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Et si cet enfant était victime du "syndrome des cheveux incoiffables" ? Késako ? Un slogan de pub pour shampoing ? Nullement. On parle ici d'une maladie à part entière. Mentionnée pour la première fois en 1973 par un dermatologue toulousain sous le nom savant de "pili trianguli et canaliculi", elle se caractérise, comme l'indique son nom, par des cheveux crépus, secs, désordonnés, poussant dans tous les sens et impossibles à coiffer ou à aplatir avec un peigne. Petit à petit, ils deviennent blond argenté ou couleur paille. Bref, un régal pour les coiffeurs...Cette pathologie, qui se manifeste généralement durant l'enfance, entre 3 mois et 12 ans, est très rare, à tel point que le portail officiel des maladies rares, Orphanet, n'est même pas en mesure de déterminer l'incidence. Une centaine de cas, tout au plus, sont répertoriés dans le monde. Toutefois, ce syndrome est probablement un peu plus fréquent car on sait que les personnes qui en souffrent n'ont pas le réflexe de se rendre chez le médecin pour le régler.Voilà qui explique peut-être pourquoi la recherche a mis si longtemps à comprendre le mécanisme du syndrome. Malgré tout, des chercheurs des Universités de Toulouse et de Bonn, en collaboration avec des dermatologues et généticiens de sept pays différents, ont réussi à dénicher 11 patients à la crinière incoiffable et à lancer une étude qui leur a permis de faire la lumière sur l'origine génétique du syndrome.En cause, des mutations récessives d'un trio de gènes qui concourent à la formation du cheveu et à la bonne santé capillaire. Le premier, le gène TCHH code pour la trichohyaline, un des composants structuraux du cheveu. Les deux autres, PAD3 et TGM3, sont à l'origine d'enzymes, la peptidyl-arginine désiminase 3 et la transglutaminase 3, qui prennent la trichohyaline pour cible à tour de rôle.En temps normal, les protéines exprimées sont reliées entre elles par la kératine. PADI3 modifie TCHH de manière à ce que les filaments de kératine puissent y adhérer tandis que TGM3 produit ensuite le lien physique. Il suffit qu'un seul de ces trois gènes ne soit pas fonctionnel pour qu'une réaction en chaîne se déclenche et que la fibre capillaire devienne rigide et donc incoiffable.Une série de tests sur la souris a confirmé le phénomène. L'inactivation d'un des trois gènes provoque des anomalies similaires à celles observées chez les humains sur le développement du pelage et des moustaches des rongeurs.Pour les auteurs, les résultats qu'ils ont obtenus sont encourageants. En plus de décrire l'origine moléculaire de la maladie et de permettre un meilleur diagnostic, ils apportent une meilleure connaissance du cheveu et des mécanismes de sa formation. Reste à découvrir un moyen de soigner cette maladie, qui, si elle a de quoi faire s'arracher les cheveux, n'en demeure pas moins bénigne et s'estompe fort heureusement à la puberté...(référence : The American Journal Of Human Genetics, 1er décembre 2016, DOI : 10.1016/j.ajhg.2016.10.004)