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C'est le cas pour de nombreuses femmes africaines, victimes notamment de violences sexuelles. Deux Hennuyers ont participé activement à la création récente de l'ASBL Interface Compassion Internationale: son secrétaire est le Dr Christian Mostosi (Péruwelz), et son président, le pasteur Emmanuel Mukwege (Ath). Ce dernier est le frère du gynécologue Denis Mukwege, lui aussi pasteur, qui s'est vu attribuer en 2018 le Prix Nobel de la Paix comme "médecin qui répare les femmes". On se souvient de son action contre les violences et les mutilations sexuelles subies par les femmes en République Démocratique du Congo. "Notre ASBL a pour vocation de poursuivre et étendre l'oeuvre de Denis Mukwege, qui parraine l'association", explique Christian Mostosi, médecin du travail et tabacologue. "Nous avons comme objectifs, d'une part, d'octroyer des microcrédits aux femmes victimes de violences sexuelles et de les aider à démarrer professionnellement au moyen de formations pour les rendre autonomes financièrement et, d'autre part, de construire un dispensaire médical à Kalehe (à 60 km de Bukavu)."Il faut savoir qu'outre la pratique du viol comme arme de guerre, les mutilations sexuelles sont loin de disparaître de la surface du globe. Même l'Europe est touchée, notamment par des pratiques dites traditionnelles comme l'excision ou pire, l'infibulation. Les chiffres montrent d'ailleurs une recrudescence de ces pratiques en France, pour ne mentionner que nos voisins hexagonaux. "En Afrique, il arrive que des femmes meurent avant d'arriver à l'hôpital", témoigne Emmanuel Mukwege. "De nombreux rebelles congolais et rwandais occupent encore les montagnes du Kivu. Ils en descendent de temps à autre pour commettre des méfaits, dont des violences sexuelles sur les femmes. Nous pourrions sauver des vies par l'installation d'un dispensaire permettant d'offrir les premiers soins avant leur transfert (parfois long, à cause de la distance et de l'infrastructure routière déficiente) vers l'hôpital."Avec la médiatisation du Prix Nobel de la Paix en 2018, l'idée est venue de poursuivre l'oeuvre non seulement en recueillant les femmes victimes de violence mais aussi de les aider à démarrer une activité professionnelle locale, pour les sortir définitivement de la misère sociale et financière, explique l'association. Cette aide a d'abord pris la forme d'un microcrédit octroyé il y a quelques années par l'église Interface de Péruwelz. Il s'agissait de petites sommes octroyées à une dizaine de survivantes de violences sexuelles soignées à l'hôpital de Panzi. Par un encadrement, une formation et un suivi réalisés par la Fondation Panzi, 90% de ces femmes bénéficiaires d'un microcrédit ont multiplié leur modeste capital par plusieurs centaines de fois. Mieux encore: huit ans plus tard, la plupart d'entre elles déclaraient être sorties de la pauvreté. Elles avaient pu notamment acheter des parcelles de terre ou des maisons, et payer les études universitaires de leurs enfants. Actuellement, ces femmes sont constituées en mutuelles de solidarité. Elles se retrouvent une fois par semaine pour s'encourager mutuellement et contribuent à la caisse de solidarité de leur mutuelle. Cette initiative permet de soutenir l'une ou l'autre membre frappée par un deuil ou une maladie qui nécessite une hospitalisation. C'est cette réussite qui a conduit à la décision de mettre en place une structure officielle pour renouveler l'expérience et la développer. "Il s'y ajoutera une activité de maternité", explique le pasteur. "Dans la région, de nombreuses femmes devant accoucher doivent traverser le lac Kivu en pirogue puis marcher plusieurs heures, avec la mortalité infantile et maternelle que cela engendre.""Un médecin ayant déjà une expérience dans l'humanitaire et dans la région a déjà été choisi pour travailler dans le futur dispensaire", précise Christian Mostosi, qui a déjà pu compter sur l'aide de quelques sponsors. "Il a commencé en février une formation de remise à niveau et de perfectionnement, avec l'aide d'une bourse que nous lui procurons pendant douze mois."