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La rencontre doit commencer à 11H00. Il est 10h45. La dame à la billetterie nous indique la route hundred seventy one. Interloqué, on se faufile jusqu'à la scène. Ses groupies connaissent des bribes de vie de Philippe Peetrons par coeur. "Il est marié et a deux enfants", nous dit l'une d'elles. "Il a été champion de ski et je l'ai même vu slalomer sur des pistes en Italie", raconte une autre. "Il a de superbes yeux et a déjà produit deux 45 tours", susurre la troisième. "Il parle quatre langues et joue au golf", renchérit Célia. Nous ne sommes pas dans la salle mythique du Spirit of 66 à Verviers mais à Molière-Longchamps. Service radiologie. L'accueil est celui de trois secrétaires médicales. Il est 11h10 et la star s'est fait (légèrement) attendre. Nous pouvons commencer l'interview du Pr Peetrons. Dans La vérité si je mens 2, un rabbin reprend le parcours de Serge Benamou, joué par Sergio Garcia. La scène est mythique. Le Rabin évoque un CV improbable où ses performances s'enchaînent dès le berceau. Le texte aurait pu être repris du CV de Philippe Peetrons, à la différence près que chez lui, tout est vrai. Lisez plutôt: son premier 45 tours sort dans les bacs à ses 16 ans sous le pseudonyme de Philippe Petronce. Deux chansons influencées par Jacques Dutronc Les noirs sont si malheureux ou par Antoine, La fille à papa. La première sera boycottée par la RTBF car trop impliquée politiquement dans le contexte de la lutte pour les droits civiques aux USA. Un disque qu'il enregistra dans le même studio que Polnareff. Encouragé par son producteur à continuer malgré 1.500 ventes, il entame des études de médecine. "J'avais fait la première d'Adamo au théâtre de la Verdure de Huy et ça a été une expérience traumatisante. Je ne me voyais pas revivre cela devant des gens distraits, s'empiffrant de frites avant le concert de leur idole", confie le professeur. En première année de médecine, sa passion pour le ski le pousse sur le sommet des pistes durant huit semaines d'affilée. Une désertion qui n'est pas au goût de son professeur de chimie qui le gourmande en ce sens: "Que penseriez-vous d'un médecin qui mette sur sa porte: revenez plus tard, je suis parti skier?". Il l'affuble d'un zéro pointé comme note de travaux pratiques, ce qui lui vaudra sa seule seconde session de toutes ses études. Jusqu'au-boutiste, il continue la médecine et le ski grâce au soutien du futur docteur Michel Camus, qui prendra note pour lui via des feuilles Stencil. Durant ses études, il deviendra champion belge de ski et continuera tout schuss. Il deviendra accessoirement champion belge de hockey. "Devenu radiologue, je laisse tomber les notes. La musique, c'est pour les vacances et les apéros", confie-t-il. C'est le hockey qu'il pratique par contre toujours qui l'incite à s'y remettre. Pour La nuit du Hockey, cinq joueurs de clubs différents montent un groupe. On y retrouve John Dumont au micro, Philippe Peetrons à la guitare et voix, Christian van den Gracht à la batterie, Joris Dewinter aux claviers et le professeur de chirurgie digestive Guy-Bernard Cadière au saxophone. Après quelques concerts, ils décident de se séparer. Un répit avant la troisième mi-temps. Avec une secrétaire radio, un ami arbitre (de hockey bien entendu), un bassiste qui travaille dans les casseroles du mess de l'hôpital, un médecin de l'hôpital et un technologue, le Pr Peetrons reforme un groupe pour la fête du printemps des Hôpitaux Iris-Sud. La direction convie à cette occasion tout leur personnel à une grande nuit mêlant sketches et musique. "Ça a marché immédiatement et l'ambiance était chouette. Faut dire que le public hospitalier connaissait toujours quelqu'un au sein du band", confie-t-il. "Nous nous sommes améliorés et les amateurs se sont fait remplacés par des pros. Nous avons formé The Blues Blanches.". En dehors de La nuit du printemps, ils se produisent pour des fêtes privées. "On a toujours voulu proposer des chansons en anglais ou en français ; des sons que les gens connaissent", souligne-t-il. Des stars telles qu'Eric Clapton, Dire Straits, Johnny et Indochine. Des concerts qui les ont conduits au Parlement européen ou au Spirit of 66. Ils sont parvenus à rassembler jusqu'à 1.500 personnes en une soirée. Un nombre qui semble coller à la peau de Philippe Petronce depuis ses 16 ans. Papa et grand-père, son regard bleu disparaît derrière des pensées tendres lorsqu'il évoque ses petits- enfants dansant sur le podium en fin de concert. "Mon épouse adore venir me voir", reconnait-il. Au quotidien, sa passion lui permet de fermer la porte d'un métier parfois très dur pour un autre univers. La musique est l'aliment de l'amour.