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Une enquête menée en Wallonie, en Flandre et à Bruxelles montre qu'environ 60% des femmes belges pensent que la ménopause est une période temporaire d'un an ou deux. Souvent, les femmes ne réalisent pas que la perte d'hormones est permanente et que cette phase couvre un tiers de leur vie. Un diagnostic rapide de la ménopause est essentiel pour traiter les plaintes et les symptômes cachés. Selon le Pr Herman Depypere, expert en ménopause et gynécologue à l'UZ Gent, "un autre malentendu est que les femmes doivent apprendre à accepter ces symptômes parce que la nature en a décidé ainsi". L'espérance de vie moyenne des femmes belges est aujourd'hui d'un peu moins de 85 ans. Il y a à peine 150 ans, elle n'était que de 46 ans. Dans certaines régions d'Afrique, elle est aujourd'hui de 54 ans. "La ménopause est une situation créée artificiellement parce que nous vivons plus longtemps. La génétique et l'épigénétique n'évoluent pas en si peu de temps, il faut des milliers d'années, et la fonction ovarienne d'une femme ne s'adapte pas non plus à son pays de naissance. Mais plus les femmes vivent longtemps, plus leurs neurones, leur peau, leurs os, leurs muqueuses et leurs vaisseaux sanguins doivent supporter l'absence de l'effet protecteur des hormones. La nature n'a certainement pas prévu cela", souligne le Pr Depypere. "C'est une bonne chose que nous vivions si longtemps, mais nous devons alors optimiser la qualité de vie plus tard dans la vie", estime-t-il. "Il y a encore un grand fossé entre les inconvénients que subissent de nombreuses femmes à la ménopause et les traitements utilisés, qui sont pourtant sûrs, efficaces et peu coûteux." 77% des femmes ménopausées présentent des symptômes tels que bouffées de chaleur, palpitations, douleurs articulaires, insomnie, fatigue, léthargie, troubles de l'humeur et perte de libido. La vaginite atrophique peut provoquer des dyspareunies, mais aussi des dysuries. Le "brouillard cérébral" est également un phénomène reconnu qui touche de très nombreuses femmes. Ces symptômes sont le résultat direct de la carence hormonale, mais la ménopause a également des conséquences asymptomatiques: "La pression artérielle et le taux de cholestérol ont tendance à augmenter et la sensibilité à l'insuline peut diminuer. Les os peuvent devenir plus poreux. Le métabolisme ralentit également, ce qui peut entraîner une prise de poids", précise le Pr Depypere. Le risque de maladies cardiovasculaires, de démence, de diabète de type 2 et d'ostéoporose augmente pendant la ménopause. "Principalement chez les femmes de petite taille, il peut y avoir une perte osseuse importante dans les premiers mois suivant la ménopause. Chez les femmes atteintes d'ostéoporose - elles sont environ 600.000 en Belgique -, l'ostéoporose est une cause de décès plus importante que le cancer du sein", martèle le Pr Depypere. "Les symptômes physiques et psychiques, mais aussi les implications silencieuses et sous-jacentes de la ménopause doivent être évalués et parfois traités. Cela nécessite un diagnostic correct et précoce."Cela commence par l'inclusion de la ménopause dans le diagnostic différentiel. "Il s'agit souvent de symptômes vagues et non spécifiques. Le lien n'est pas toujours établi", reconnaît le Pr Depypere. "Je vois régulièrement dans mon cabinet des femmes qui ont déjà subi une batterie de tests et d'analyses sanguines chez le rhumatologue parce qu'elles ont des problèmes articulaires, ou qui prennent beaucoup de médicaments (un antidépresseur, un somnifère, un traitement pour leur rythme cardiaque...). Dans certains cas, la ménopause explique l'ensemble des symptômes et une supplémentation hormonale peut suffire à tout remettre sur les rails."Le diagnostic est donc important, même en l'absence de symptômes actifs. L'absence de menstruations, associée à des taux élevés de FSH sérique (> 40 UI/l) et à une faible production d'oestradiol (E2 < 25 pg/ml) est un signe probant de ménopause. L'âge est également parfois inclus comme critère de diagnostic [1]. "La ménopause est une forme d'hypogonadisme hypergonadotrope: en raison de l'insuffisance ovarienne, il n'y a plus de rétroaction ou d'inhibition sur l'hypophyse, qui produit beaucoup de gonadotrophines", explique le gynécologue. "On ne peut pas le mesurer sous pilule ou minipilule, mais on peut le faire sous stérilet hormonal."Il est utile de doser simultanément les hormones thyroïdiennes et le métabolisme glucidique, au cas où ils seraient perturbés, et si la femme est à jeun, vous pouvez également déterminer le profil de cholestérol. "N'oubliez pas non plus la pression artérielle", ajoute