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"La raison pour laquelle le valproate est encore prescrit est son efficacité. Cette molécule fait également partie des traitements anti-épileptiques qui ont un effet contre l'épilepsie généralisée, qui bénéficie d'un éventail très limité de traitements. De plus, le valproate se montre nettement plus efficace que d'autres traitements contre certains types d'épilepsie, comme par exemple l'épilepsie myoclonique juvénile. Il est communément admis que le valproate ne devrait jamais être le traitement de premier choix chez les femmes en âge de procréer, excepté éventuellement dans certains cas, par exemple lorsque les crises d'épilepsies ne sont pas contrôlées par d'autres traitements. Le fait que le choix du traitement devrait toujours être fait en concertation avec la patiente, bien informée de la raison de ce choix et des risques qu'il fait encourir, fait consensus. Car une crise d'épilepsie durant la grossesse fait courir des risques aussi bien pour la mère que pour le foetus. Dans tous les cas, il est important d'en discuter avec toutes les femmes atteintes d'épilepsie avant même qu'elles n'envisagent une grossesse : nous avons alors tout le temps de voir si un traitement peut être diminué, s'il faut en changer pour une autre molécule plus sûre ou d'ajuster le dosage pour qu'il soit le plus bas possible."Évaluation des risquesLe diagnostic de l'épilepsie peut en principe être posé lorsqu'une personne a été sujette à plus d'une - donc au moins deux - crise non provoquée.Et selon la définition, l'épilepsie est considérée comme étant en rémission lorsque les personnes n'ont plus eu de crise durant les dix dernières années, dont cinq sans traitement ; ce délai peut être plus court si ces patients présentaient un type d'épilepsie connue comme épilepsie idiopathique liée à l'âge, dont l'exemple typique est l'épilepsie-absence chez l'enfant. Une grande proportion de ces enfants grandit sans faire d'autres crises. Chez un patient épileptique, il est souvent difficile de prédire ce qui se passera après l'arrêt du médicament ; le seul moyen est donc d'attendre. "L'arrêt des médicaments est une décision qui doit vraiment se faire de concert entre le patient et le thérapeute. Habituellement, nous adoptons la règle des deux ans sans crise, avant de parler d'interrompre le traitement. Chez un patient chez qui l'épilepsie a été très difficile à traiter, cette conversation risque d'être menée beaucoup plus tard. Il s'agit également de prendre compte les circonstances et les préférences personnelles du patient. Il existe peu de règles valables pour tous, dans l'épilepsie. Tout est question d'évaluation des risques, avec peu de moyens de mesurer le niveau d'activité de l'épilepsie : par exemple, l'EEG a souvent peu de valeur prédictive."Surveiller les effets secondairesEn général, un traitement antiépileptique n'est administré de manière chronique qu'après une deuxième crise. Mais l'évaluation des risques doit aussi être envisagée entre ces deux crises : "Après la première crise, alors que l'EEG et l'imagerie sont normaux, le risque de seconde crise dans les deux années qui suivent atteint 20 à 30%. Le risque peut alors l'emporter sur le risque d'effets secondaires potentiels d'un médicament à prise quotidienne. En effet, le risque de récidive après la survenue d'une deuxième attaque est augmenté de 60% ; c'est également le cas après une première attaque où l'on peut objectiver des anomalies sur l'EEG ou l'IRM. C'est pourquoi un traitement antiépileptique est alors entamé dès la première attaque."Ces dernières années, un grand nombre de médicaments antiépileptiques ont été mis sur le marché, avec généralement moins d'effets secondaires que les plus anciens. Néanmoins, ils agissent tous au niveau du système nerveux central, avec des effets secondaires possibles chez les personnes qui présentent déjà des prédispositions par exemple pour la dépression, les troubles anxieux... Les généralistes doivent rester attentifs aux effets secondaires possibles et poser des questions spécifiques, de manière à envisager avec le patient des alternatives (souvent) possibles.Génériques et taux plasmatiquesLes prescripteurs de traitements antiépileptiques ne sont pas liés par l'obligation