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Le ministre a défini quatre objectifs: qualité perçue par le patient, état de santé de la population (accessibilité et équité sociale), valeur ajoutée pour le patient (efficience), travail du prestataire durable et approprié. Pour y arriver, il précise trois axes stratégiques: soins accessibles à tous, surtout les plus vulnérables, soins directs au patient via la première ligne, la prévention et l'automatisation (approche communautaire), et les soins en réseau (coopération, intégration et innovation). En support, les modèles de financement seront renouvelés. Retenons de ce cadre conceptuel que toute proposition ne s'inscrivant pas dans cette perspective ne sera pas retenue. La structure de pilotage se compose d'un comité de pilotage (cabinets ministériels), de trois Task Forces (objectif soins de santé, soins efficaces - devenus "appropriés), cadre budgétaire. Avec le soutien d'un comité scientifique pour l'aspect méthodologie de priorisation des propositions venant des Task Forces (ndlr: lire jdM n°2669). Le pilotage coordonne, définit les priorités, et décide des projets qui seront alors, chacun, confiés à un groupe d'experts, le but étant de lancer les projets qui auront rapidement des résultats (agile scrum). La Task Force "objectif des soins de santé" tient compte de la déclaration gouvernementale, des publications sur notre performance (Inami, OCDE, OSE, KCE) dans un cadre "Health in All policies". Les objectifs généraux sont exprimés en sous-projets spécifiques (méthode Smart). La performance est évaluée selon six paramètres: accessibilité, équité, qualité, soutenabilité, efficience et résilience. Les commissions d'accords et de conventions sont chargées de proposer chacune trois objectifs. Le tri sera effectué par la cascade décisionnelle, la décision finale prise par le Comité de l'assurance et le Conseil général de l'Inami, et le ministre. La Task Force "soins efficaces" est bien mal nommée. Un soin efficace est celui qui donne un résultat positif par rapport à son but. Par exemple un antibiotique est efficace s'il contrôle une bactérie. Ici, on retient les soins efficaces qui permettent des gains d'efficience (diminution du coût, augmentation du résultat). En conséquence, on vise la réduction des différences de pratiques, la réduction des soins inefficaces. On nous promet de réinvestir dans l'"under use" les moyens dégagés par la correction de l' "over use". Sachant que ce recyclage vertueux ne se fera pas au sein de chaque secteur, mais au niveau du budget global des soins de santé. La mission d'économiser 40 millions d'euros pour refinancer des prestations médicales spécifiques, faisant partie de l'accord médico-mutualiste 2021, est reprise dans le catalogue des travaux. Il est significatif que la base même des travaux soit les documents publiés par le Service d'évaluation et de contrôle médicaux (SECM) en 2014 et 2016, visant essentiellement la lutte contre le gaspillage (Cf. Plan d'action du Contrôle médical 2018). L'efficacité est liée à la lutte contre la surconsommation et à la fraude, sous la dénomination "soins efficaces". La Task Force a changé le nom, devenu "soins appropriés". Encore faut-il savoir qui jugera du caractère approprié et selon quels critères (volume? coût? Clusters de prestataires? ) La Task Force produira des mesures structurelles et d'encadrement, et des mesures effectives (surtout celles proposées par le SECM - cf. supra) de limitation des consommations excessives. La Task Force "Trajectoire budgétaire pluriannuelle", est (curieusement? ) la seule à ne pas compter en son sein de représentant de l'Absym. Elle tiendra compte du lien entre mesures d'économies et de revalorisations dans le calendrier budgétaire, proposera des critères pour les investissements futurs en soins de santé, et fera des suggestions pour l'usage de la norme de croissance de 2% qui ne sert plus exclusivement à couvrir l'effet volume des prestations. Aucun droit n'est acquis. Toute l'architecture du système mis en oeuvre, ses finalités et son modèle, sont conçus pour réaliser pratiquement un scénario déjà écrit. Les marges d'initiative laissée à chacun des groupes concernés sont excessivement faibles, et même nulles si elles ne se raccrochent pas à la vision établie. La cocréation et donc corsetée dans un solide carcan de décideurs évidemment pourvus du plus solide bon sens.