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Dr Etienne De Braekeleer : " Dans nos recherches pour de nouvelles cibles, nous avons eu recours à la technique CRISPR-cas9 qui permet d'interroger le génome des cellules. En effet, en étudiant le génome de cellules cancéreuses et celui de cellules normales, il devient possible de repérer d'une part les gènes essentiels pour leur survie et leur prolifération ou pour le développement de résistances chez les cellules cancéreuses, et d'autre part les gènes qui n'interviennent pas ou très peu dans la survie des cellules normales. Une fois ces gènes répertoriés, le travail consiste à vérifier les hypothèses sur des modèles animaux puis à voir s'il existe dans la pharmacopée des substances qui pourraient être utilisées dans ce contexte ou s'il est envisageable d'en développer.Ainsi, il y a deux ans, nous avons publié un article dans lequel nous montrions qu'un agent développé pour limiter la néo-angiogenèse rétinienne pouvait s'avérer utile pour le traitement des LMA. Et cela du fait de son action sur le gène SRPK1qui intervient dans la régulation de la production du facteur de croissance de l'endothélium vasculaire de type A (VEGF-A).En ce qui concerne les LLA, le travail que j'ai présenté ici à Amsterdam concernait essentiellement les formes à cellules T avec mutation du gène NOTCH1. Dans ce sous-groupe qui représente environ 60% de la totalité des LLA, nous avons pu montrer que le gène NADK était essentiel pour en quelque sorte 'détoxifier' les cellules cancéreuses et leur permettre de survivre. En effet, les LLA à cellules T sont très agressives et prolifèrent très rapidement, raison pour laquelle elles ont besoin d'un système de détoxification particulièrement performant pour éviter l'accumulation des dérivés réactifs de l'oxygène tels que les radicaux libres, liés à leur intense activité métabolique.L'idée était donc de bloquer ce gène détoxifiant afin de faire mourir spécifiquement les cellules cancéreuses tout en préservant les cellules normales. Ces dernières n'ayant pas d'activité métabolique particulièrement intense sont en fait très peu sensibles au blocage de NADK et en tout cas peuvent facilement compenser les effets de son blocage.C'est ce que nous avons montré chez la souris : l'inhibition génétique ou pharmacologique de NADK diminue fortement la prolifération des cellules cancéreuses et augmente la survie des souris sans effets secondaires notables, ce qui plaide pour le développement de puissants inhibiteurs de NADK avec l'ambition de traiter les LAL à cellules T de façon plus efficace et plus sûre. "