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Voici typiquement le genre de cas qui doit toujours être discuté en concertation multidisciplinaire! Et pour cause: actuellement, aucune étude randomisée ne permet de déterminer, à coup sûr, la meilleure stratégie thérapeutique pour tous les patients N2. D'après la métanalyse Auperin (JCO 2010), la chimio-radiothérapie (C-RT) concomitante est le " golden standard ", mais le rôle de la chirurgie reste fort débattu. Quand et comment doit-elle être envisagée? Quels bénéfices attendre des traitements adjuvants? L'approche multimodale (C-RT suivie, 3 à 5 semaines plus tard, d'une chirurgie) est-elle la panacée? En cas de chirurgie, une chose est sûre: " La résection doit être complète (R0) ", souligne le Pr Paul Van Schil (professeur en chirurgie vasculaire et thoracique - UZAnvers). " Pour pouvoir parler de R0, il ne doit d'abord rester aucune trace tumorale au niveau macroscopique et toutes les marges de résection doivent être saines au niveau microscopique. De plus - et c'est très important - , le chirurgien doit aussi avoir effectué une dissection ganglionnaire et enlevé six stations, dont la station 7 sous-carénaire. Enfin, le ganglion médiastinal le plus haut ne doit pas être atteint, ce qui n'est pas facile à évaluer avant l'intervention. "Sur papier, la définition semble claire, mais dans la pratique, les résections considérées comme complètes ne le sont pas tant que ça. En examinant environ 14 700 cas issus de la banque de données de l' International Association for the Study of Lung Cancer, plus de la moitié (56%) des R0 ont été reclassées en résections incertaines (Run). Soit parce que les stations n'avaient pas été enlevées, soit parce que les ganglions médiastinaux les plus hauts étaient finalement envahis. " Les conséquences sont loin d'être anodines: en cas de ganglions positifs, on note une différence de 20 mois dans la survie médiane par rapport aux R0 ", souligne le Pr Van Schil. Outre la C-RT d'induction, le Pr Paul Van Houtte (radiothérapeute, Institut Jules Bordet) a rappelé et commenté trois autres possibilités: la C-RT exclusive, la radiothérapie (RT) postchirurgicale ou la RT seule. " La population des patients N2 est hétérogène et tous ne sont pas opérables. À cet égard, l'essai RTOG (Bradley et al., JCO 2020) constitue un pivot: il démontre - étonnamment! - que la dose à 60 Gy produit de meilleurs résultats que 76 Gy, avec un taux de survie à cinq ans de 32% vs 23%. " La RT postopératoire fait quant à elle l'objet d'une véritable saga scientifique. Or, il semblerait que le débat soit en passe d'être tranché une bonne fois pour toutes. En effet, Cécile Lepéchoux a présenté à l'ESMO les résultats de l'étude LungART. " J'attends de pouvoir lire l'étude dans le détail ", commente le Pr Van Houtte. " Mais elle indique clairement que la RT postopératoire n'apporte pas de bénéfice aux patients ayant bénéficié d'une résection de qualité. "Reste la question: la RT peut-elle challenger la chirurgie? À l'heure actuelle, aucune étude randomisée n'a permis d'établir la supériorité d'une option sur l'autre. Certes, il y a des critères: la "résécabilité", bien sûr, mais aussi le nombre de stations et de zones concernées. "Cependant, il n'y a pas consensus. En ce qui me concerne, le volume tumoral et les séquelles à long terme sont des critères à considérer. La chirurgie peut être privilégiée si une R0 est possible, y compris pour une T4. Pour une RT seule, il faut une dose supérieure à 65 Gy et une technique adéquate. Mais en général, je suis plutôt en faveur du traitement multimodal... et du nécessaire travail d'équipe qui l'accompagne."Pour terminer, le Dr Christophe Compère (pneumo-oncologue - CHIREC) a fait le point sur la chimiothérapie. Le schéma est généralement1 basé sur le cisplatine. Mais avec quel type de médicaments l'associer? " Difficile d'avoir un avis tranché sur la question. Les Américains privilégient soit l'association cisplatine-étoposide, soit carbo-taxol. En Europe, le schéma le plus répandu associe cisplatine et navelbine. La tolérance est bonne et il y a moins d'oesophagites qu'avec l'étoposide. " En traitements adjuvants et de consolidation, il y a bien sûr l'immunothérapie. Plusieurs molécules ont été testées dans les NSCLC de stade III, mais c'est l'étude PACIFIC sur le durvalumab (NEJM 2017) qui a remporté la première palme. " La dernière mise à jour des résultats, en septembre, montre une survie globale (OS) médiane de 4 ans (contre 2,5 ans dans le bras placébo) ", précise le Dr Compère. " Notons également l'étude de phase II du groupe Hoosier sur le pembrolizumab (présentée en juillet dernier) qui s'avère très encourageante puisque l'OS médiane observée est de 35,8 mois. "