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Pour empêcher cela 2 options sont possibles, utiliser des TKI (imatinib, nilotinib, dasatinib, ponatinib ou bosutinib) qui bloquent l'activité tyrosine-kinase en entrant en compétition avec l'ATP au niveau de ses sites de liaison sur la kinase ou utiliser l'asciminib qui se fixe dans la poche myristoyl de l'ABL induisant ainsi une modification de la conformation de BCR-ABL1 qui la rend inefficace (inhibition allostérique). L'asciminib (ASCI) est le premier représentant de la classe des inhibiteurs STAMP (Specifically Targeting the ABL Myristoyl Pocket). Les résultats encourageants observés lors d'une étude de phase 1 ont conduit à l'étude multicentrique internationale de phase 3 ASCEMBL dont les résultats ont été communiqués par Andreas Hochhaus, Jena, Allemagne, lors de la session late breaking abstract de l'ASH virtuel 2020.EfficacitéAu total 233 patients avec une LMC Ph+ en phase chronique préalablement traités par ≥2 TKI, ont été répartis par randomisation 2:1 vers un bras ASCI 40mgx2/j (n=157) ou un bras bosutinib (BOS) 500mg/j (n=76). Le critère principal de jugement était le taux de réponse moléculaire majeure après 24 semaines de traitement. Dans le cadre d'un suivi médian de 14,9 mois, ce taux était quasiment deux fois plus élevé dans le bras ASCI (25,5% vs 13,2%) et il en était de même pour des degrés plus profonds de réponse moléculaire (MR4 10,8% vs 5,3% et MR4,5 8,9% vs 1,3%). A la date de l'analyse (25 mai 2020) il y avait environ 2 fois plus de sujets ayant interrompu le traitement dans le bras BOS que dans le bras ASCI (69,7% vs 37,6%), les deux principales raisons d'arrêt étant l'inefficacité et la tolérance, respectivement 31,6% et 21,1% dans le bras BOS vs 21,0% et 5,1% dans le bras ASCI. ToléranceL'ASCI est un inhibiteur très spécifique de BCR-ALB1, ce qui signifie qu'il n'a pas d'action sur d'autres voies de signalisation ou protéines qui sont justement responsables des principaux effets secondaires (ES) des TKI classiques. Cette haute spécificité de l'ASCI faisait espérer un meilleur profil de tolérance, ce qui fut constaté dans l'étude de phase 1 et se trouve conforté dans ASCEMBL.Il a été observé un peu plus de thrombopénie et de neutropénie de grade ≥3 avec l'ASCI qu'avec le BOS (respectivement 17% et 15% vs 7% et 12%), elles étaient le plus souvent transitoires et gérables par une diminution de dose ou une interruption temporaire du traitement.Les principaux ES dans le bras BOS étaient, comme anticipés, des manifestations gastro-intestinales (diarrhée, nausées, vomissements et élévation des enzymes hépatiques), le plus souvent assez facilement gérables. Globalement il y a eu dans le bras BOS plus d'ES de grade ≥3 nécessitant un arrêt définitif du traitement (16% vs 5%) ou une réduction/arrêt temporaire (49% vs 34%). Au finalDe tout cela il est conclu, à juste titre, que dans cette étude randomisée contrôlée l'ASCI démontre par rapport au BOS une supériorité d'efficacité statistiquement significative et un profil de sécurité favorable, ce qui en fait une nouvelle option de traitement. D'accord, mais il est en revanche, à ce stade, surprenant de lire que ces résultats sont cliniquement pertinents et que soit suggéré une extension de cette option à d'autres types de patients. Certes la très forte spécificité de l'ASCI pour BCR-ABL et le rôle important de cette protéine en matière de prolifération dans les LMC, peuvent laisser supposer qu'une utilisation plus précoce pourrait être envisagée et pourrait même engendrer des résultats encore meilleurs, mais cela n'est pas démontré.Par ailleurs cela serait-il opportun? Pour mémoire dans la très grande majorité des cas les malades répondent très bien aux TKI (y compris à une nouvelle molécule après échec d'un premier agent) et nous ne disposons pas de données de qualité de vie. Restons donc scientifique et soulignons que les résultats d'ASCEMBL montrent que l'ASCI est une excellente approche de sauvetage en troisième ligne, ce qui est déjà beaucoup et pour le reste attendons confirmation des études en cours ou planifiées concernant une éventuelle place en première ligne en monothérapie ou en combinaison avec des TKI classiques.