...

Le Pr Yves Jacquemyn, chef du service de Gynécologie-Obstétrique de l'UZA, donne des indications utiles pour la prise en charge de ces quatre urgences. Il souligne le rôle prépondérant de l'échographie vaginale dans la mise au point des urgences gynécologiques. Il indique également que de nombreuses découvertes gynécologiques, telles qu'un kyste ovarien dans le cas d'un abdomen aigu, sont purement fortuites et ne sont pas à l'origine du tableau clinique. "Nous devrions toujours avoir une vision globale de la situation et être particulièrement vigilants pour les cas qui peuvent causer des dommages irréversibles", ajoute-t-il. En cas de torsion ovarienne, une douleur écrasante dans le bas du ventre (généralement unilatérale) survient de manière très aiguë, généralement accompagnée de nausées. Souvent, l'anamnèse révèle qu'il y a eu de brefs épisodes de douleur au cours des jours ou des semaines précédentes, souvent après un mouvement brusque initial. L'examen de l'abdomen révèle une légère sensibilité, sans défense musculaire. Lors du toucher vaginal, le médecin trouve une zone extrêmement douloureuse à gauche ou à droite de l'utérus, parfois accompagnée d'une masse souple. Les analyses sanguines sont strictement normales dans les premières heures, sans élévation des leucocytes, de la CRP ou des tests hépatiques, ce qui peut aider à faire la différence avec une inflammation de l'appendice. "Il est important de penser à la torsion ovarienne parmi les suppositions prioritaires", commence le Pr Jacquemyn. "Nous n'avons que quelques heures pour sauver chirurgicalement l'ovaire. Il arrive régulièrement qu'après une échographie abdominale négative, une patiente soit renvoyée chez elle avec des analgésiques. Si, le lendemain, nous trouvons un ovaire tordu, cette femme a définitivement perdu la moitié de son potentiel reproductif", prévient-il. Un gynécologue aide à juger si une laparoscopie immédiate est appropriée. Le diagnostic se fait par écho vaginale, qui montre un ovaire hypertrophié, souvent accompagné d'un kyste non connu auparavant. Le Doppler en couleur montre un flux sanguin réduit (mais pas nécessairement absent! ) dans l'ovaire. Il n'y a pas de liquide libre dans l'abdomen - s'il y en a, il peut s'agir d'une hémorragie de corps jaune. "En gynécologie, l'écho vaginale est généralement la plus sensible et la plus spécifique, et les CT-scans sont pratiquement inutiles. Le CT-scan ne visualise pas bien notre pathologie, ce qui conduit principalement à des faux positifs et des faux négatifs". La MIP se manifeste par une douleur vague dans le bas ventre, progressivement croissante et localisée de manière diffuse. Certaines personnes présentent un malaise général ou une légère élévation de la température. On observe de temps en temps une suppuration vaginale. L'examen de l'abdomen peut révéler une défense, encore qu'elle ne montre généralement qu'une douleur diffuse à la pression. Au toucher vaginal, la douleur pendulaire, lors du déplacement du col de l'utérus, est tout à fait typique. "Dans l'anamnèse, nous trouvons rarement quelque chose de spécifique", commente le Pr Jacquemyn. "Il faut bien sûr s'enquérir des interventions gynécologiques récentes, comme la pose d'un stérilet, et de la possibilité d'une IST." La plupart des femmes atteintes de MIP consultent leur médecin généraliste avec une sensation de malaise modéré. "Ce qui n'empêche qu'il s'agit clairement d'une urgence [1]. L'échographie est à nouveau importante, notamment pour détecter un abcès tubo-ovarien. Il est également possible que l'écho soit parfaitement normale. Le scanner et l'IRM sont très aspécifiques et la laparoscopie n'est pas non plus indiquée", précise le Pr Jacquemyn. "Pour une fois, en cas de forte suspicion clinique, il faut commencer immédiatement des antibiotiques. Même dans le cas d'un abcès, nous allons d'abord 'refroidir' avec une antibiothérapie et seulement ensuite drainer." Faites d'abord les cultures nécessaires et réalisez les tests pour la chlamydia, la gonorrhée et le mycoplasme génital. Commencez immédiatement des antibiotiques empiriques pendant 14 jours (que vous pourrez ajuster en fonction des résultats de la culture) et faites faire une échographie dans les 48 heures. "Les stérilets sont laissés en place. Si les antibiotiques ne font pas effet après deux jours - la clinique, la CRP et la numération leucocytaire doivent s'améliorer -, le spécialiste décide de la suite des opérations", indique Yves Jacquemyn. "Le fait que le médicament de premier choix recommandé au niveau international, l'ofloxacine (Tarivid®, ait disparu du marché belge depuis octobre 2023, n'est pas sans importance