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Le journal du Médecin: Globalement diriez-vous que malgré les problèmes soulevés, les améliorations indispensables et les recommandations, les stages des médecins spécialistes en formation sont de qualité? Caroline Leminse : C'est la première fois qu'une enquête à propos de la qualité de la formation des médecins spécialistes d'une telle ampleur est menée par le service 'Professions de santé et Pratique professionnelle'. Comme nous le soulignions dans notre rapport: l'acquisition effective, à la fin des stages, des compétences et connaissances nécessaires à la pratique autonome et qualitative d'une spécialité n'est pas remise en question. C'est davantage le chemin vers l'acquisition des compétences et connaissances qui doit être optimisé. Une réelle culture de formation doit encore émerger. Nos résultats mettent en évidence des disparités parfois importantes entre les différents services de stages, où cette culture de formation est déjà bien amorcée pour certains d'entre eux. Tant l'offre d'activités cliniques dans les services de stages que les connaissances, compétences et attitudes des maîtres de stage sont des bases solides sur lesquelles peuvent s'appuyer les médecins spécialistes en formation. Par ailleurs, bien que des divergences d'opinions soient observées entre les médecins spécialistes en formation et les maîtres de stage (coordinateurs), ces derniers semblent globalement conscients des lacunes sur le terrain. Ce qui est un bon point de départ pour le changement. Vous attendiez-vous à ces réponses, globalement? Y a-t-il eu de très grosses surprises? Oui, nous nous attendions globalement à ces réponses. Un travail préparatoire avait déjà été réalisé avec les associations de médecins spécialistes en formation, ainsi qu'avec des médecins spécialistes du Conseil supérieur des médecins spécialistes et des médecins généralistes. Ce rapport a permis de confirmer et d'étayer de nombreux éléments déjà portés à la connaissance de la direction générale soins de santé du SPF et à celle du ministre. Comme mentionné précédemment, les stages sont jugés positivement en termes d'acquisition de compétences et de connaissances, pourtant la qualité de la formation pratique est évaluée beaucoup moins positivement par les MSF. Les besoins des services semblent trop souvent prendre le pas sur les besoins en termes de formation. Le manque de clarté autour des rôles et responsabilités des maîtres de stage (coordinateurs), ainsi que le manque de temps pour les mettre en oeuvre ont également très clairement été mis en évidence dans ce rapport. Quel suivi sera-t-il apporté à cette enquête particulièrement fouillée et complète? Dès le mois de mai 2023, une task force sera mise en place. Celle-ci réunira les principaux acteurs de terrain: associations de médecins spécialistes en formation, maîtres de stage et maîtres de stage coordinateurs d'hôpitaux universitaires et périphériques, doyens, membres du Conseil supérieur des médecins spécialistes et des médecins généralistes, coordinateurs de formation, présidents de commission d'agrément et membres de l'administration. L'objectif sera de préciser et de concrétiser les recommandations du rapport. Nous souhaitons en ressortir avec des pistes concrètes pour établir un plan d'action. Les recommandations que vous faites peuvent être réalistement suivies d'effets, ou certaines d'entre elles nécessiteraient des moyens (financiers) que nous n'avons pas aujourd'hui? Nous avons conscience que les MSF représentent une ressource financière pour les services de stage et les hôpitaux: d'une part via le travail fourni en tant que candidats-spécialistes et d'autre part via le budget supplémentaire qui a été libéré pour compenser un potentiel surcoût lié à la mise en oeuvre de la convention collective relative aux conditions de rémunération et de travail des MSF. Actuellement, les maîtres de stage sont déjà rémunérés pour la composante pédagogique des stages. Un budget est débloqué à cet effet depuis 2016. En 2021, le montant mensuel des indemnités atteignait 672,04 euros par MSF encadré. L'objectif de la task force sera de prendre en compte les réalités du terrain afin que les recommandations et propositions faites au ministre répondent aux objectifs d'amélioration de la qualité de la formation, tout en recueillant l'adhésion du terrain. Ces propositions devront prendre en compte une multitude de réalités de terrain (différences entre spécialités, nombre de MSF formés, taille de l'équipe de stage, services de stage universitaires et non universitaires...). Quel est le timing? Il est certain que les modifications de fond de la législation prendront du temps. Il en va de même pour le changement de culture qui est nécessaire puisqu'il est question d'un changement des mentalités. Parallèlement, certaines mesures seront rapidement mises en place avec des effets plus rapides sur la qualité des stages: des modifications légales sont déjà prévues, notamment autour de la notification des problèmes de qualité au cours des stages et d'une procédure d'urgence en cas de problèmes graves détectés ou signalés lors des stages. Quel est votre objectif ultime? En tant que service 'Professions de santé et Pratique professionnelle', c'est la qualité des stages des MSF et, à plus grande échelle, la qualité des soins de santé, qui nous occupent principalement. Une formation pratique de qualité est l'une des bases d'un système de soins de santé sain et efficient. Celle-ci doit mener les candidats-spécialistes à la pratique autonome et qualitative de leur spécialité. C'est ce à quoi nous souhaitons tendre davantage, via un changement de système et de culture. Cependant, en termes de financement, ces changements sont encore difficilement quantifiables pour le moment.