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À l'heure actuelle, la loi relative à l'assurance obligatoire soins de santé et indemnités du 14 juillet 1994 prévoit que le médecin doit informer son patient de son statut (conventionné ou non) et de ses tarifs. Mais elle ne prévoit pas que ces tarifs doivent également être affichés. Une situation sur le point de changer, à l'aune d'une décision prise en ce début octobre en Commission santé de la Chambre. "Nous souhaitons étendre les dispositions actuelles et instaurer l'obligation d'afficher les tarifs pour les prestations les plus habituelles", justifient Karin Jiroflée et Jan Bertels (chef de cabinet du ministre Vandenbroucke, NDLR), députés Vooruit porteurs du projet de loi en 2019. La loi modifiée début octobre oblige donc concrètement les prestataires de soins "d'informer clairement et préalablement au traitement les bénéficiaires des tarifs qu'ils pratiquent pour les prestations les plus courantes dans leur discipline en faisant une distinction entre l'intervention de l'assurance, la quote-part personnelle et, le cas échéant, le supplément maximum pratiqué (...) L'information comportera au minimum un affichage clair et visible au cabinet et, le cas échéant, par le biais de canaux en ligne". En outre, il faudra mentionner les heures conventionnées et les heures non conventionnées. Qui contrôlera? La Direction générale de l'inspection économique et le Service de contrôle médical de l'Inami. Pas les mutualités, bien que leur rôle sera de signaler d'éventuels problèmes et de sensibiliser les ayants droit. En cas de non-respect de la règle, une amende de 125 euros est prévue (Vooruit tablait initialement sur 1.000 euros), en plus de conséquences sur les honoraires maximum applicables. "S'ils n'informent pas préalablement les bénéficiaires des jours et heures pour lesquels ils n'ont pas adhéré aux accords ou aux conventions, les tarifs qui découlent de la nomenclature sont les honoraires maximums qui peuvent être exigés pour les prestations dispensées à ce moment." L'Absym a formulé quelques critiques par rapport à ce projet de loi. Premier grief: le risque d'une charge administrative accrue. Deuxième grief: la définition des prestations courantes, très vague. Se posent également d'autres questions sans réponses claires: Comment feront les médecins partiellement conventionnés qui doivent faire un affichage double? Quid des médecins qui se rendent à domicile, de ceux qui réalisent des prestations à distance? Qu'en sera-t-il, enfin, des médecins non conventionnés qui appliquent la tarification des médecins conventionnés? "Il faudra également songer à indiquer si le maximum à facturer est d'application ou non, pour ne pas faire fuir ces patients", ajoute Kathleen Depoorter (N-VA). L'Absym estime également que l'affichage de tarifs composés d'heures conventionnées et non-conventionnées pourrait provoquer la confusion chez les patients. "Je pense au contraire que cela sera plus clair. Sur la question des suppléments, c'est une bonne chose de savoir qu'une prestation peut-être trois fois plus chère chez un médecin par rapport à un autre pour la même prestation. Cela montre aux patients à quel point notre système est complexe", rétorque Sophie Merckx (PTB). Daniel Bacquelaine (MR), pour sa part, met en garde: attention à l'inflation législative. "Nous sommes arrivés à un texte satisfaisant. Mais cette obligation d'être transparent sur les honoraires existe déjà dans la loi relative aux Droits du patient, mais aussi dans la déontologie médicale. Le risque est de créer la confusion pour le citoyen qui reçoit la même information de manière différente avec des points de vue qui ne sont pas toujours les mêmes."Ou plutôt la patate chaude. Les parlementaires ont posé le cadre législatif, mais ils n'entendent pas se mouiller dans l'application pratique de ce cadre. "Le Comité de l'assurance détermine, sur proposition de la commission de conventions ou d'accords compétente, pour chaque catégorie de dispensateurs de soins, le modèle d'affiche. Ce modèle d'affiche contient une liste des prestations les plus courantes, en précisant à chaque fois l'obligation du dispensateur de soins de mentionner les tarifs de l'intervention de l'assurance, la quote-part personnelle et, le cas échéant, le supplément maximum", se contente d'indiquer la loi. "Je ne pense pas qu'il nous appartienne de choisir, en tant que parlementaires, le modèle adéquat", justifie Gitta Vanpeborgh (Vooruit), également à la base du projet de loi. "C'est le rôle de l'Inami, avec les fédérations professionnelles. La lisibilité, la clarté, la transparence, tout comme la charge administrative qui découlera de cet affichage, seront la résultante du travail qui sera mené par l'Inami et ses commissions." Et Sophie Merkx de renchérir: "J'espère que l'Inami proposera un bon outil pour aider les médecins pour l'affichage. C'est un défi à relever pour l'Inami de proposer un modèle qui soit compréhensible pour tout le monde."En outre, l'Inami sera chargé de définir ce que sont les pratiques courantes à afficher. La communication ou l'affichage des tarifs lors de visites à domicile, de consultations à distance et autres, seront également définies au sein des commissions Inami. Les porteurs du projet de loi sont lucides: il ne s'agit pas de la panacée pour rendre les soins accessibles à tous. Mais c'est une première pierre à l'édifice. "L'objectif est d'améliorer l'accessibilité des soins et la transparence pour le patient, mais ce projet de loi ne résout pas tout", explique Gitta Vanpeborgh. "D'autres actions sont nécessaires, par exemple une campagne publique sur le conventionnement. Les citoyens doivent acquérir plus de sagesse sanitaire."Parmi les problèmes non résolus, un fait étonnant ressort: la problématique des suppléments parfois demandés sous la pression des hôpitaux. "C'est un point d'attention important mais, dans ce cadre, nous ne pourrons pas le résoudre", convient la députée socialiste flamande. "C'est une loi attendue depuis longtemps", conclut Laurence Hennuy (Écolo). "On ne prétend pas résoudre tous les problèmes d'accessibilité, mais c'est un premier pas pour améliorer la transparence pour les patients. Nous savons que la mise en oeuvre n'est pas simple. Elle traduit la complexité du financement des soins de santé qui n'oeuvre pas dans le sens de l'accessibilité."