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A ce moment-là, les médecins étaient loin d'imaginer la cause de ses malheurs. Après avoir écarté plusieurs pistes, ils ont pensé à une occlusion intestinale et décidé d'ouvrir l'abdomen de la malade pour y rechercher une éventuelle masse obstructive. Et là, surprise : l'estomac de la patiente abritait une grosse boule verdâtre de cheveux de 15 cm sur 10 se prolongeant dans le duodénum par une autre boule velue de 3 cm sur 4. Ce cas rare est en réalité un syndrome de Raiponce ou trichophagie. Raiponce (en allemand Rapunzel), c'est le nom d'une princesse issue d'un comte populaire des frères Grimm. Et cette héroïne était réputée pour ses longs cheveux dorés, réunis en deux tresses soyeuses. De cheveux, il en est aussi question dans la trichophagie, un curieux phénomène qui pousse certains individus à manger leurs cheveux ou leurs cils. Mal connu, ce trouble du comportement, qui n'a rien d'un conte de fées, est dangereux car l'estomac est incapable de digérer les "intrus" dont il est ici question et il peut se bloquer, le problème d'obstruction pouvant s'étendre à l'intestin ou au colon. Ce trouble risque ainsi de provoquer une anémie et une perte de poids et il peut aussi engendrer sur le long terme une perforation de l'estomac, une péritonite, un ulcère, une appendicite ou une pancréatite.Par ailleurs, les parents se doivent d'être très attentifs car la trichophagie peut également avoir des répercussions sociales. Un tel comportement est en effet susceptible de causer des attitudes de rejet du malade.De plus, la trichophagie est souvent associée à la trichotillomanie, une autre pathologie spectaculaire qui consiste à s'arracher les cheveux et/ou les poils (sourcils, cils...) par plaques entières, de manière compulsive, pour calmer ses angoisses, entraînant une calvitie ou une absence progressive de pilosité, source de complexe supplémentaire.Si la trichotillomanie est relativement répandue - selon les études, elle toucherait environ 1 à 2% de la population - par contre la trichophagie est une maladie psychiatrique très rare, puisque seulement 88 personnes auraient été recensées dans la littérature scientifique internationale. Ce syndrome apparaît la plupart du temps chez les jeunes enfants ou les adolescents (40% des malades ont moins de 10 ans et 79% moins de 20 ans), en majorité des filles, et conduit inéluctablement aux symptômes qu'a présentés la patiente américaine.De nos jours, il existe diverses approches pour traiter le syndrome de Raiponce. Certains experts privilégient une démarche pharmacologique à base d'antidépresseurs tandis que d'autres optent pour une psychothérapie ou les deux. L'hypnose, les thérapies cognitivo-comportementales, la psychothérapie de soutien, etc. ont déjà été testées et donné d'excellents résultats. Quant à la patiente de l'Arizona, elle a pu rentrer chez elle six jours après son opération, ont rapporté ses médecins. Adressée à un psychiatre, elle devait également suivre un régime riche en protéines et faible en graisses pour résorber ses carences alimentaires.(référence : BMJ Case Report, 12 septembre 2016, doi : 10.1136/bcr-2016-21660)