le Pr Depypere. "50% des femmes de plus de 50 ans ont une pression artérielle élevée en raison de modifications vasculaires. Interrogez les femmes qui se plaignent de douleurs lors des rapports ou de symptômes vasomoteurs. Il est souvent très rassurant d'entendre que les palpitations, par exemple, sont liées à la ménopause. En outre, il convient de vous pencher sur les facteurs liés au mode de vie, la santé mentale et la satisfaction au travail."Le Pr Depypere recueille quotidiennement des témoignages de femmes brillantes, très instruites, sans prédisposition endogène à la dépression, qui s'effondrent soudainement à la ménopause. La fatigue, les troubles mentaux et les problèmes de concentration peuvent donner à ces femmes l'impression qu'elles ne peuvent plus tout assumer. Elles se sentent "prises en sandwich" entre une charge de travail élevée et la prise en charge des enfants, des petits-enfants, des parents et des beaux-parents, ou sont physiquement et émotionnellement épuisées. "Beaucoup de femmes décrochent. On leur attribue l'étiquette de dépression ou de burn-out, ce qui reflète un déni total de la cause réelle et organique du problème", relève le Pr Depypere. "En revanche, sur l'ensemble de tous les travailleurs, le nombre de jours de congé de maladie est le plus faible chez les femmes ménopausées qui ne présentent pas de symptômes ou qui sont bien traitées. Ces femmes ont une aptitude sans égale à tisser des liens entre leurs collègues, en raison de leur vaste bagage social et de leur expérience de vie, et elles constituent donc une importante plus-value sur le lieu de travail."Le type de symptômes et leur impact déterminent la politique à mener et le passage éventuel à la substitution hormonale. "La prise d'hormones suscite encore beaucoup de craintes - et de réticences à les prescrire -, mais ces craintes sont en fait non fondées", explique le spécialiste. "De nos jours, les préparations contiennent de l'oestrogène et de la progestérone naturels, qui sont très sûrs pour les seins. Et pour les femmes qui présentent des contre-indications (risque accru de thrombus, par exemple), il est possible de substituer par des oestrogènes transcutanés."Il existe des gels, des sprays, des patchs et des pilules, avec toutes sortes de dosages. "Il est toujours judicieux de consulter un gynécologue. Surtout pour les femmes qui commencent à prendre des hormones un peu plus tard, un bon encadrement médical est nécessaire", estime le professeur. Le médecin généraliste reste la personne qui centralise tous les soins, assure le suivi nécessaire, encourage les examens préventifs tels que les frottis, etc. "La ménopause couvre un domaine très large, allant du kinésithérapeute à des différents internistes en passant par le psychiatre parfois. Lorsque nous travaillons ensemble, nous obtenons de très bons résultats. Le médecin généraliste est la clé de cette approche holistique", souligne le Pr Depypere. La vitamine D et le calcium peuvent également s'avérer utiles, tout comme les antagonistes des récepteurs NK3 contre les bouffées de chaleur. Le fezolinetant, le premier antagoniste des récepteurs NK3, a été mis sur le marché en juin de cette année et d'autres molécules sont attendues. Méfiez-vous des remèdes coûteux et des compléments vitaminés, qui n'ont pas de fondement médical. "Il faut plutôt promouvoir un mode de vie sain et actif."Bien sûr, il y a des femmes qui se sentent bien et qui n'ont pas de facteurs de risque spécifiques. "Je ne suis certainement pas en train de plaider en faveur des hormones. Nous devons examiner individuellement les domaines dans lesquels nous pouvons éventuellement intervenir en soutien. S'il n'y a rien à faire, c'est très bien", commente le gynécologue. "Il est toutefois essentiel de stabiliser le poids. Prendre un kilo par an augmente le risque de cancer, de mortalité cardiovasculaire, d'inflammation chronique, etc."Il est déjà très bien de pouvoir influencer positivement la qualité de vie, mais nous pourrions être encore plus actifs au niveau de la prévention. De nouvelles données montrent qu'il est possible de lutter sélectivement contre la démence en traitant les femmes porteuses de la protéine APOE4 à la ménopause [2]. "D'autres études s'imposent, mais qui sait, cette protéine est peut-être un marqueur important pour les neurones, similaire au cholestérol LDL pour les vaisseaux sanguins. Idéalement, il y aura aussi à l'avenir un marqueur sanguin de la dégradation osseuse, ce qui nous permettra de lutter contre l'ostéoporose. L'objectif ultime est que les femmes puissent vivre de manière autonome le plus longtemps possible", conclut le Pr Depypere.