Retrouver le temps d'écouter ses patient(e)s. Décider de prendre ce temps, et alléger son carnet de rendez-vous pour leur consacrer un temps long, riche d'échanges, et qui (re)fasse sens. C'est le défi du Dr Séverine Legros, gynécologue. Parce que la santé au féminin "ne se limite pas àun utérus et deux ovaires!"
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Petite-fille de pédiatre (le Dr Jacques Legros), fille d'endocrinologue (le Pr Jean-Jacques Legros de l'Université de Liège) et heureuse maman d'une future gynécologue elle aussi (Juliette) et d'une autre fille (Louise) qui termine sa médecine et rêve, elle, de chirurgie, Séverine Legros, médecin gynécologue spécialisée entre autres en endométriose, a décidé de réorienter sa pratique pour mieux accompagner ses patientes. Une remise en question qui pourrait faire écho chez d'autres qui, à l'instar de Séverine, ressentent eux aussi peut-être aujourd'hui une certaine frustration et lassitude à ne pas pouvoir donner davantage de place à leurs patients. "Aujourd'hui, on n'a plus le temps. Ou plutôt le système ne veut pas qu'on prenne le temps. On se limite à un organe...", souffle la gynécologue. "Mais moi, je ne peux pas imaginer qu'une femme se limite à son utérus et ses ovaires!"Après plus de 20 ans d'expertise médicale, des dizaines de bébés mis au monde et des centaines d'accompagnement sur le parcours souvent complexe de la PMA, Séverine Legros désire renouer avec l'étymologie même du mot "gynécologue", terme apparu dans la seconde moitié du 19e siècle: être à l'écoute de la parole (logos) des femmes (gunè). "J'ai aimé la gynécologie lors de mes stages en médecine. J'ai aimé la variété de cette spécialité, et la prise en charge globale de la femme qu'elle implique. Et plus le temps passe, plus je m'intéresse à cet accompagnement dans toutes ses dimensions."Si, à 30 ans, cette maman de quatre enfants se passionnait pour l'obstétrique et la fertilité en partageant le vécu de ses patientes, désormais, à 54 ans, elle aspire à les accompagner sur le chemin de la ménopause et soulager les symptômes de l'âge. "Il est évident que nous, médecins, vieillissons avec nos patients. Nous devons continuer de les entourer, écouter leurs plaintes et les envisager dans une approche intégrée, holistique", explicite la Dre Legros. "Bien souvent, en tant que gynécologues, nous ne revoyons nos patientes que l'année suivante, sans retour direct et donc sans savoir si nous avons pu les aider..."Tout au long de sa carrière, Séverine Legros, qui travaille par ailleurs régulièrement à La Réunion pour des remplacements de gynéco, notamment pour les troubles de la fertilité, et à Madagascar, où elle fait de la médecine humanitaire*, a enchaîné les formations pour enrichir la prise en charge de ses patientes. Une véritable touche-à-tout, qui nourrit sa grande curiosité intellectuelle. Elle s'est ainsi formée en nutrithérapie (Cerden), qu'elle utilise pour soulager l'endométriose, et en médecine de la fertilité, pour préparer le terrain d'une grossesse sans recourir trop vite à la FIV. Elle a aussi suivi des cursus en hypnose, en EFT, en aromathérapie, en coaching qualité de vie... Autant de cordes à un arc qu'elle souhaite aujourd'hui inscrire dans le cadre de la médecine dite "des 3P": prédiction, prévention et personnalisation. "J'ai un 'kif' pour la médecine fonctionnelle depuis longtemps ; cette médecine permet d'écouter ses patients longuement, en prenant son temps, et de pointer plusieurs plaintes en même temps, au sein d'une approche globale, pour y apporter des réponses", souligne la Dre Legros, qui aspire désormais à être "une sorte de super médecin généraliste de la femme", lance-t-elle en souriant. Nom du concept: Gyn&coeur. Pas question, toutefois, de tomber dans une médecine de niche, réservée aux seules nanties: "La médecine fonctionnelle implique souvent des frais élevés, en bilan sanguin, puis en compléments alimentaires... Ici, après une anamnèse via un questionnaire qui, outre les troubles d'ordre gynécologique, prend aussi en compte le parcours de vie, je cible avec mes patientes deux plaintes à traiter en priorité, pour limiter les coûts. Puis on se revoit quelques mois plus tard pour s'occuper de deux autres problèmes, et ainsi de suite. Une patiente en surpoids qui consulte pour des troubles du sommeil ou de sa libido ne doit pas forcément commencer par perdre du poids, comme le ferait bien souvent la médecine classique", note-t-elle. "Et régler un ou deux problèmes permet parfois de solutionner spontanément les autres soucis." Une médecine fonctionnelle couche par couche, telle un mille-feuille, adaptée en fonction des moyens financiers des patientes, pour en faciliter l'accès. "Et en prenant le temps de bien expliquer à la patiente, pour sceller avec elle une alliance thérapeutique qui va la motiver, et l'autonomiser, car chaque femme est différente et donc unique."