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Dans un conte merveilleux où tout est vrai tout est faux, où Athènes est légendaire, où les elfes ensorcellent, et les fées lancent des sortilèges, pourquoi ne pas se servir de la magie intemporelle de la marionnette? Celle-ci fait corps avec son manipulateur visible, ce qui renforce l'aspect faux-semblant de cette comédie de Shakespeare. Pas qu'elle n'ait ni queue ni tête (quoique), voire celle d'un âne, puisque cette pièce raconte l'histoire d'amours contrariés réunis dans une Brocéliande enchantée, où fées et elfes, roi et reine vont s'amuser à faire battre le coeur des amants trop "humains" à contretemps, quand ce n'est pas celui de la reine des fées, victime en effet du coup de pied à... l'âne. Mise en abîme vertigineuse de cette oeuvre qui, de surcroît, montre au théâtre l'esquisse d'une représentation... théâtrale, Le songe d'une nuit d'été façon manipulée (les humains le sont déjà dans la pièce) par Jean-Michel d'Hoop (auteur du magnifique L'herbe de l'oubli avant la pandémie) dans une adaptation personnelle, à savoir moderne, drôle, musicale (de Grease au R'n'B), aux costumes actuels, où des bimbos croisent des damoiseaux, joue dans le verbe, la musique et des atours du clash temporel et... intemporel. C'est tout à la fois charmant, comique, parfois un peu poussif dans les scènes de répétitions théâtrales de personnages mi-nains mi-schtroumpfs, et surtout prodigieux dans le chef des huit jeunes acteurs marionnettistes, dont la dextérité stupéfiante et la synchronicité leur permettent de faire danser leurs figurines, qu'ils échangent dans leur manipulation mais également au niveau des voix: car ils sont autant clameurs que montreurs. De cette oeuvre à double voire triple fonds, l'adaptation à double langue (anglais-français) et langage, et à visions multiples (celle des figurines et celle des comédiens qui les font vivre) que la compagnie Point Zéro propose, confère à ce charivari originel, cet imbroglio sentimental, ce vaudeville lubrique, bref à ce songe, une dimension de rêve. Et plutôt qu'au moment du final dissiper l'illusion, cette "merveilleuse" production... la renforce.