...

CinémaChevauchant dans les steppes et le désert du Kirghizistan en compagnie de son fils Samuel, Sibylle espère renouer avec ce fils mutique et violent qui sait murmurer à l'oreille des chevaux, mais ne sait parler à sa mère qu'en la rudoyant ou la moquant. Une génitrice qui l'a abandonné très tôt à son père et laissé aux bons soins de son grand-père maternel qui lui a transmis l'amour de l'équitation. D'abord fermé et plein de colère rentrée, le jeune cheval fou commence, face aux embûches, aux mauvaises rencontres, bref aux épreuves communes, à accepter de se rapprocher de sa mère. Peu à peu, le désert affectif voit reverdir un paysage où les sentiments réciproques semblent à nouveau éclore: les corps se rapprochent, les gestes se font plus tactiles...Après le brillant L'économie du couple, Joachim Lafosse prétend avoir voulu quitter les espaces confinés pour filmer dans des grands espaces et en décors naturels : mais rien à faire, ce cinéaste des encoignures ne parvient finalement qu'à tourner un huis-clos au grand air, huis-clos que ce grand amoureux du total contrôle ne parvient pas à complètement maîtriser. Le film prend du temps à s'installer, dans un découpage bizarrement trop rapide dans l'introduction; le déroulement de l'intrigue se révèle assez attendu dans cette histoire de dressage mutuel entre une mère et son fils, adaptation du roman de Laurent Mauvignier. Dans ce western affectif, le duel à coup d'iPhone pour l'un, et de journal intime pour l'autre, se joue une fois encore chez Lafosse, non pas sur fond de suspens, mais de tension, substantifique moelle de son cinéma. Continuer n'est pas un mauvais film (la scène du ferrage des chevaux est par exemple très émouvante), mais trop éclaté, pas assez sous contrôle justement : car les rapports humains délétères entre personnages, qui sont chers au réalisateur, se délitent justement dans l'immensité du désert, semblent emporter par le vent qui galope sur les champs de pierre. Le paysage est d'ailleurs très convaincant, tout comme Virginie Efira en mauvaise mère prise de remords, ou Kacey Mottet Klein, sosie de Jean-Pierre Papin, dans le rôle du vieil adolescent buté et prisonnier de ses émotions rentrées qu'il ne peut exprimer que sous forme d'une méchante brutalité.Quant aux deux chevaux, ils jouent parfaitement leur rôle : avec un bémol, pour celui de Virginie Efira . Aussi blanc qu'elle n'est blonde, il avance dans le désert avec des précautions de ballerine. Sans doute, à force de concours, un dressage trop réussi....Au final, ce Lafosse laisse sceptique.