de prescrire des génériques. Bien que de récentes études comparatives ne constatent aucune différence entre l'original et son générique, ce n'est pas le cas pour tous les médicaments. De plus, un changement génère souvent du stress, et certains épileptiques y sont très sensibles.Les concentrations plasmatiques des anticonvulsivants ne sont pas systématiquement déterminées. Elles le seront cependant en cas de doute sur la compliance avec des effets secondaires potentiellement toxiques, de fluctuations pouvant être causées par des interactions médicamenteuses (en particulier chez les patients âgés polymédicalisés), ou pendant la grossesse (clairance qui peut grandement diminuer et nécessiter une augmentation des dosages). Cependant, on peut trouver des personnes qui ne font plus de crise alors que leur taux est infrathérapeutique, tandis que d'autres avec des niveaux potentiellement toxiques ne souffrent pas d'effets secondaires et ont besoin de cette dose pour être débarrassés des crises.Le dosage de la plupart des médicaments antiépileptiques doit être augmenté progressivement (pour moins d'effets secondaires) ; ce sera aussi le cas si l'on change de médicament. S'il est bien toléré, il pourra alors remplacer le traitement précédent. Le médecin généraliste est souvent impliqué dans la mise en route d'un traitement, car le patient peut encore faire une crise ou parce qu'un test sanguin est nécessaire pour, par exemple, vérifier la fonction hépatique.Alternatives aux médicamentsLa chirurgie de l'épilepsie doit certainement être envisagée si le médicament ne fonctionne pas, car il s'agit de la seule option curative. "La plupart du temps, on recourt à la chirurgie si l'épilepsie est réfractaire à plusieurs médicaments, mais il y a des exceptions comme, par exemple, les personnes atteintes de sclérose mésiotemporale ou de sclérose hippocampique, connue pour être souvent accompagnées d'épilepsies pharmacorésistantes, où l'activité épileptique est souvent responsable de déclin cognitif. En réséquant chirurgicalement, à un stade plus précoce, une partie du lobe temporal ou de l'hippocampe, on obtient un bénéfice sur le plan cognitif."En cas d'échec médicamenteux, il est possible de recourir à d'autres traitements symptomatiques : l'implant d'un stimulateur du nerf pneumogastrique réduit les crises chez 50% des enfants atteints d'épilepsie sévère ; le régime cétogène peut avoir un effet spectaculaire chez les enfants souffrant d'épilepsie sévère et un retard mental.La stimulation cérébrale profonde pour l'épilepsie n'en est aujourd'hui qu'au stade expérimental.Génétique de l'épilepsieL'UZA mène de nombreuses de recherches sur la génétique, impliquée dans 60% des épilepsies : soit en tant que facteur de risque - facteurs génétiques prédisposants, comme on en rencontre dans l'hypertension artérielle ou l'hypercholestérolémie - soit du fait d'une maladie génétique unique. "Avec l'avènement des techniques de séquençage de nouvelle génération, de nombreux gènes liés à l'épilepsie ont été décrits ces dernières années. Il s'agit souvent d'épilepsies associées à des retards mentaux. Mais certains sont liés aux formes les plus courantes, même à l'épilepsie focale dont on pensait qu'elle ne pouvait pas être génétique puisqu'elle trouve son origine dans une partie du cerveau. Connaître le défaut génétique ne veut pas dire que l'on disposera bientôt d'un traitement, mais de nombreuses recherches y travaillent."Des traitements spécifiques existent déjà pour plusieurs formes monogéniques. Par exemple, les enfants présentant une mutation génétique au niveau d'un transporteur de glucose peuvent très bien être traités par un régime cétogène. Pour les épilepsies multigéniques, il existe encore peu de traitements.Aujourd'hui, les principales indications pour mener une recherche génétique sont : des antécédents familiaux, des cas d'épilepsie accompagnés de problèmes neurologiques supplémentaires (retard mental, autisme, problèmes psychiatriques...) chez les enfants ou les adultes, ou encore l'existence d'un syndrome épileptique spécifique connu pour être souvent d'origine génétique (comme par exemple des crises d'épilepsie focales associées à des phénomènes auditifs, pour lesquelles des mutations particulières sont connues).