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"En 2013, Lublin et al (1) ont réécrit les définitions de l'évolution clinique de la SEP, plus en phase avec les connaissances scientifiques actuelles. Les anciennes définitions dataient en effet de 1996. Or, la façon dont nous abordons aujourd'hui le traitement de la SEP est différente de celle du début des années 90 ; cette nouvelle classification soutient donc cette nouvelle perception de la maladie. "Selon la nouvelle définition, chez un patient présentant un syndrome clinique isolé (SCI) ou une SEP rémittente, la maladie peut être active (ce qui implique des épisodes de poussées et/ou des lésions visibles à l'IRM et/ou récentes sur le cerveau ou la moelle épinière) ou non. En outre, parmi les patients atteints de SEP progressive (= augmentation du handicap), on distingue ceux présentant une maladie active de ceux qui ont une maladie non-active et ceux dont la maladie est stable.Le Dr Willekens relie ces manifestations cliniques à la physiopathologie (de manière très simplifiée) : "Au début de la maladie, la réponse immunitaire acquise (par les lymphocytes T et B) joue le rôle le plus important en termes relatifs. Mais au fil du temps, le système immunitaire inné prend la main dans le cerveau (activation de la microglie), même si les lymphocytes B folliculaires sont toujours impliqués. Du fait de l'inflammation chronique, des lésions axonales secondaires apparaissent, provoquées par un dysfonctionnement mitochondrial, un stress oxydatif, ou à cause de médiateurs toxiques tels que le glutamate. Les traitements actuels reposent principalement sur une adaptation de l'immunité et sur la prévention, si possible, des lésions axonales secondaires. Lorsque les lésions secondaires dominent dans le processus de la maladie, les traitements actuellement disponibles s'avèrent inefficaces. Initier précocement le traitement semble donc la meilleure stratégie à suivre. De plus, il est logique de poursuivre et optimaliser le traitement tant que la maladie montre des signes d'activité. "Il n'y a actuellement aucun médicament qui peut guérir la SEP ou contenir à 100% une inflammation dans le système nerveux central, mais certains médicaments se montrent plus efficaces que d'autres. L'un des traitements les plus efficaces pour faire un "reset" du système immunitaire est la transplantation de cellules souches hématopoïétiques. Ce traitement comporte des risques importants et est considéré, par rapport à la majorité des autres traitements disponibles, comme étant destiné aux patients qui connaissent une évolution très agressive de leur maladie et qui n'ont pas répondu à d'autres traitements puissants. Les lésions anciennes ne pourront cependant pas être récupérées par ce traitement.Une fois que le diagnostic de sclérose en plaques rémittente est posé avec certitude (actuellement, souvent après une poussée), on commence par l'un des traitements qui va freiner la maladie. Après une seule poussée, on optera généralement pour un traitement de première ligne ; à ce moment, on peut décider avec le patient de la thérapie (injections, voie orale) qui lui convient. Mais pourquoi ne pas opter pour le traitement le plus puissant dès le départ? " Si le traitement est tout à fait sans risque, nous le faisons bien sûr. Mais nous essayons toujours de réaliser une bonne analyse risques-bénéfices. Les critères de remboursement, qui ne sont pas toujours conformes aux recommandations scientifiques, jouent parfois également un rôle. Le traitement de la SEP est si complexe que des 'sous-spécialisations' sont nécessaires."Les traitements connus depuis le plus longtemps, et qui ont le plus fait preuve de leur innocuité sont l'interféron bêta classique et l'acétate de glatiramère, tous deux injectables, bien que de nos jours, ils sont moins souvent utilisés depuis que les traitements oraux sont disponibles dès l'entame du traitement. " Pour un traitement de longue durée, les comprimés sont plus confortables que les injections : le diméthyl fumarate et le tériflunomide peuvent être prescrits en première ligne. En général, leur tolérance est relativement bonne, mais ils nécessitent une surveillance stricte incluant des tests sanguins réguliers. "Un traitement de deuxième ligne, plus puissant, inclut le fingolimod (par voie orale) et le daclizumab (disponible depuis le 1er avril 2017 sous forme d'injection sous-cutanée à réaliser une fois par mois). Le natalizumab et l'alemtuzumab sont des traitements très puissants : le natalizumab (une perfusion en IV chaque 4 semaines) est un traitement efficace et puissant pour les patients connaissant une évolution rapide de la SEP ou qui n'ont pas répondu de manière adéquate à un traitement de première ligne, et qui, de préférence, ne sont pas porteurs d'anticorps anti-JCV (virus John Cunningham). Si le patient a passé un test sanguin dans les six mois avec des anti-JCV positifs, il devra bénéficier d'une surveillance accrue, par IRM, voire un arrêt du traitement en raison du risque de développer une LEMP (leucoencéphalopathie multifocale progressive). L'alemtuzumab, un puissant immunosuppresseur, est administré chez la plupart des patients en deux courtes cures en IV ; il est important de se rappeler que quatre ans après leur dernier traitement IV, les patients doivent continuer à être suivis par des tests de sang et d'urine, afin de détecter rapidement la présence d'effets secondaires (maladies auto-immunes) et pouvoir les traiter à temps de façon appropriée.L'ocrelizumab, un anticorps monoclonal anti-CD20, (perfusion en IV tous les 6 mois) semble fonctionner non seulement contre la SEP rémittente, mais aussi chez les patients présentant une SEP primaire progressive chez qui on a obtenu une réduction relative de la progression de la maladie de près de 25 %. " Il s'agit d'un bon résultat dans le groupe de patients pour lesquels, jusqu'à présent, aucun traitement capable de modifier la maladie n'était disponible. Contre la SEP secondaire progressive, une étude évalue l'efficacité du siponimod, un modulateur du récepteur de la sphingosine-1-phosphate - tout comme le fingolimod - à usage oral, contre placebo ; on enregistre une diminution d'un peu plus de 20 % du risque relatif de progression à 3 mois. "Toutes les pistes sont en outre étudiées dans la SEP progressive : les statines, l'acide alpha-lipoïque, la biotine (vitamine B7 à hautes doses), les cellules souches mésenchymateuses... Les recherches visent également à solliciter le système immunitaire inné : " A l'UZA, la vaccination auto-logue visant les cellules dendritiques toléro-gènes constitue une nouvelle piste de traitement : le but consiste, en quelque sorte, à rééduquer le système immunitaire et veiller à ce que les lymphocytes T autoréactifs ne soient plus activés quand ils entrent en contact avec les antigènes de la myéline. Une étude de phase I est dans les starting-blocks. "1. Lublin F et al. Defining the clinical course of multiple sclerosis. Neurology 2014 ; 83(3) : 278-86.