pour le traitement. Les alternatives équivalentes sont la lévofloxacine ou la ciprofloxacine, que l'on associe au métronidazole pour couvrir les germes anaérobie." Nous connaissons tous le dicton "Toute femme est enceinte jusqu'à preuve du contraire." Or, jusqu'à preuve du contraire, toute grossesse est également ectopique. Il s'agit d'une situation potentiellement mortelle. La femme se présente avec des douleurs abdominales intenses, avec ou sans saignements vaginaux et avec un retard de règles. Les facteurs de risque comprennent une MIP ou une infection à chlamydia antérieure, ou une grossesse induite par recours à la PMA. "Commencez par un test de grossesse urinaire, suivi d'un dosage sérique de l'hCG. Poser le diagnostic est urgent. La prise en charge des GEU n'est pas toujours évidente." Le Pr Jacquemyn explique: "Pour la première ligne surtout, le seuil de 1.500 UI/L de hCG est très utile. À partir de cette valeur, l'écho transvaginale devrait permettre de voir le sac amniotique ou la masse ectopique. Si le taux de hCG est inférieur à 1.500, il arrivera souvent que vous ne voyiez rien à l'écho. Dans ce cas, il ne faut pas référer immédiatement, mais effectuer une nouvelle prise de sang deux jours plus tard. Le suivi de ces femmes en ambulatoire ne comporte aucun risque", souligne le spécialiste. "Une GEU accompagnée d'une hCG à 1.400 ne provoque pas de rupture." Dans ce cas, l'attitude à suivre sera déterminée par l'évolution à 48 heures de la concentration sérique d'hCG: - Si le taux d'hCG a baissé d'un cinquième ou plus, il s'agit d'une grossesse non vitale. L'imagerie est alors facultative. Continuez toutefois à surveiller le taux de hCG toutes les 48 heures. "Les fausses couches précoces et les GEU très précoces peuvent être parfaitement prises en charge par le médecin généraliste lui-même", note le Pr Jacquemyn. - Si la hCG a augmenté de plus de la moitié, il y a de fortes chances qu'il s'agisse d'une grossesse intra-utérine qui évolue normalement. Pour pouvoir arrêter le contrôle de l'hCG, il faut avoir observé à l'écho le sac amniotique, à l'intérieur de l'utérus. - Si le taux d'hCG a augmenté de moins de 50% mais n'a pas baissé de 20% non plus, la probabilité d'une GEU est élevée. Une nouvelle écho et un approfondissement de la mise au point (au niveau de la deuxième ligne) s'imposent. En cas de taux d'hCG négatif, il faut envisager les deux urgences précédentes décrites, une hémorragie du corps jaune (qui peut également provoquer des saignements vaginaux), un myome nécrosant, une appendicite aiguë et une néphrolithiase. "Vous pouvez toujours traiter la douleur avec un AINS, à condition de chercher à préciser le diagnostic. En ce qui concerne le suivi de première ligne d'une GEU, il est crucial de surveiller de près l'évolution des taux d'hCG lors des grossesses ultérieures", ajoute-t-il. Les saignements vaginaux soudains et abondants surviennent généralement à l'âge de la procréation. Dans ce cas, "PALM COEIN" est un rappel utile pour le diagnostic différentiel des saignements utérins anormaux: - Les polypes, l'adénomyose, le léiomyome et les tumeurs malignes/hyperplasies constituent les anomalies anatomiques ou organiques possibles ; - Les causes non structurelles sont les suivantes: coagulopathies, troubles de l'ovulation, endométriose, causes iatrogènes (saignements intermittents sous pilule) et causes "non encore classées". Les saignements vaginaux aigus peuvent également survenir avant la puberté [2] et après la ménopause. Dans ce dernier cas, il faut toujours référer. "Dans 80% des cas, il s'agit d'un saignement atrophique inoffensif. Dans les 20% restants, il s'agit de polypes, voire d'hyperplasies malignes", explique le Pr Jacquemyn. "Là encore, l'écho vaginale, avec ou sans biopsie, permettra de poser le diagnostic. Mais cette échographie peut parfaitement attendre quelques jours." Quelle que soit l'étiologie (bénigne ou maligne), il est possible d'arrêter des saignements vaginaux abondants avec des contraceptifs oraux à forte dose et à court terme. "Prescrivez une pilule combinée contenant 30 µg d'éthinylestradiol, trois fois par jour, pendant sept jours [3]. Dans les 48 heures, les saignements s'arrêtent. Cela permet de programmer l'échographie en toute sécurité", souligne le Pr Jacquemyn. Bien sûr, cela ne s'applique pas aux femmes dont les paramètres ne sont pas stables ou qui n'aiment pas l'idée de continuer à saigner peut-être deux jours de plus. En cas de contre-indication à la pilule, il faut également référer immédiatement. "Dans ce cas, il ne faut surtout pas donner une mini-pilule. La progestérone sans oestrogène aggrave parfois les saignements."