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C'est la première fois qu'une intervention nutritionnelle de ce type - le remplacement de suppléments vitaminiques et compléments alimentaires par des produits laitiers - a été étudiée à si grande échelle chez des personnes âgées institutionnalisées. Les preuves apportées par cette étude ont de quoi encourager les MRS belges à mettre elles aussi au menu suffisamment de laitages. Le journal du Médecin a rencontré la nutritionniste Inge Coene pour lui demander son éclairage sur la question. L'étude australienne a inclus plus de 7.000 seniors institutionnalisés, âgés de 86 ans en moyenne. Dans la moitié des 60 institutions participantes, les résidents ont reçu des portions de lait, de yaourt ou de fromage supplémentaires pour améliorer leurs apports en calcium et en protéines [2]. Les taux de vitamine D, eux, ont été boostés à l'aide de suppléments (dans les deux groupes). Les apports accrus en produits laitiers étaient associés à une diminution du risque de 33% pour les fractures de tous types, de 46% pour les fractures de la hanche et de 11% pour les chutes, sans impact sur la mortalité ni effets gastro-intestinaux indésirables liés à l'intervention. Les bénéfices nutritionnels des produits laitiers étaient déjà bien connus et les résultats de cette étude semblent les étayer par de nouvelles preuves scientifiques. "Ces aliments sont riches en protéines de haute qualité et en calcium, mais ils constituent aussi une source de vitamines (B2, B12 et K2) et de minéraux comme le phosphore et le potassium. C'est un ensemble de nutriments intéressant et qui peut contribuer à une bonne santé osseuse", confirme Inge Coene. Les produits laitiers, en particulier dans leurs variantes "entières", sont toutefois aussi relativement riches en graisses saturées qui pourraient accroître le taux de cholestérol et donc le risque de maladies cardiovasculaires. "Bien que les études portant sur ce groupe d'aliments n'observent plus vraiment ce lien, mieux vaut tout de même ne pas en abuser", poursuit la spécialiste. "Les laitages (demi-)écrémés devraient en principe livrer des bénéfices comparables et ont une moindre teneur en graisses. Néanmoins, la combinaison de nutriments utiles et de calories supplémentaires n'est pas sans intérêt dans cette population sensible à la malnutrition et à la sarcopénie." Plusieurs facteurs jouent un rôle dans le risque de malnutrition chez les personnes âgées, dont notamment la baisse de l'activité physique et de l'appétit. La malnutrition provoque à son tour une perte de force et de masse musculaire, une décalcification osseuse, un risque accru de chutes et une détérioration de la qualité de vie. "Des projets ont déjà été lancés dans un certain nombre de MRS pour combattre la malnutrition chez les personnes âgées fragiles, mais ils ont souvent été suspendus en raison d'un manque de personnel, de moyens financiers insuffisants ou de la crise du coronavirus", explique Inge Coene. "Et c'est justement ce qui fait l'intérêt de cette nouvelle étude, qui a examiné une intervention accessible, peu coûteuse [3] et simple... avec des résultats tout de même assez spectaculaires." Au-delà du risque réduit de fractures et de chutes, les sujets qui avaient consommé davantage de produits laitiers affichaient aussi un poids stable, tandis que ceux du groupe contrôle avaient perdu 1,4 kg en moyenne après 24 mois. La nutritionniste souligne qu'il ne faut pas forcément prévoir un yaourt, un verre de lait ou une tranche de fromage supplémentaire. "Il existe une foule d'autres manières abordables, agréables et durables d'intégrer davantage de produits laitiers à l'alimentation. On peut par exemple enrichir une soupe ou une purée de poudre de lait, servir les légumes avec une sauce à base de lait ou de fromage, proposer des panades, des dips au yaourt, des milkshakes, des desserts au fromage frais... Avec un peu de créativité, il est tout à fait possible de répondre aux besoins et desiderata de chacun! Vu l'investissement en temps et les efforts à consentir, il sera toutefois important de bien se concerter avec les cuisiniers et le personnel", observe encore Inge Coene. Dans un contexte où la consommation de produits d'origine animale est souvent pointée du doigt pour son impact écologique, on peut aussi se demander s'il est vraiment responsable de "prescrire" davantage de produits laitiers. "Le tout est de trouver le bon équilibre", estime la spécialiste. "Trois portions quotidiennes de produits laitiers ont leur place dans une alimentation saine et respectueuse de l'environnement. Ces aliments sont par ailleurs faciles à obtenir, savoureux, polyvalents et riches en nutriments... mais aussi familiers, ce qui peut avoir son importance dans un public âgé. Vous pouvez essayer de convertir tout le monde au tofu et au lait d'avoine, mais dans les vieilles générations, ce n'est pas toujours évident. En plus, la valeur nutritionnelle des alternatives végétales varie beaucoup d'un produit à l'autre. Chez les personnes qui digèrent mal les produits laitiers, une boisson au soja enrichie en calcium et en vitamines peut être une bonne solution sur le plan nutritionnel", précise encore Inge Coene.