi. Très souvent, il est question d'une mort sereine, le patient étant entouré de ses proches et s'endormant un sourire aux lèvres. Il est aussi question de remerciements que le patient adresse à son médecin le jour choisi pour l'euthanasie, ainsi que de remerciements des proches par après. Aux médecins, je serais tentée de dire : "N'ayez pas peur. Vous allez connaître des moments très forts au point de vue émotionnel. Vous serez vous-même remis en question. Parfois, vous vous demandez quels moyens utiliser, quelle est la procédure à suivre ? N'hésitez pas à vous informer et à vous former pour ces questions de fin de vie".