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En réalité, il n'existe plus de doutes quant au lien de causalité entre le cholestérol LDL et les maladies cardiovasculaires, compte tenu des données épidémiologiques et de l'expérience que l'on a avec les statines. " Mais aujourd'hui, différentes molécules ont accumulé les preuves qu'une réduction du LDL dans une certaine mesure est associée à un bénéfice pour le patient. C'est ce qu'ont montré les études IMPROVE-IT avec ézétimibe, REVEAL avec l'anacetrapib et FOURIER avec l'inhibiteur de PCSK9, l'évolocumab. Des données génétiques montrent de plus que toutes les variantes génétiques qui provoquent une élévation du taux de LDL sont associées à plus de maladies cardiovasculaires. "D'un autre côté, toutes les thérapies qui réduisent le taux de HDL-C n'ont pas réussi à mettre en évidence un bénéfice clinique clair. C'est le défi de la randomisa-tion mendélienne : le fait que les individus reçoivent des gènes au hasard induisant des taux plus ou moins élevés de HDL-C sans différence en termes d'événements cliniques est un argument important pour affirmer que le HDL-C ne constitue pas un facteur de risque causal des maladies cardiovasculaires. Il reste néanmoins utile comme marqueur du risque cardiovasculaire." Nous n'avons pas encore d'arguments solides pour affirmer que l'abaissement des triglycérides (TG) provoque moins de maladies cardiovasculaires. Les TG sont considérés comme des marqueurs purement pratiques du risque métabolique, en particulier du diabète. "La Société européenne de Cardiologie et l'Association of Lab Medicine ont déclaré dans une déclaration commune qu'une simple prise de sang n'est plus nécessaire pour le LDL-C chez la grande majorité des gens. Ce n'est qu'en cas d'obésité morbide ou de diabète de type 2 que l'intérêt d'une prise de sang persiste. C'est parce que les TG post-prandiaux peuvent augmenter de manière significative, que la valeur de LDL-C calculée peut être faussement faible (formule de Friedewald).Actuellement, le risque, cardiovasculaire global du patient est évalué avant toute intervention thérapeutique. Chez les patients présentant un risque cardiovasculaire élevé, la valeur cible du cholestérol LDL est soit de <100 mg>" Pour atteindre ces valeurs, dans la majorité des cas, nous devons utiliser des médicaments. En Belgique, le cholestérol LDL moyen est de 130 mg/ml ; aussi en cas de risque cardiovasculaire, une réduction moyenne de 30 % est nécessaire, ce qui ne peut généralement pas être obtenu avec des interventions liées au mode de vie. En cas de risque très élevé, presque tout le monde devrait commencer avec des médicaments. "Dans les récentes recommandations, le " soit-soit " est remplacé par " et/ou " : les valeurs cibles sont donc <100 mg>" C'est parce que le bénéfice et la protection individuelle sont liés au niveau et à l'ampleur de la baisse du LDL-C, et pas seulement de la valeur cible en tant que telle. Si un patient à haut risque voit son LDL passer de 106 à 99 mg/dl, certes il atteint la valeur cible, mais cette baisse de LDL-C est trop faible, puisque nous devons atteindre une diminution de 50 %. "" Malgré la quantité de preuves convaincantes que les hypolipémiants sont efficaces - ils permettent d'atteindre facilement une réduction de 50 % du LDL-C, ce qui réduit de 30 à 35 % le risque de maladies cardiovasculaires - on assiste à une phobie des statines répandue dans la population. Au Royaume-Uni, il a été montré que beaucoup de gens cessent d'utiliser leur statine après une vague de communiqués de presse négatifs. " Cette phobie est principalement liée la perception de la douleur musculaire. " La douleur musculaire présente un important effet nocebo : les gens qui prennent des médicaments qui causent des douleurs musculaires sont plus conscients de leur corps et l'effet nocebo peut être plus marqué. " Des études d'observation montrent en effet que 10 à 20 % des gens se plaignent de douleurs, tandis que dans les essais randomisés en double aveugle, la différence entre le bras actif et le placebo n'est seulement que 1 % supplémentaire dans le bras actif. " C'est ce qu'a confirmé cette année l'étude ASCOT-LLA : dans la phase en double aveugle, il n'y avait pas plus de douleur musculaire dans le groupe statines que dans le groupe placebo, mais dans une étude de suivi sur les mêmes patients, 40 % de patients supplémentaires se plaignaient de douleurs musculaires avec la même molécule, à la même dose. "Pendant ce temps, trois nouveaux traitements pour réduire le LDL ont fait mieux qu'une statine, avec une réduction plus importante du LDL-C et une réduction supplémentaire possible du risque de maladies cardiovasculaires : l'ézétimibe, les inhibiteurs de PCSK9 évolocumab et ali-rocumab, et l'anacetrapib, avec un profil de sécurité similaire à celui du placebo pour l'ézétimibe et pour les inhibiteurs de la PCSK9. " Avec l'ézétimibe, nous atteignons 15 à 20 % de diminution supplémentaire du LDL-C, mais les inhibiteurs de PCSK9 (en injection sous-cutanée 1x/2 semaines) donnent facilement 50 % au moins de réduction supplémentaire du LDL-C. Ils sont plus chers, mais pour une population de patients atteints d'hypercholestérolémie familiale (FH), les inhibiteurs PCSK9 représentent un progrès, une étape importante. Les inhibiteurs de PCSK9 ont connu un succès improbable de la science moderne : seulement 10 ans après la découverte des mécanismes, il a été possible d'en tirer une nouvelle thérapie. C'est sans précédent. Il s'agit d'anticorps monoclonaux humains contre la protéine PCSK9 dont le seul but est de perturber le récepteur LDL. Dans les études, des niveaux de LDL incroyablement bas ont été atteints, à moins de 15 mg/dl, sans prix à payer pour l'instant, et avec une protection cardiovasculaire plus importante. "Toutes les statines réduisent également la mortalité avec un gain de 20 % de mortalité cardiovasculaire, et 13 % de mortalité totale. Les études IMPROVE-IT, REVEAL et FOURIER mettent aussi en évidence une réduction supplémentaire du LDL-C avec les statines, et un impact sur la morbidité cardiovasculaire, mais sans effet sur la mortalité. Mais ceci est, selon le Pr Rietzschel, moins pertinent d'un point de vue clinique, où prévalent la morbidité et le maintien de la qualité de vie.Il est possible de traiter en première ligne les personnes atteintes de FH avec les inhibiteurs de PCSK9 en association avec les statines et l'ézétimibe, à condition que ces patients soient détectés précocement. Et puis le patient FH individuel n'est pas le seul concerné, mais l'ensemble de la famille car il s'agit d'une transmission héréditaire dominante. Selon les estimations, quelque 25.000 Belges présentent une FH. Face à un patient subissant un infarctus du myocarde à un jeune âge et avec un taux de LDL-C notablement élevé (>190 mg/dl ou >130 mg/dl sous statine), et sans preuve contraire, le réflexe est de le considérer systématiquement comme membre d'une famille FH. Il/elle doit être sensibilisé(e) au dépistage en cascade dans la famille, en incluant les enfants dès l'âge de 10 ans - pour entamer, si nécessaire, un traitement hypolémiant. Le LDL-C est l'indicateur de risque pour les maladies cardiovascu-laires et est facile à déterminer dans le sang. Avec la connaissance des familles qu'ils ont, les médecins généralistes jouent un rôle important à cet égard.